IBM Canada, et son usine de Bromont dans les Cantons-de-l'Est, cherchent comme jamais auparavant à recruter le plus grand nombre possible de retraités.

IBM Canada, et son usine de Bromont dans les Cantons-de-l'Est, cherchent comme jamais auparavant à recruter le plus grand nombre possible de retraités.

Le géant informatique n'est cependant pas sur le point de se transformer en Wal-Mart, McDonald's ou autres Rona, où les retraités, peu importe leur expérience, ont été accueillis à bras ouvert ces dernières années pour combler de nombreux postes.

IBM cherche plutôt à réembaucher ses propres employés, c'est-à-dire ceux qui ont donné 30 années de loyaux services et qui sont maintenant admissibles à la retraite. Ce programme de retour au travail existe chez IBM depuis près de 15 ans, mais il n'a jamais été aussi prisé.

«Le besoin est là et le nombre de retraités qui décident de revenir travailler est effectivement en hausse depuis quelques années. L'entreprise y trouve son compte et les employés aussi. C'est une formule gagnant-gagnant», explique Jean-Guy Fournier, du service des communications d'IBM à Bromont, la seule usine du groupe en sol canadien.

L'usine de Bromont, qui compte près de 2800 employés, célèbre cette année ses 35 ans d'existence.

L'expression «gagnant-gagnant» s'avère on ne peut plus juste. Ceux qu'on appelle les «retraités sur appel» (de l'anglais retirees on call) ne travaillent que deux jours par semaine et gagnent (ce qui comprend leur revenu de pension) le même salaire qu'à l'époque où ils occupaient leur emploi à plein temps.

Cependant, même s'ils ont le statut de retraité, ils doivent malgré tout contribuer au régime des rentes du Québec, cotiser à l'assurance emploi, etc.

Le retour au travail des retraités est simple et peu contraignant. L'employé signe un contrat (renouvelable) où il s'engage pour une période de six mois ou pour un «bloc de 1000 heures», comme on dit dans le jargon, réparti sur une année.

Des retraités qui optent à répétition pour des contrats de six mois sont même admissibles, nous dit-on, aux prestations d'assurance emploi tout en continuant à recevoir leur pension.

Quant à l'employeur, il en tire lui aussi de nombreux avantages. Il profite tout d'abord d'une expertise qu'un jeune diplômé ou qu'un nouveau journalier ne peut lui offrir.

Ensuite, et c'est là que ça devient intéressant, l'employeur n'a plus à contribuer au fonds de retraite de l'employé (qui a maintenant le statut de retraité) et n'a pas non plus à lui payer de programmes sociaux.

Il y a actuellement entre 75 et 100 retraités sur appel à l'usine IBM de Bromont. Il y a quelques années, il y en avait deux fois moins.

Et avec le nombre important de travailleurs qui vont atteindre 30 ans d'ancienneté au cours des prochaines années (en moyenne 100 annuellement), ce nombre est appelé à croître de façon importante, croit Jean-Guy Fournier.

Au Québec, IBM emploie près de 5000 personnes.

S'agit-il d'une aubaine pour IBM qui n'a plus à embaucher du personnel plus jeune? «Nous continuons quand même à engager des nouveaux employés dans nos différents départements. Notre programme est là pour faciliter la transition vers la retraite de nos employés. Et ça nous permet de profiter, nous et les nouveaux employés, de leur expérience plus longtemps», se défend M. Fournier.

Michel Perrier, 64 ans, a été l'un des premiers à Bromont, il y a sept ans, à se prévaloir de ce programme de retraite à temps partiel.

Il ne regrette pas son choix. Grand amateur de pêche à la mouche, il peut maintenant s'adonner plus souvent à son passe-temps préféré tout en conservant le même revenu qu'avant.

«C'est une option qui est de plus en plus à la mode, car il y en a beaucoup qui ont à peine 55 ans lorsqu'ils atteignent leurs 30 ans de service. La direction me demande régulièrement s'il n'y aurait pas de nouveaux retraités qui voudraient revenir travailler», dit celui qui organise tous les deuxièmes mardis du mois un déjeuner pour les anciens travailleurs d'IBM Bromont.

Retourner travailler pour son ancien employeur est un phénomène encore nouveau au Québec, croit André Petit, professeur en management à l'Université de Sherbrooke.

«On le voit beaucoup actuellement dans le secteur de la santé à cause de la pénurie de main-d'oeuvre, dit-il. Mais dans le secteur industriel, c'est encore peu répandu même si on en entend parler depuis longtemps».

Avec la cohorte de baby-boomers qui prendront leur retraite dans les 10 à 15 prochaines années, poursuit le prof d'université, un problème de «transfert des connaissances» se fera sentir.

«Plusieurs entreprise vont se battre pour garder leurs employés d'expérience. C'est pour ça qu'on observe en ce moment une tendance lourde à investir dans les ressources humaines. Tout le monde veut devenir un employeur de choix», affirme André Petit.