Van Houtte (T.VH) continuera d'offrir son traditionnel «goût d'Europe» dans ses trois millions de cafés servis chaque jour, mais l'entreprise, elle, deviendra américaine.

Van Houtte [[|ticker sym='T.VH'|]] continuera d'offrir son traditionnel «goût d'Europe» dans ses trois millions de cafés servis chaque jour, mais l'entreprise, elle, deviendra américaine.

Après quatre mois de négociations avec divers acheteurs potentiels, la société québécoise a décidé de se vendre à Littlejohn, un fonds d'investissement privé du Connecticut.

La transaction est évaluée à 600 M$, ce qui représente un prix d'environ 25 $ l'action et comprend la prise en charge de la dette.

«Il s'agit d'une prime de 44 % par rapport aux 20 jours de Bourse qui ont précédé l'annonce de la mise en vente de la compagnie, le 12 janvier 2007», s'est réjoui Paul-André Guillotte, président du conseil, pendant une conférence de presse.

La transaction doit être approuvée par les actionnaires et sera conclue au plus tard au début de juillet.

Devant les journalistes, les dirigeants de Van Houtte ont répété leur satisfaction, sans montrer un brin d'émotion ou de nostalgie. Ils refusent de voir cette transaction comme la fin d'une époque pour la marque québécoise lancée en 1919.

«Dans quelques semaines, Van Houtte aura de nouveaux propriétaires, mais elle sera la même compagnie, a assuré Jean-Yves Monette, président et chef de la direction. Le siège social demeure à Montréal, à coté de notre usine de torréfaction. L'équipe de direction demeure en place. Notre mandat est de poursuivre l'exécution du plan de développement que nous avons mis en route il y a quelques années.»

Il s'agit de la deuxième transaction en une semaine au Canada pour Littlejohn. Mercredi dernier, sa filiale Littlejohn Fund III s'est engagée à acquérir le group québéco-floridien Intertape Polymer, pour 500 M$ US.

Littlejohn achètera toutes les actions en circulation de Van Houtte, privatisant ainsi l'entreprise. Plusieurs membres de la direction actuelle, dont Jean-Yves Monette et Gérard Geoffrion, demeureront actionnaires, en plus de conserver leurs postes.

Le Fonds de solidarité FTQ sera également un investisseur, mais refuse de dire à quelle hauteur. «Dans la grande majorité des cas, quand on fait un investissement privé, on cherche à avoir une participation minoritaire de 10 % à 40 %», a laissé savoir Josée Lagacé, porte-parole du Fonds.

La structure exacte de la nouvelle compagnie sera dévoilée après l'assemblée extraordinaire des actionnaires.

Offre «juste»

La transaction annoncée hier est bien perçue par l'analyste Sara O'Brien, de RBC Marchés des capitaux. L'offre de 25 $ l'action est «juste» et légèrement supérieure à ses prévisions, écrit-elle.

Au cours des derniers mois, Van Houtte a discuté avec une cinquantaine d'acheteurs potentiels en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Littlejohn, en plus de partager une «vision» commune, a fait l'offre la plus élevée.

Le nombre d'acheteurs potentiels était limité, croit Stephen Gauthier, gestionnaire de portefeuilles qui suit de près les activités de Van Houtte.

«Je ne pense pas qu'il y avait tant d'intérêt ferme au départ, a dit M. Gauthier. Ce n'est pas un acteur qui a une mainmise sur un marché, et ils sont dans un petit marché. Dans le capital privé, ça prenait une petite compagnie, ça n'aurait pas pu être un KKR.»

Le gestionnaire déplore ce nouveau rachat d'une entreprise québécoise -un «fleuron» - par des intérêts étrangers.

«Malgré ce qu'ils peuvent dire, on sait bien que les choses vont changer et qu'éventuellement ces gens-là vont remettre en vente la compagnie et que le contrôle va sortir du Québec», a-t-il dit.

Selon Stephen Gauthier (qui ne détient pas d'actions de l'entreprise), Van Houtte n'a pas fait assez d'efforts dans certains secteurs, notamment pour contrer la concurrence accrue des Starbucks et Second Cup avec leurs cafés terrasses.

Van Houtte compte plus de 1900 employés au Canada et aux États-Unis. La transaction avec Littlejohn ne devrait pas influencer le niveau d'emplois, a-t-on dit hier.

L'entreprise se spécialise dans la torréfaction, la distribution et la commercialisation de cafés haut de gamme. Elle les vend dans ses propres établissements, dans des épiceries et offre un populaire service de «pause café» aux entreprises. L'an dernier, ses revenus ont atteint 378 millions et ses profits, 22,5 millions.

Les dirigeants de Littlejohn ont refusé d'accorder des entrevues lundi. Mais dans un communiqué, ils ont affirmé leur confiance dans l'équipe de direction de Van Houtte.

«Nous avons trouvé en Van Houtte une entreprise bien gérée, un produit de qualité, une marque reconnue, une riche tradition et un plan de développement solide», a déclaré Michael I. Klein, président de Littlejohn.

Van Houtte avait annoncé sa mise en vente en janvier dernier, après que son titre ait perdu 13 % en un an. L'action a clôturé à 24,78 $ lundi à la Bourse de Toronto, en hausse de 2,8 %.

La société se vante d'être la seule en Amérique du Nord à offrir «le goût de l'Europe» dans une tasse.