À 27 ans, Line Bolduc n'en pouvait plus. Ses longues heures de travail en tant que diététicienne et enseignante l'épuisaient. Plus rien ne la motivait, si bien qu'elle a sombré dans un burn-out.

À 27 ans, Line Bolduc n'en pouvait plus. Ses longues heures de travail en tant que diététicienne et enseignante l'épuisaient. Plus rien ne la motivait, si bien qu'elle a sombré dans un burn-out.

Avec beaucoup d'efforts, elle est parvenue à se sortir de cette crise. Sitôt rétablie, elle a décidé d'aider les travailleurs québécois à ne pas vivre pareille situation. Selon elle, la solution pour prévenir l'épuisement professionnel est bien simple: il faut rire.

" Le rire est le meilleur moyen de dédramatiser le quotidien et d'éviter le burn-out ", croit Line Bolduc. Après avoir suivi une formation à l'École nationale de l'humour, elle a créé des ateliers de rigolothérapie, où les gens apprennent les bienfaits théoriques du rire, en plus de participer à des séances pratiques.

Très vite, ces formations ont connu un grand succès. Aujourd'hui, des ministères, des écoles, des entreprises et même le Bureau du coroner du Québec suivent régulièrement des ateliers de rigolothérapie.

Selon Mme Bolduc, ces cours sont en demande parce que les gens ne savent plus rire. " En 1939, on rigolait en moyenne 19 minutes par jour. Aujourd'hui, c'est moins de deux minutes par jour ", déplore-t-elle en se basant sur certaines études qu'elle a en main.

Plusieurs études scientifiques ont d'ailleurs analysé les bienfaits physiques d'une bonne rigolade. La principale caractéristique est qu'un humain qui s'esclaffe sécrète de l'endorphine, une hormone qui procure un sentiment de bien-être. " Une minute de rire donne 45 minutes de bien-être ", assure Paule Desgagnés, qui offre elle aussi des ateliers de rigolothérapie dans des entreprises et des écoles du Québec depuis 15 ans.

Le rire permet aussi de faciliter la communication, de limiter les inhibitions, de favoriser la confiance en soi et, surtout, de réduire le stress. " Il y a 40 ans, les humains ne faisaient face qu'à quatre situations de stress par semaine."

Aujourd'hui, c'est au moins 50 par jour! Pour passer au travers de ces épreuves, il faut rire. Cela nous apprend à mieux gérer nos angoisses ", croit Line Bolduc.

Avoir des employés moins stressés est d'ailleurs profitable pour les entreprises. " Quelqu'un qui n'est pas tendu travaille avec plus de plaisir et est plus productif. Donner des formations techniques très avancées à ses employés est inutile. Ils ne seront pas meilleures s'ils sont stressés et démotivés ", ajoute Mme Bolduc.

Luc Brunet avertit toutefois que le rire ne garantit pas la performance des travailleurs. " C'est sûr que rigoler au boulot est agréable, mais si les conditions de travail sont affreuses, les employés ne riront pas. Le rire ne peut pas améliorer une organisation dysfonctionnelle ", dit-il.

Paule Desgagnés précise que si le rire ne peut pas régler un problème, il permet de prendre du recul. " Les gens vont dédramatiser la situation, ce qui est bon en soi " explique-t-elle.

Les entreprises québécoises engagent de plus en plus de spécialistes du rire ou d'humoristes pour donner des conférences. Luc Brunet met cependant les compagnies en garde. " Ces séances peuvent être mal perçues par les employés. Certains m'ont déjà dit qu'ils déploraient le fait que leurs boss gaspillaient l'argent de la compagnie pour les faire rire alors qu'ils demandaient des chaises confortables depuis des mois ", relate le psychologue.

Encourager le rire au travail doit aussi se faire dans une ambiance constructive, précise M. Brunet. " Il ne faut pas que les blagues deviennent des insultes déguisées ou un outil pour faire passer des messages ", dit-il.

À Juste pour rire, l'humour fait partie du quotidien des employés et la majorité apprécie grandement cette ambiance. " Pouvoir rire au travail détend l'atmosphère. Cela permet aussi de voir que ton patron est humain ", dit Sébastien Langlois, agent de diffusion à Juste pour rire. Encore une fois, Luc Brunet met en garde les employeurs qui seraient trop prompts à rire de tout et de rien. " Un employeur qui rigole trop souvent peut risquer de perdre sa crédibilité. Il y a des moments pour être sérieux, et d'autres pour faire de rire ", dit-il.

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