L'an dernier, le déficit commercial s'est aggravé au point de frôler les 10 milliards de dollars. Il faut remonter à la récession de 1991 pour retrouver un chiffre presque aussi mauvais, soit 8,6 milliards.

L'an dernier, le déficit commercial s'est aggravé au point de frôler les 10 milliards de dollars. Il faut remonter à la récession de 1991 pour retrouver un chiffre presque aussi mauvais, soit 8,6 milliards.

Les données en dollars constants de l'Institut de la statistique du Québec (ISQ) font état d'exportations internationales de 70,5 milliards sur une base douanière pour 2006 soit une mince amélioration de 0,5% par rapport à l'année précédente. En contrepartie, les importations ont bondi de 4,7% pour atteindre 80,4 milliards.

Ce déficit de tout près de 10 milliards s'est matérialisé au cours d'une année où l'économie américaine a progressé de 3,3% et où l'économie mondiale est en plein essor. Le creux de 1991 avait été réalisé en pleine récession des deux côtés de la frontière.

Les données réelles, qui éliminent les distorsions créées par la province d'entrée ou de sortie d'une marchandise selon la mesure sur une base douanière, seront connues un peu plus tard. Celles publiées hier reflètent quand même la tendance à une nette détérioration observée depuis cinq ans.

En 2001, le surplus des échanges internationaux du Québec atteint le sommet de 9,1 milliards. L'année suivante, GM ferme son usine à Boisbriand, privant du coup le Québec d'exportations de près d'un milliard, bon an mal an. Puis, à compter de 2003, c'est l'envolée du huard qui freine les exportations du Québec tout en rendant plus accessibles à ses citoyens quantités de biens importés.

Dès 2004, le surplus québécois fait place au déficit.

L'aluminium

L'an dernier, l'aluminium a détrôné les avions comme champion des exportations québécoises. Les ordinateurs et les automobiles sont en tête des biens importés.

Les Québécois en ont acheté pour trois milliards de plus qu'en 2005. «On s'attendait à ces mauvais chiffres, affirme Hélène Bégin, économiste chez Desjardins. En 2007, les exportations pourraient même reculer à cause du ralentissement américain.»

Si le sombre pronostic de l'institution lévisienne s'avère, alors les prévisions économiques du gouvernement du Québec sont en partie à risque. Dans son budget présenté il y a tout juste une semaine, le ministre Michel Audet comptait sur une progression de 0,9% des exportations en 2006 (la hausse aura été plus proche de 0,5%) et d'un rebond de 2,9% cette année et de 5,2% en 2008.

Cela lui permettait de viser une expansion réelle de l'économie de 1,8%. Desjardins fixe plutôt l'expansion économique à 1,1% et la Financière Banque Nationale (FBN) à 1,5%.

Plus le déficit commercial se creuse et plus il freine la croissance du Québec. Faute de faire progresser plus vite ses exportations internationales, le Québec a encore deux possibilités.

Il pourrait d'abord améliorer son solde commercial interprovincial. Depuis 2000, il est en déficit. L'an dernier, le manque à gagner avait atteint 3,4 milliards. Pour effacer la détérioration des échanges internationaux, il faudrait donc que le Québec ait ramené à équilibre ses échanges interprovinciaux. C'est hautement improbable.

Le Québec peut aussi ralentir le rythme de ses importations de manière à améliorer sa balance commerciale internationale. Cela voudrait dire cependant que ses citoyens consomment moins ou que ses entreprises renoncent à investir. Rien en somme pour stimuler la croissance.

«Au quatrième trimestre, on a assisté à un frein de la détérioration du commerce international du Québec. C'est une bonne nouvelle», nuance Marc Pinsonneault de la FBN.

Sans pêcher par excès d'optimisme, il note aussi que les entreprises ont l'intention d'investir davantage cette année. Selon l'enquête de Statistique Canada sur les intentions d'investissements publics et privés, la croissance des investissements privés (en excluant le logement) au Québec devrait atteindre 6,8%, contre 2,1% pour la moyenne canadienne.

L'an dernier, les entreprises avaient majoré la valeur de leurs investissements de moins de 2% sur ceux de 2005.

Même à 6,8%, la croissance des investissements privés sera encore deux fois moins rapide cette année que celle du secteur public (14,1% contre 9% en 2006).

«Même si ce n'est pas aussi élevé que dans le secteur public, je salue l'augmentation du secteur privé au Québec. C'est beaucoup mieux qu'en Ontario avec 2,1%», poursuit M. Pinsonneault.

La croissance des investissements du secteur privé au Québec sera concentrée dans le développement minier, l'immobilier non résidentiel, le secteur manufacturier et la forêt.

Les livraisons de trois de ces secteurs sont en bonne partie destinées à des marchés étrangers.

En conjuguant les investissements publics et privés, on en arrive à un bond de 9,6% sur 2006 alors que le ministre Audet a tablé sur un léger gain de 2,8%. Cela favorise la réalisation de son scénario.