Les mannequins de La Senza (T.LSZ) défileront en charmante compagnie.
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Hier (mercredi), le détaillant de lingerie fine de Dorval est passé aux mains du géant américain Limited Brands, connu mondialement pour sa marque Victoria's Secret.
Limited Brands a offert 710 M$ pour les actions de La Senza.
La société de Columbus, en Ohio, ne reluque pas seulement les soutiens-gorge et les autres produits de lingerie fine de La Senza. Elle a surtout l'oeil sur son expertise internationale.
En plus de ses 318 magasins au Canada, La Senza exploite 327 boutiques dans 34 autres pays.
Limited Brands possède un réseau cinq fois plus important avec 3534 magasins, mais ceux-ci sont tous situés aux États-Unis.
«Les dirigeants de Limited Brands prétendent vouloir apprendre de nous. Nous apprendrons également d'eux », dit Irving Teitelbaum, président du conseil et chef de la direction de La Senza, qui s'est prononcé en faveur de la transaction.
Après La Compagnie de la Baie d'Hudson et Domtar, une autre entreprise canadienne passe aux mains des Américains en 2006.
Limited Brands a toutefois annoncé son intention de ne pas réduire les activités de La Senza, dont la haute direction reste en place.
«Limited Brands aime le potentiel de croissance de La Senza et veut profiter de son expertise internationale, croit l'analyste Neil Linsdell, de la firme Versant Partners, à Montréal. Alors que tout le monde croyait que Victoria's Secret voulait débarquer au Canada, voilà que Limited Brands fait une gentille offre d'achat.»
En 2003, La Senza ouvre cinq boutiques aux États-Unis, fief de Limited Brands. «Si tout fonctionne comme prévu, le monde sera à nous», dit alors M. Teitelbaum.
Deux ans plus tard, La Senza s'incline devant le géant américain et rentre chez elle.
L'entreprise fondée à Sherbrooke en 1966 sous la bannière Suzy Shier n'est pas habituée aux échecs.
Mais La Senza a mal évalué la puissance de son concurrent américain, qu'elle considère comme un modèle.
«J'admire le succès de cette entreprise. C'est une compagnie qui m'intéresse», déclare le PDG Laurence Lewin en 2004.
Sa stratégie de marketing sexy et provocatrice, qui s'inspire des campagnes publicitaires de Victoria's Secret, vaut à La Senza des critiques au Canada.
En novembre 2004, un journal torontois découvre qu'un employé de La Senza a téléphoné directement à une fillette de 9 ans afin de l'inviter à une «fête de magasinage» destinée à vendre des sous-vêtements au rabais à des clientes de 7 à 12 ans.
Limited Brands se lasse finalement des similitudes entre la lingerie de La Senza et celle de sa marque vedette.
La société américaine a recours aux tribunaux à deux reprises afin de faire retirer du marché un soutien-gorge de son concurrent, qui aurait copié l'un des modèles Victoria's Secret.
À chaque fois, les tribunaux jugent que La Senza n'a rien à se reprocher.
Au printemps dernier, les deux sociétés commencent dans le plus grand secret des discussions d'affaires qui ont mené à l'offre d'achat annoncée hier, après la fermeture des marchés boursiers.
Les milieux financiers ont été pris par surprise. «C'est une transaction très intéressante, dit l'analyste Sarah Alemao, de la firme Northern Securities, au Wisconsin. C'est la première fois que Limited Brands acquiert des magasins à l'extérieur des États-Unis.»
L'offre d'achat de 48,25$ par action constitue une prime de 47,5 % par rapport au prix de l'action mercredi à la fermeture de la Bourse de Toronto (32,70 $). Un prix élevé mais justifié, selon l'analyste Sarah Alemao.
«La Senza est une excellente marque avec une possibilité de croissance, dit-elle. C'est aussi un acteur majeur dans un marché, le Canada, où Limited Brands n'est pas implanté. Limited Brands a offert un bon prix. Ses actionnaires doivent se réjouir de l'acquisition de La Senza.»
La transaction nécessite l'approbation des deux tiers des actionnaires de La Senza.
Les trois principaux actionnaires, les fondateurs Irving Teitelbaum et Stephen Gross ainsi que le PDG Laurence Lewin, se sont prononcés en faveur de la transaction. Ils détiennent 48% des actions.