Bell Helicopter Textron Canada et son principal adversaire, Eurocopter, s'affrontent sur plusieurs fronts, comme la performance et le prix. Mais un autre champ de bataille prend de plus en plus d'importance : le bruit.

Bell Helicopter Textron Canada et son principal adversaire, Eurocopter, s'affrontent sur plusieurs fronts, comme la performance et le prix. Mais un autre champ de bataille prend de plus en plus d'importance : le bruit.

" Si nous pouvons arriver avec un hélicoptère plus silencieux que le concurrent, nous allons faire du tapage avec ça pour aller chercher des clients, déclare le directeur du développement des affaires chez Bell Helicopter Textron Canada, Michel Legault. Moins de bruit, c'est un avantage, comme un prix inférieur ou des performances supérieures. "

Le bruit est un enjeu particulièrement important pour ceux qui exploitent des hélicoptères en zone urbaine. " Les corps policiers insistent beaucoup pour avoir les hélicoptères le moins bruyants possible parce que ça a un impact sur les populations ", souligne M. Legault. Les constructeurs d'hélicoptères prennent la chose au sérieux.

En Europe, Eurocopter et AgustaWestland collaborent tous deux à un projet de recherche et développement financé par le gouvernement européen, Friendcopter, visant à créer un hélicoptère moins bruyant.

La signature sonore

L'objectif est notamment de réduire de 30 à 50 % la signature sonore (le périmètre touché par le bruit). On teste notamment les effets d'une plus basse vitesse de descente sur la signature sonore. Les chercheurs étudient également l'ajout de mousse aux pièces du moteur pour assourdir le bruit.

Michel Legault affirme que Bell Helicopter n'est pas en reste. Le nouveau Bell 429, un appareil qui n'a pas encore effectué son premier vol mais qui fait déjà l'objet de plus d'une centaine de commandes, profite déjà d'avancées technologiques réalisées dans le cadre du projet MAPL (Modular Affordable Product Line), un projet de recherche et développement de 700 millions qui a bénéficié d'un prêt remboursable de 230 millions partagé également par les gouvernements du Québec et du Canada.

"Nous avons fait volé des composants du 429 sur un modèle existant, indique M. Legault. Nous n'avons pas encore fait de mesures scientifiques rigoureuses, mais nous savons déjà que le bruit a été diminué."

Il s'attend toutefois à ce que la bataille pour rendre les hélicoptères plus silencieux se poursuive sans cesse.

"Le 429, c'est un bon pas vers l'avant, mais d'ici 10 à 15 ans, il y aura d'autres choses que nous continuerons à regarder."

Le bruit des hélicoptères origine de trois sources principales: le rotor principal, le rotor de queue et le moteur.

"Le rotor de queue et le moteur, ce sont les deux parties les plus prometteuses pour réduire la signature sonore", affirme M. Legault.

On peut éliminer carrément le rotor de queue et le remplacer par une sorte de ventilateur qui souffle de l'air soit en grand volume, soit à grande vitesse, pour stabiliser l'hélicoptère. Un tel ventilateur, utilisé à l'heure actuelle par le manufacturier américain MD Helicopter, a également l'avantage d'être moins dangereux qu'un rotor pour les pilotes ou les passagers distraits.

Bell Helicopter avait participé au développement de ce ventilateur avec MD Helicopter. Le manufacturier de Mirabel avait cependant décidé d'écarter temporairement cette solution en raison de ses désavantages.

"Il est moins efficace en haute altitude et il consomme beaucoup d'énergie, fait savoir M. Legault. Mais nous essayons de l'améliorer encore plus, d'aller plus loin, d'enlever les désavantages et de garder les avantages."

En ce qui concerne le moteur, Bell envoie la balle dans le camp des motoristes.

"Nous exigeons d'eux qu'ils fassent un effort supplémentaire", déclare M. Legault.

Pratt & Whitney Canada (P&WC), qui fabrique notamment les moteurs du Bell 429, est dans le coup. Mercredi dernier, le motoriste de Longueuil a lancé un énorme programme de 1,5 milliard de dollars visant à développer des moteurs d'avions et d'hélicoptères qui consomment moins, qui produisent moins d'émission polluantes et qui soient moins bruyants. Le gouvernement fédéral a accordé un prêt remboursable de 350 millions à P&WC pour mener à bien ce programme de cinq ans.

"Dans les centres urbains, les contraintes en terme de bruit sont de plus en plus grandes et les standards augmentent rapidement, fait savoir le président de P&WC, Alain Bellemare. Il est de plus en plus important de s'attaquer à cela."

Il y a également du travail à accomplir du côté du rotor principal, surtout au niveau des bouts de pales.

"Le bout de la pale tourne à une vitesse presque supersonique, soit à Mach 0.95, explique M. Legault. Ça génère une onde de choc qui fait du bruit. Il y a beaucoup de doctorats qui s'écrivent à trouver de nouveaux bouts de pales qui font moins de bruit."

Mais voilà, ces bouts de pale moins bruyants offrent parfois plus de résistance à l'air, ou sont plus complexes à fabriquer.

"Avec le 429, nous avons réussi à apporter des changements aux bouts de pales pour qu'ils soient encore faciles à fabriquer tout en réduisant le bruit", fait valoir M. Legault.

DEUX JOUEURSLe marché des hélicoptères commerciaux est dominé par deux grands joueurs, Bell et Eurocopter, qui détiennent chacun une part de marché de 40 %. Les trois autres joueurs, AgustaWestland, Sikorsky et MD Helicopter, occupent le reste du terrain.

Pour Bell, l'adversaire principal, c'est Eurocopter.

"Chaque année, celui qui dépasse l'autre d'un petit bout de nez s'en vante, raconte M. Legault. L'année dernière, nous avons vendu un hélicoptère de plus qu'eux, nous nous en sommes vantés. L'année d'avant, c'était eux. C'est un peu comme GM et Ford dans l'automobile."