Se trouvant trop cher à son goût, Bell a décidé de se mettre à la porte.

Se trouvant trop cher à son goût, Bell a décidé de se mettre à la porte.

Malgré 10 ans de loyaux services, Bell largue Expertech et ses 1700 employés, dont 700 au Québec. Bell, qui détient 75% des actions d'Expertech, se cherche un nouveau fournisseur pour installer ses réseaux de télécommunication au Québec et en Ontario.

Sans son principal client, Expertech ne pourra faire autrement que de fermer ses portes d'ici quatre mois. Au contraire de leurs collègues chez Olymel, les employés d'Expertech ont refusé de réduire leur salaire de 25% afin de sauver leur emploi.

Bell a créé Expertech en 1996, en partenariat avec la firme d'ingénierie SNC-Lavalin, qui détient 25% des actions. Bell voulait rentabiliser son expertise en matière d'installation de réseaux auprès d'autres entreprises de télécommunications.

L'idée n'a jamais donné les résultats escomptés. En 2006, les contrats de Bell représentaient encore 90% des revenus annuels d'Expertech, évalués à 300 millions de dollars.

«Nous croyions avoir un bon mix avec l'expertise de SNC-Lavalin en ingénierie, dit Patrick Pichette, président de l'exploitation de Bell. Mais ça n'a jamais vraiment fonctionné dans le reste du Canada et aux États-Unis. Expertech a eu beaucoup de difficultés à gagner des appels d'offres.»

«Nous avions souvent le prix le plus élevé, explique Philippe van Leeuwen, directeur des communications d'Expertech. Nous arrivions à décrocher des contrats seulement quand le client acceptait de payer plus cher pour notre expertise.»

Le contrat de quatre ans liant Bell à Expertech se termine le 1er juillet. Pour la première fois en 10 ans, Bell a demandé à plusieurs sociétés de lui soumettre des offres en vue de son prochain contrat d'installation. Bell a eu une petite surprise: Expertech demandait 25% plus cher que ses concurrents, soit 50 millions de dollars.

Bell a donné quelques mois supplémentaires à Expertech pour lui présenter une offre concurrentielle. À prix égal, Bell resterait dans la famille.

«Bell veut continuer de travailler avec nous, mais pas à n'importe quel prix», dit Philippe van Leeuwen.

Comme sa convention collective se terminait en novembre dernier, Expertech a demandé des concessions salariales de 25% à ses employés. Son offre finale a été rejetée lundi matin. Quelques heures plus tard, l'entreprise dont le siège social est situé à Toronto annonçait sa fermeture d'ici quatre mois.

La société s'est entendue avec ses 170 employés administratifs mais elle demandait des concessions beaucoup plus importantes à ses 1260 techniciens, qui ont rejeté la dernière proposition à 65%.

Les techniciens ont refusé la création de deux catégories d'employés moins bien rémunérées. Les techniciens de la première catégorie auraient conservé leur salaire annuel de 58 000 $.

Les techniciens des deux dernières catégories auraient vu leur salaire passer respectivement à 52 650 $ et 35 360 $. L'entreprise voulait aussi réduire son nombre de techniciens à 900. La semaine de travail, elle, aurait été revue à la hausse: de 37 heures et demie à 40 heures.

Trop, c'est trop, a tranché le Syndicat des communications, de l'énergie et du papier (SCEP), qui a recommandé à ses membres de voter contre la proposition.

«La proposition est déraisonnable, dit Michel Ouimet, vice-président du SCEP. J'aimerais bien que Bell me dise avec quelles entreprises elle discute car je n'en connais pas d'autres qui peuvent faire ce travail-là au Québec. Ce sont nos gars qui vont être engagés par d'autres compagnies pour faire le même travail.»

Mardi matin, les représentants syndicaux ont demandé une réunion de la dernière chance à Bell, SNC-Lavalin et Expertech. Sage décision, car les tribunaux ne leur seront d'aucun recours.

«L'entreprise était dans son droit de transférer certaines de ses activités à des sous-traitants», dit Christian Brunelle, professeur en droit du travail à l'Université Laval.