Milieux humides, sols contaminés, les promoteurs immobiliers doivent conjuguer avec de nouvelles contraintes environnementales. Comment y faire face sans perdre sa chemise ?

Milieux humides, sols contaminés, les promoteurs immobiliers doivent conjuguer avec de nouvelles contraintes environnementales. Comment y faire face sans perdre sa chemise ?

Avis aux promoteurs immobiliers: si vous planifiez l'achat d'un terrain ou la construction d'un immeuble, peut-être devriez-vous consulter un avocat en droit de l'environnement avant de vous engager.

La réglementation en matière de milieux humides et de sols contaminés est de plus en plus contraignante, et ne pas connaître les règles du jeu pourrait vous coûter une fortune.

«Et vous occasionner bien de la frustration», dit Me Mario Caron, avocat associé chez Ogilvy Renault, spécialiste en droit immobilier.

Parlez-en au quincailler RONA. L'été dernier, pour avoir construit sans permis un immense entrepôt en plein milieu humide, à Terrebonne, le détaillant s'est vu imposer une amende exemplaire de deux millions de dollars par le ministère de l'environnement du Québec. L'affaire s'est finalement réglée par une compensation de 300 000 $, ce qui constitue tout de même un record.

Les promoteurs immobiliers devraient pourtant savoir qu'il est interdit, depuis 1998, de construire en milieu humide (marais, marécages, étangs, tourbières, etc.) sans un certificat d'autorisation du ministère de l'environnement. Le problème?

Les démarches entourant les demandes d'autorisation est un véritable fouillis administratif. «Ça n'a pas d'allure!» dit Me Michel Yergeau, associé spécialisé en droit de l'environnement et président du conseil d'administration du cabinet Lavery de Billy, à Montréal.

Me Yergeau, qui représentait RONA dans son litige l'opposant au ministère de l'environnement, estime que les promoteurs immobiliers ne savent plus à quelle enseigne loger tellement le processus d'autorisation est flou et compliqué.

Le ministère avait pourtant indiqué son intention de dévoiler l'automne dernier une nouvelle politique pour leur faciliter la vie. «On attend toujours, pour l'instant on a que des textes parcellaires», dit Michel Yergeau.

Tout cela entraîne évidemment des délais qui empoisonnent la vie des promoteurs. Et bien que le ministère promette de traiter les demandes des projets de moyenne envergure en 75 jours, le temps de traitement est souvent bien plus long. «Jusqu'à cinq mois!» dit Michel Yergeau.

Aucun doute, le ministère de l'environnement doit jouer son rôle de chien de garde, soutient Maître Yergeau, mais il ne peut non plus nier les réalités économique et financière du marché immobilier. «Lorsqu'un projet a un échéancier de 15 mois, et qu'il en faut cinq juste pour le processus d'autorisation, il y a un problème», dit-il.

Cela dit, le ministère de l'environnement a récemment dévoilé une nouvelle directive concernant les milieux humides de moins de 0,5 hectares. Ainsi, dans les cas de ces petits projets, il ne sera plus nécessaire d'obtenir un certificat; une simple déclaration du promoteur suffira.

«La déclaration devra toutefois être appuyée d'un rapport d'un biologiste», explique Me Jean Piette, avocat associé principal chez Ogilvy Renault, spécialiste en droit de l'environnement.

Sols contaminés

Les règles du jeu sont beaucoup plus claires concernant les sols contaminés. Depuis 2003, les promoteurs doivent vérifier la contamination des terrains avant d'entamer un projet de construction. Ils doivent entre autres effectuer une étude de caractérisation pour s'assurer de la qualité du sol, alors qu'auparavant ils pouvaient à peu près ce qu'ils voulaient. « Ça plus coûte cher mais ou moins c'est clair », dit Maître Jean Piette.

Depuis le 15 février, une nouvelle règle est aussi en vigueur concernant la façon de décontaminer les sols. Ainsi, il ne sera plus possible de mélanger des sols avec divers niveaux de contamination afin que le produit de ce mélange puisse aller dans des lieux faciles d'accès. On ne pourra plus non plus tamiser les sols pour relâcher dans l'atmosphère des contaminants volatils, ce qui permettait de réduire la contamination de sols. En bout de ligne, ça coutera plus cher..

Conseils pratiques

Si vous êtes un promoteur immobilier, voici deux conseils à suivre avant de vous lancer dans un projet de construction:

1) Consultez des spécialistes. Avocat en droit de l'environnement, biologiste, spécialiste en environnement, avant de faire quoi que soit, consultez ces professionnels. «Cela vous évitera bien des ennuis», dit Maître Jean Piette.

2) Mieux vaut prévenir que guérir. Que vous songiez à acquérir ou à vendre un terrain, ou encore si vous avez un projet de construction quelconque, vous devriez vous préoccuper des contraintes environnementales avant de prendre votre décision. Car les conséquences financières peuvent être catastrophiques.