Pour le troisième mois d'affilée, les usines canadiennes ont diminué la valeur de leur production en octobre. À 47,3 milliards de dollars, c'est la plus faible en deux ans.

Pour le troisième mois d'affilée, les usines canadiennes ont diminué la valeur de leur production en octobre. À 47,3 milliards de dollars, c'est la plus faible en deux ans.

Ce nouveau repli de 0,1%, qui fait suite à une chute de 3,2% en septembre, était attendu des experts qui se montraient plus pessimistes encore, compte tenu des difficultés du secteur automobile.

En l'excluant d'ailleurs, la valeur des autres livraisons manufacturières a progressé de 0,1%.

Les données de Statistique Canada exprimées en volume pour effacer l'effet des prix les ont plutôt confortés dans leurs sombres pressentiments. Le repli atteint 0,6% et la production est revenue au niveau de décembre 2002, soit avant le début de l'appréciation rapide du dollar canadien.

Depuis un an, le volume des expéditions accuse un repli de 1,5%. «Récemment, la tendance s'est aggravée, observe Carolyn Kwan, économiste chez Scotia Capitaux. Sur une base annualisée, le recul des trois derniers mois est de l'ordre de 6,5%.»

Cela présage de nouvelles rationalisations en usine qui viendront gonfler encore la colonne des quelque 69 400 suppressions d'emplois depuis le début de l'année.

Les données publiées hier (jeudi) indiquent en outre que le niveau des stocks a grimpé pour la quatrième fois d'affilée. Le rapport des stocks aux livraisons, qui mesure le temps qu'il faudrait pour épuiser les stocks au rythme actuel des livraisons, est à son niveau le plus élevé depuis août 2003.

«Une bonne partie des prochaines livraisons va venir des stocks plutôt que de production nouvelle», souligne Marc Lévesque, stratège, marchés fixes chez TD Valeurs mobilières.

Les sous-secteurs de la fabrication canadienne vivent des situations bien différentes. Le poids de l'automobile colore beaucoup le tableau d'ensemble. En fait, 10 des 21 sous-secteurs ont amélioré leur situation et autant l'ont empiré au cours du mois.

Le matériel de transport a poursuivi le repli amorcé en juillet, plombé de nouveau par le secteur automobile qui affichait le plus faible niveau en trois ans. Mince consolation, ce dernier recul s'explique en grande partie par le retard des constructeurs à livrer leurs modèles 2007.

L'aérospatiale a aussi perdu de l'altitude après sa poussée de septembre. Il s'agit d'une industrie dont la valeur des livraisons peut varier beaucoup de mois en mois. Depuis le début de l'année, elle est toutefois légèrement à la baisse.

Les livraisons de machine, qui avaient connu un creux en septembre, ont rebondi de 8,6% tandis que celles des métaux de base ont atteint un sommet de 1,8 milliard grâce à des prix très élevés.

Voilà pourquoi le Québec est parvenu à tirer son épingle du jeu malgré le marasme d'ensemble. La valeur de ses livraisons a progressé de 1,2%, à 11,9 milliards.

En fait, sept provinces sur 10 ont amélioré leur sort. Les livraisons albertaines ont souffert de la chute des prix du pétrole, celles de l'Ontario de la restructuration du secteur automobile.

À l'échelle du pays, il y avait quelques semblants de bonnes nouvelles. La valeur des nouvelles commandes a légèrement progressé par rapport à septembre, grâce au bond de la demande d'ordinateurs, de machines et de métaux. Elle reste néanmoins la deuxième plus faible depuis un an.

La valeur des commandes en carnet a aussi modestement augmenté, malgré la chute de 633 millions des commandes d'autos. Il s'agit du piqué le plus prononcé à ce jour.

Les manufacturiers éprouvent beaucoup de difficultés à s'ajuster à un environnement hostile créé par la poussée du huard, la concurrence des économies émergentes et la flambée des prix des produits de base.

«Par bonheur, le huard a cessé de monter, les prix de l'énergie ne sont plus stratosphériques, ce qui crée moins de pression sur les coûts de production, note David Tulk, économiste à Banque TD Groupe financier. La lumière au bout du tunnel va briller avec la relance de l'économie américaine au deuxième semestre de 2007. Reste à savoir jusqu'où les choses vont empirer, d'ici là.»