Des actionnaires trompés par une société qui a maquillé ses comptes peuvent-ils réclamer des dommages aux tiers qui ont permis la tromperie ?

Des actionnaires trompés par une société qui a maquillé ses comptes peuvent-ils réclamer des dommages aux tiers qui ont permis la tromperie ?

La Cour suprême américaine a commencé à examiner mardi cette question sensible pour le monde des affaires américains.

Même si elle concerne une fraude moins retentissante, cette affaire pourrait par exemple permettre aux anciens actionnaires d'Enron de réclamer des milliards de dollars non plus seulement à la société qui a connu la plus retentissante faillite des États-Unis, mais aux banques, cabinets d'avocats ou de comptables qui ont travaillé avec elle.

En 2000, Charter, un câblo-opérateur coté à la bourse de New York, a tenté de relancer artificiellement son chiffre d'affaires en payant certains de ses fournisseurs, notamment Motorola et Scientific-Atlanta, plus cher que prévu pour qu'ils lui reversent la différence sous forme de contrats publicitaires.

Lorsque la combine a été révélée deux ans plus tard, le cours de Charter s'est effondré. Des investisseurs ont alors entamé des poursuites au civil pour obtenir réparation de la tromperie auprès des fournisseurs. Mais la démarche n'a pas convaincu les juges, ni en première instance ni en appel.

Les deux fournisseurs «n'ont pas publié les fausses déclarations sur lesquelles les investisseurs se sont appuyés, et ils n'avaient aucune obligation d'informer les investisseurs de Charter et les experts de la véritable condition financière de Charter», a ainsi expliqué la cour d'appel fédérale de Saint Louis (Missouri, centre).

Les tiers impliqués dans des maquillages de comptes peuvent être poursuivis au pénal pour complicité, mais ils ne sont jusqu'à présent redevables au civil que lorsqu'ils peuvent être considérés comme appartenant au premier cercle des responsabilités.

La Cour, dont la décision n'est pas attendue avant des mois, devrait définir les limites de ce cercle. Le gouvernement a réclamé le maintien du statu quo, mais l'autorité de surveillance des marchés boursiers américains, la SEC, penche plutôt en faveur de l'ouverture de ce nouveau type de recours.