Elles brûlent des millions de dollars pendant des années sans toucher le moindre profit. Puis l'heure de vérité sonne. Un succès signifie souvent la fortune; un échec, la disparition. Les entreprises de biotechnologies attisent autant l'espoir que la méfiance. Leur éternel défi: le financement.

Elles brûlent des millions de dollars pendant des années sans toucher le moindre profit. Puis l'heure de vérité sonne. Un succès signifie souvent la fortune; un échec, la disparition. Les entreprises de biotechnologies attisent autant l'espoir que la méfiance. Leur éternel défi: le financement.

Neurochem. Par les temps qui courent, il suffit de prononcer ce mot pour accélérer le rythme cardiaque des investisseurs.

Dans un peu plus d'un mois, l'entreprise québécoise saura si son produit vedette contre l'Alzheimer rempli les attentes qu'elle a fondées en lui. Avec un marché évalué à 3 milliards de dollars US, les promesses sont gigantesques. Mais un échec pourrait tout aussi bien sonner le glas de l'entreprise.

Entraîné par les rumeurs, le prix de l'action oscille au gré du cardiogramme des investisseurs. De quel côté partira-t-il? Les analystes sondés par l'agence Bloomberg le voient quelque part entre 27,70$... et 2,20$.

Bienvenue dans le monde des biotechs. Un monde imprévisible, risqué, qui carbure plus souvent qu'autrement à la loi du "ça passe ou ça casse".

Le terrain de jeu de ces entreprises, c'est la biotechnologie. BioQuébec la définit comme "la manipulation des organismes vivants (souvent des bactéries ou des levures) dans le but de produire des biens et des services". La science a été propulsée par la découverte, il y a 25 ans, de la technologie de recombinaison de l'ADN. Environnement, foresterie, processus industriels: les applications sont nombreuses. Mais ce sont les entreprises qui fabriquent des médicaments - les biopharmaceutiques - qui suscitent le plus d'intérêt.

Comprendre l'univers de ces sociétés, c'est goûter la frénésie qui entoure actuellement une entreprise comme Neurochem. En gardant en tête que cette excitation est précédée de longues années marquées, elles, par la patience. Des années où l'on investit des millions de dollars dans un futur produit miracle, sans promesse aucune que l'on reverra un jour la couleur de cet argent.

Parce que le terme "biotech" désigne de petites sociétés en développement qui misent tout dans l'espoir de trouver un nouveau médicament. Dans la plupart des cas, elles n'ont aucune source de revenu, contrairement à celles qu'on appelle les "grandes pharmas" - les multinationales que sont les Merck, Pfizer et Bristol-Myers Squibb de ce monde.

Objectif: financement

Pas de revenu ou très peu, mais des idées de grandeur qui demandent d'importants investissements sur une longue période: c'est la quadrature du cercle à laquelle font face les biotechs. L'argent, elles n'ont pas le choix que de se tourner vers l'extérieur pour le trouver. Elles ne peuvent donc survivre que si elles évoluent dans un environnement prêt à leur donner une chance.

Il y a les subventions et les fonds publics. La Bourse. Et le capital-risque d'organismes ou d'individus prêts à gager sur le succès d'une entreprise - quitte à perdre si ça échoue, mais à participer aux profits si ça explose.

Du chercheur universitaire qui crie "Eurêka" au fond de son laboratoire jusqu'aux tablettes des pharmacies, il faut en moyenne 14 ans pour développer un médicament. Les produits doivent être testés sur des animaux (les essais précliniques), ensuite sur des humains en bonne santé (études de phase I) et enfin sur des cohortes de malades de plus en plus larges (phase II et phase III).

Un manque d'argent à l'une ou l'autre de ces étapes peut entraîner la mort de l'entreprise. Un milieu propice à l'éclosion des biotechs, c'est donc un endroit où les chercheurs font des découvertes. Mais aussi un milieu où les fonds sont disponibles à chaque étape de développement pour faire fructifier ces découvertes. Bref, c'est au carrefour de la science et des affaires qu'évolue l'industrie des biotechnologies.