La Chine, en quelques décennies, est devenue l'usine mondiale des biens de consommation de la planète, mais qu'en est-il de l'Inde ? Conférencier invité à la Journée de l'informatique, Jacques Topping, président de la société de portefeuille MissionBis, a dressé, hier, un portrait de l'économie indienne considérée, aujourd'hui, comme une terre d'accueil pour l'industrie des technologies de l'information et des communications (TIC). Et maintenant c'est sur le secteur de la recherche et du développement que l'Inde veut mettre la main.

La Chine, en quelques décennies, est devenue l'usine mondiale des biens de consommation de la planète, mais qu'en est-il de l'Inde ? Conférencier invité à la Journée de l'informatique, Jacques Topping, président de la société de portefeuille MissionBis, a dressé, hier, un portrait de l'économie indienne considérée, aujourd'hui, comme une terre d'accueil pour l'industrie des technologies de l'information et des communications (TIC). Et maintenant c'est sur le secteur de la recherche et du développement que l'Inde veut mettre la main.

Faut-il prendre la menace au sérieux ? Assurément, pense M. Topping qui agit comme conseiller auprès d'entreprises désireuses d'analyser le marché asiatique. Selon lui, l'Inde a le potentiel et les compétences pour attirer la recherche de pointe sur son territoire. "C'est même une stratégie habile de la part d'un pays qui compte un milliard d'habitants, dit-il, mais qui a pour conséquence de délocaliser les emplois des pays industrialisés vers l'Asie."

Un phénomène auquel n'échappe pas le Canada, ni le Québec. D'après certains analystes, le Québec perdra 90 000 emplois au profit de l'Inde d'ici 2010. Des entreprises comme Canam, CGI, Bell, les banques RBC et TD ont déjà des bureaux et des services là-bas.

Depuis 15 ans, les délocalisations se comptent par milliers. À preuve, presque tous les géants de l'informatique et des télécoms ont déménagé des secteurs entiers d'activités en Inde. C'est le cas d'Apple qui, en août, ouvrait à Bengalore un centre de support technique employant 1500 personnes. Même chose pour IBM qui compte aujourd'hui 38 000 travailleurs en Inde, alors qu'il n'en avait que 6000 quatre ans plus tôt. Conséquence : les délocalisations ont privé les États-Unis de 400 000 emplois depuis 2004 et on prévoit que ce chiffre atteindra 900 000 en 2015 malgré les mesures protectionnistes adoptées par le gouvernement Bush.

Qu'est-ce qui motive les compagnies à s'installer en Inde? Parmi les motifs invoqués, une enquête de TechnoCompétences - un organisme québécois de support aux emplois dans les TI - mentionne la main-d'oeuvre. Là-bas, les travailleurs sont nombreux, qualifiés et bon marché, souligne-t-on. À titre indicatif, les universités indiennes diplôment, chaque année, plus de 300 000 ingénieurs et le salaire moyen d'un analyse en TI est d'environ 5000 $ alors qu'en Amérique du Nord, il est payé plus de 35 000 $. L'Inde dispose également d'un marché de 1,1milliard d'habitants et la Chine tout à côté en compte autant.

L'industrie québécoise et canadienne des TI se retrouve donc en position délicate. Et notre dollar à 90¢US n'aide pas. En fait, les exportations canadiennes des technologies de l'information et des télécommunications (TIC) ont glissé du 6e au 13e rang à l'échelle mondiale. Autre problème, le pays manque de travailleurs spécialisés. Ce qui incite les entreprises à regarder ailleurs. Depuis l'éclatement de la bulle en 2000, les programmes de TI dans les cégeps québécois ont enregistré une baisse de 50 % des inscriptions ; celles des universités ont fondu de 15 %.

Même si on anticipe une pénurie de main-d'oeuvre dans cette industrie, Jacques Topping demeure optimiste. Selon lui, il faut miser sur nos forces de création et d'innovation, revoir nos modèles d'affaires afin d'abandonner ce qui est répétitif pour ne conserver que les contenus originaux. Il est important de promouvoir les programmes des TIC auprès des jeunes et de concevoir des services aux entreprises qui exigent de l'encadrement parce que certains postes, dit-il, sont plus difficiles à délocaliser que d'autres. D'après M. Topping, l'industrie canadienne doit analyser le problème et imposer ses solutions plutôt que de se les faire imposer par l'économie indienne.