La hausse des prix des aliments, depuis le yogourt aux États-Unis jusqu'au bifteck en Afrique du Sud, donne des maux de ventre aux responsables des plus puissantes banques centrales dans le monde.

La hausse des prix des aliments, depuis le yogourt aux États-Unis jusqu'au bifteck en Afrique du Sud, donne des maux de ventre aux responsables des plus puissantes banques centrales dans le monde.

La plus forte augmentation des prix des denrées alimentaires en au moins une décennie a déjà amené les autorités monétaires en Angleterre, au Mexique, au Chili, en Afrique du Sud et au Canada à majorer les taux d'intérêt pour éviter une surchauffe de l'inflation.

La situation provoque également des doutes quant à l'accent que met la Réserve fédérale américaine (Fed) sur l'inflation de base, qui exclut les aliments et l'énergie, de même que sur l'approche graduelle que privilégie la Chine pour resserrer le crédit.

Au moment où Ben S. Bernanke, président de la Fed, se prépare à livrer son rapport biannuel au Congrès cette semaine, les responsables des banques centrales dans le monde craignent que la hausse des prix ne provoque des inquiétudes chez les consommateurs à propos d'une poussée inflationniste.

Pour empêcher que cela se réalise, certaines des plus importantes économies pourraient devoir majorer de nouveau les taux d'intérêt.

«Les dirigeants des banques centrales sont plus conscients que jamais des dangers de donner libre cours aux attentes concernant l'inflation», avance Louis Crandall, économiste en chef de Wrightson ICAP, de Jersey City, au New Jersey, une division de ICAP, plus important courtier au monde pour les banques et les autres institutions dont les titres s'échangent sur les marchés financiers.

Une poussée sans précédent de la demande mondiale explique le bond de 23% des prix des aliments que le Fonds monétaire international (FMI) a constaté au cours des 18 derniers mois.

«Nous n'avons jamais rien vu de semblable», soutient Martin von Lampe, économiste spécialiste de l'agriculture de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE).

La demande, stimulée en partie par l'usage croissant de terres agricoles pour produire de l'éthanol et d'autres substituts du pétrole, pourrait faire en sorte que les prix demeurent élevés pendant des années.

Selon l'OCDE, la production d'éthanol à partir de maïs pourrait doubler aux États-Unis d'ici 2016 de même que la consommation d'oléagineux pour la fabrication de biocarburants en Europe.

La production d'éthanol en Chine et au Brésil va augmenter encore plus, soutenait l'OCDE dans un récent rapport.

La plus grande prospérité en Chine et dans d'autres pays émergents alimente aussi la demande, en particulier pour des articles à valeur ajoutée comme la viande et les produits laitiers, soulignait le rapport.

«Nous vivons des changements structuraux qui vont affecter les prix agricoles pendant de nombreuses années», avance Paul Polman, directeur financier de Nestlé, de Vevey, en Suisse, première société alimentaire au monde.

Les estimations du département américain de la Culture concernant les stocks mondiaux de céréales sont à leur plus bas niveau en 30 ans au chapitre des jours de consommation, précise Carl Weinberg, économiste en chef de High Frequency Economics, à Valhalla, dans l'État de New York.

«Les banques centrales doivent être très alertes et retenir les leçons du passé, comme ce qui est arrivé dans les années 70», soutient Jose Dario Uribe, directeur général de la Banque centrale de Colombie.

Ces années-là, les responsables de la politique monétaire avaient été lents à réagir à la hausse des prix du pétrole et des aliments. Il en est résulté une inflation moyenne de 7,1% aux États-Unis durant les années 70 comparativement à 2,75% jusqu'à présent au cours de la présente décennie.