Ce ne sera pas la catastrophe, prédit le Conference Board, à propos de l'impact canadien de la crise du crédit aux États-Unis. N'empêche, des secteurs écoperont: bois, automobile, tourisme. Et le CN, qui transporte les biens d'un côté à l'autre de la frontière, se prépare au pire.

Ce ne sera pas la catastrophe, prédit le Conference Board, à propos de l'impact canadien de la crise du crédit aux États-Unis. N'empêche, des secteurs écoperont: bois, automobile, tourisme. Et le CN, qui transporte les biens d'un côté à l'autre de la frontière, se prépare au pire.

La crise de l'habitation aux États-Unis affaiblira l'économie canadienne, mais pas au point de la ravager. Au sud de la frontière, le resserrement des conditions du crédit par suite de la crise des hypothèques à risque (subprimes) a gonflé les stocks de maisons neuves invendues entraînant la chute du prix des habitations.

Il faudra compter au moins jusqu'au second semestre de l'an prochain avant un retour à la normale. Cela va réduire considérablement la demande de bois d'oeuvre des scieries québécoises et de Colombie-Britannique.

Le Conference Board du Canada croit en outre que la consommation des ménages américains s'en trouvera ralentie, ce qui est de fort mauvais augure pour l'industrie automobile ontarienne dont le gros de la production prend le chemin du Sud.

Déjà appauvris, les Américains jugeront de plus en plus chères des vacances septentrionales où leur pouvoir d'achat s'est au surplus très écorné depuis 2003 avec la dépréciation du billet vert.

Cela dit, «l'économie canadienne dans son ensemble devrait traverser sans dommages sérieux la crise des hypothèques à risque américaine, croit Kip Beckman, associé principal à la recherche au Conference Board du Canada. Cette perspective repose toutefois sur l'hypothèse que l'économie américaine ne tombe pas en récession d'ici la fin de 2008».

Le Board évolue à 40% la probabilité d'une récession aux États-Unis. Chez nous, la croissance reste stimulée par la demande intérieure. De 2,8% l'an dernier, l'expansion est toujours au rendez-vous, mais devrait ralentir à 2,6% cette année (surtout à cause d'un faible deuxième semestre) et à 2,3% l'an prochain, selon Banque TD Groupe financier.

Plus optimiste que le Board, l'institution de la Ville reine estime à une chance sur trois seulement la probabilité d'une récession aux États-Unis.

Plus la crise de l'habitation mettra du temps à se résorber et plus se concrétisera la possibilité d'une récession.

Cela dit, l'économie canadienne paraît bien prémunie.

«Grâce à ses fondamentaux économiques, le Canada n'a jamais été si bien placé pour surmonter les obstacles économiques auxquels il pourrait être confronté», juge Craig Alexander, économiste en chef adjoint de Banque TD.

Le marché canadien de l'habitation reste robuste. Après huit mois cette année, le nombre de permis résidentiels de bâtir progressait de 2,5%, tandis qu'il a reculé de 24,9% aux États-Unis sur la période janvier à août 2006, nous apprenait hier Statistique Canada.

Il n'y a donc pas que le prix des maisons neuves qui augmente de ce côté-ci de la frontière, mais leur nombre aussi.

L'autre grande différence, c'est la proportion marginale d'hypothèques à risque sur le marché. Bien sûr, on connaît les déboires de Xceed, cette société non bancaire qui s'est illustrée dans l'Ouest dans ce créneau de marché où s'est concentrée une clientèle de travailleurs autonomes et d'immigrants nouveaux qui ne satisfaisaient pas les critères des prêteurs traditionnels, les banques et les caisses populaires en particulier.

En tout, les prêts à risque représentaient 5% environ du total des hypothèques consenties l'an dernier. Ce n'est rien comparativement à de ce qui s'est passé aux États-Unis où plus du quart des nouvelles hypothèques étaient de type subprime.

L'économie canadienne paraît immunisée d'une autre manière, note le Board qui cite la firme Moody's. Ses institutions détiennent 8,4 milliards d'obligations américaines adossées sur des hypothèques (Mortgage Backed Securities, MBS).

À première vue, c'est beaucoup. Cela correspond en fait à seulement 2,2% de leurs titres américains. En comparaison, les MBS représentent 4,5% des titres américains détenus par les Irlandais, 7% par les Britanniques et 9,6% par les Néerlandais. Certains paradis fiscaux sont très exposés: les institutions de l'île de Jersey y ont placé 41,4% de leurs oeufs américains.

Le gros des actifs américains détenus par les institutions canadiennes sont en fait des Bons du Trésor, moins rentables certes, mais surtout moins risqués.

«Cela ne signifie pas que notre secteur financier ne sera pas contaminé», prévient le Board qui rappelle que la Caisse de dépôt et placement a dû rassurer les investisseurs au cours des dernières années.

La Banque Nationale a aussi jugé prudent de racheter 2 milliards de papier commercial adossé à des actifs pour éviter la saignée des comptes de sa clientèle au détail et de celle de ses filiales.

Cela dit, les conditions de crédit au Canada n'ont pas besoin d'un resserrement aussi prononcé qu'aux États-Unis. Les prêteurs n'ont pas fait preuve d'autant de laxisme qu'au sud de la frontière.