Les pétrolières canadiennes exploitant les sables bitumineux du nord de l'Alberta attisent les convoitises des géants mondiaux du secteur qui lorgnent une part du gâteau dans cette réserve d'or noir, la première de la planète hors de l'instable Moyen-Orient.

Les pétrolières canadiennes exploitant les sables bitumineux du nord de l'Alberta attisent les convoitises des géants mondiaux du secteur qui lorgnent une part du gâteau dans cette réserve d'or noir, la première de la planète hors de l'instable Moyen-Orient.

Après la vague d'acquisitions de joyaux miniers canadiens, comme Inco et Falconbridge et peut-être prochainement Alcan [[|ticker sym='T.AL'|]], le Canada risque de voir certains de ses acteurs-clé du secteur de l'énergie passer aux mains de groupes étrangers.

Les sables bitumineux de l'Alberta contiennent des réserves exploitables de 173 milliards de barils, ce qui place la province de l'ouest canadien au deuxième rang mondial derrière l'Arabie saoudite, mais cette position pourrait «mener à d'importants achats de groupes canadiens», estime la banque CIBC.

«Je pense que le secteur des sables bitumineux est mûr pour une vague d'acquisitions. Il y a là des actifs qui attirent l'attention des acteurs mondiaux de l'industrie», explique Mark Friesen, analyste du secteur chez FirstEnergy Capital, en Alberta.

Depuis que le baril a franchi la barre des 50 $ US, il y a deux ans, d'importants groupes pétroliers convoitent les sables bitumineux canadiens, mais l'exploitation du lourd pétrole non conventionnel qu'ils renferment nécessite des montagnes de capitaux.

Le français Total a ouvert le bal en faisant l'acquisition de Deer Creek pour 1,4 G$ en septembre 2005. Shell Canada a suivi ce printemps en rachetant Blackrock pour 2,6 G$ US, avant que la maison mère ne reprenne le contrôle total de sa filiale cette année.

Le groupe norvégien Statoil a déposé à la fin d'avril une offre amicale de 2 G$ US pour s'emparer d'un autre canadien, North American Oil Sands Corporation (NAOSC), dont les concessions renferment plus de deux milliards de barils.

«Il est possible que l'on voit encore plus d'opérations de ce genre. Des groupes déjà présents tenteront peut-être d'augmenter leur part», estime M. Friesen.

Selon plusieurs analystes, l'accès à ce juteux marché ne passe pas par l'achat de joueurs déjà bien implantés comme Suncor, dont le chiffre d'affaires annuel dépasse les 15 milliards de dollars, mais plutôt par de plus petits groupes comme UTS Energy, Canadian Oil Sands, Opti Canada ou Western Oil Sands

Ce dernier fait d'ailleurs l'objet de rumeurs d'achat par Total, qui est convaincu que l'avenir des sables bitumineux appartient aux majors internationaux en raison notamment des coûts d'exploitation.

«Quand vous examinez les difficultés de développer ces projets-là, c'est clair que les compagnies les mieux adaptées pour le faire, ce sont les grosses pétrolières», dit le président de Total Canada, Michael Borrell, dans un entretien sur le site de Joslyn, à 60 kilomètres au nord de Fort McMurray.

Les sables bitumineux sont exploités à partir d'une mine à ciel ouvert lorsque les réserves sont en surface à moins de 80 mètres de profondeur ou in situ, via l'injection de vapeur dans le sol, quand le précieux composé est enfoui plus profondément.

Par la suite, le bitume doit être isolé et amélioré, en y ajoutant de l'hydrogène ou en y retirant du carbone afin d'obtenir un pétrole dit synthétique qui pourra être raffiné.

«Le rendement de ces opérations se situe sur le long terme. Les compagnies qui n'ont que cela comme actifs financeront difficilement un développement de cette taille-là», pense M. Borrell.

Total Canada prévoit d'investir entre «10 et 15 milliards» au cours de la prochaine décennie afin de porter sa production autour de «250 000, 300 000 barils par jour», dont un large partie du pétrole synthétique issue de mines.