En 2003, un membre du groupe Les Trois Accords chantait: «Saskatchewan, tu m'as pris ma femme...» Aujourd'hui, il faudrait ajouter que la Saskatchewan lui a aussi pris son frère, son cousin, sa nièce, son voisin...

En 2003, un membre du groupe Les Trois Accords chantait: «Saskatchewan, tu m'as pris ma femme...» Aujourd'hui, il faudrait ajouter que la Saskatchewan lui a aussi pris son frère, son cousin, sa nièce, son voisin...

Depuis la fin de 2006, la population de la Saskatchewan ne cesse d'augmenter, alors que la province voisine, la prospère Alberta, perd des joueurs.

Par conséquent, le prix des maisons bondit en Saskatchewan. Mais il faudra encore un bon moment avant qu'il ne rattrape le prix des maisons en Alberta.

L'économiste Robert Kavcic, de BMO Nesbitt Burns, attribue la soudaine popularité de la Saskatchewan à une forte croissance économique, mais aussi à l'augmentation des coûts de la vie en Alberta.

«C'est le facteur le plus important, déclare-t-il en entrevue téléphonique. L'année dernière, les coûts du logement ont augmenté de 50% en Alberta en une année. En Saskatchewan, nous en sommes encore à une fraction de ces coûts.»

La population de la Saskatchewan a passé le cap du million d'habitants au troisième trimestre de 2007 pour atteindre 1 003 300 habitants.

Il s'agit d'une augmentation de 6400 habitants, ou 0,65%, par rapport au deuxième trimestre. Statistique Canada a attribué les deux tiers de cette croissance à la migration interprovinciale.

«Les coûts de la vie à Edmonton, Calgary et Fort McMurray ont ramené plusieurs personnes de l'Alberta», commente Gary Tompkins, professeur d'économie à l'Université de Regina.

Selon Statistique Canada, l'Alberta a effectivement perdu 3300 habitants au troisième trimestre au profit des autres provinces canadiennes. Par comparaison, en 2006, l'Alberta gagnait en moyenne 12 800 nouveaux habitants en provenance des autres provinces par trimestre.

«La vitalité au niveau des ressources naturelles déborde de l'Alberta sur les provinces voisines, affirme Benoit P. Durocher, économiste chez Desjardins. La Saskatchewan en profite.»

Il fait observer que les grands gisements albertains de sables bitumineux se situent dans le nord-est de la province, soit à proximité de la Saskatchewan.

Robert Kavcic indique pour sa part qu'il se fait de plus en plus d'exploration pétrolière en Saskatchewan, surtout depuis la hausse des redevances décrétée par le gouvernement albertain.

La Saskatchewan bénéficie également des coûts élevés de l'uranium et d'un regain de l'agriculture.

«Il y a des secteurs qui n'avaient pas très bien faits en 2006, comme la potasse, indique M. Durocher. Ça a repris du mieux en 2007. Or, la Saskatchewan est très exposée à ce secteur.»

La province a également bénéficié de l'intérêt manifesté envers les énergies alternatives, comme l'éthanol.

Il y a donc de l'emploi en Saskatchewan. En novembre, la province pouvait se vanter d'avoir le deuxième plus bas taux de chômage au pays (4%) après l'Alberta (3,6%). La moyenne nationale s'établissait à 5,9%.

«La Saskatchewan aura eu la croissance économique la plus forte au pays en 2007, avec Terre-Neuve», soutient M. Kavcic.

Logement

Cette croissance a évidemment des impacts sur le prix du logement. À Regina et à Saskatoon, le prix moyen des bungalows a augmenté de plus de 50% au quatrième trimestre de 2007 par rapport à la même période de l'année précédente, selon une étude sur le prix des maisons publié par les Services immobiliers Royal LePage.

Le logement est cependant encore très abordable en Saskatchewan par rapport à la province voisine.

Dans le quartier le plus coûteux de Regina, le coût moyen d'un bungalow se situe à 232 600$, alors qu'il atteint 526 200$ dans le secteur équivalent de Calgary.

Le marché immobilier de l'Alberta commence à se refroidir: selon la Société canadienne d'hypothèques et de logement, les mises en chantier ont diminué de près de 21% en 2007 par rapport à l'année précédente dans la région métropolitaine de Calgary.

Par contre, les mises en chantier ont augmenté de près de 60% à Saskatoon et de près de 42% à Regina.

Gary Tompkins, de l'Université de Regina, note cependant que la croissance peut entraîner son lot de désagréments.

«C'est difficile pour les gens qui ne participent pas au boom économique, comme les personnes âgées et les étudiants, déclare-t-il. Il est plus difficile pour eux de trouver des logements abordables.»

Il ajoute qu'une bonne partie de l'essor économique se manifeste dans le nord de la province, qui compte peu de routes et de logements.

«C'est un défi, il faudra investir dans les infrastructures, déclare-t-il. L'Alberta a dû faire face à ce problème, c'est maintenant au tour de la Saskatchewan.»