La caisse de retraite des enseignants ontariens (Teachers) n'a pas à s'excuser pour son agressivité, elle compte travailler avec la direction de Bell Canada (T.BCE) pour redorer son blason mais elle n'entend pas participer à une surenchère avec Telus.

La caisse de retraite des enseignants ontariens (Teachers) n'a pas à s'excuser pour son agressivité, elle compte travailler avec la direction de Bell Canada [[|ticker sym='T.BCE'|]] pour redorer son blason mais elle n'entend pas participer à une surenchère avec Telus.

Voici ce qui ressort d'une entrevue éditoriale accordée jeudi matin à La Presse par Claude Lamoureux, président de Teachers, et Jim Leech, vice-président principal de Teachers Private Capital.

Après avoir annoncé une offre d'achat de 42,75 $ par action ou 52 G$ pour privatiser BCE, Teachers estime que le risque qu'elle prend permettra de donner une nouvelle vigueur à Bell et que les caisses canadiennes comme la sienne sont à l'avant-garde au niveau mondial.

«Normalement, dans les fonds privés, tout doit être vendu après 10 ans, dit M. Lamoureux. Nous, on peut garder une entreprise pendant 10, 15 ou 20 ans. Regardez les Pages Jaunes [[|ticker sym='T.YLO.UN'|]] et Shoppers Drug Mart [[|ticker sym='T.SC'|]]. Nous avons fait plus d'argent que nos partenaires car nous sommes restés plus longtemps. Nous possédions Bell en 1990 et nous la possédons encore.»

«Les déposants n'ont jamais eu de problème avec les gestes que nous posons, ajoute-t-il. Nous avons acheté Cadillac Fairview alors que nous avions moins d'argent. Nous disons à nos gens de prendre plus de risques, avec des portefeuilles plus concentrés.»

Un virage à 180 degrés ?

Les virages à 179 ou 180 degrés et déclarations contradictoires sur la réorganisation de Bell devraient être mis en perspective, selon M. Lamoureux.

«Quand on achète une compagnie, on ne fait pas des changements à court terme mais il y en aura à long terme, explique le président de Teachers sous le regard approbateur de Jim Leech. J'ai fait une farce quand je disais qu'on allait faire un virage à 179 degrés.»

Il reste à trouver la recette magique pour que le numéro un de la téléphonie au Canada devienne hyperconcurrentiel.

«Comme toute entreprise, tu essaies d'améliorer le service, d'avoir plus de clients et essentiellement de croître, résume M. Lamoureux. Tu n'achètes pas une compagnie comme Bell pour demeurer statique ou pour la regarder décliner.»

Apparemment, Michael Sabia a sa place sur l'échiquier pour l'instant et la direction aura de l'argent à investir dans l'entreprise.

«La première question que l'on pose aux gestionnaires, précise Claude Lamoureux, c'est combien d'investissement avez-vous besoin, jusqu'à quel point et à quelle vitesse ? Regardez ce que nous avons fait avec les Pages Jaunes. Il faut parler aux gestionnaires en place et les écouter. Habituellement, la solution est à l'intérieur de la compagnie.»

«Nous voulons un plan très précis, savoir combien investir et obtenir un rendement, martèle le grand patron de Teachers. Dépendamment du rendement, la rémunération des gestionnaires sera bonne ou moins bonne. Idéalement, le lien avec le rendement est une corrélation de 1 ! Quand un de nos placements privés ira mal, vous n'écrirez jamais sur la rémunération des gestionnaires. Si ça va mal, ils auront au moins amélioré leur CV !»

Notre interlocuteur estime que la privatisation est une clé importante pour ouvrir la porte du succès. «Nous n'avons pas à répondre à une équipe de journalistes ou d'analystes à tous les trimestres. Nous pouvons investir plus rapidement. Les chiffres sur les pertes et profits à court terme ne sont pas toujours beaux. Mais ça va rapporter à long terme. Nous voulons être le meilleur concurrent. Nous ne voulons pas être troisième.»

Reprendre le chemin du sans-fil

Au niveau des activités de Bell, Teachers critique surtout la place occupée dans le sans-fil.

«La chose qui nous bogue est peut-être que nous sommes le troisième joueur dans le sans-fil et il faut devenir premier, résume Jim Leech. C'est un secteur qui doit croître.»

«Il y a aussi Internet, qui deviendra sans fil à un moment donné, renchérit Claude Lamoureux. L'Amérique du Nord est en retard sur le reste du monde. Il faut se positionner dans ce domaine-là.»

Par contre, l'une des critiques les plus dures contre BCE s'avère justement son manque de compétitivité. M. Lamoureux rappelle que Teachers a déjà su régler des problèmes similaires ailleurs. «Les Pages Jaunes et Shoppers Drug Mart avaient de la difficulté à s'adapter», souligne-t-il.

Un autre problème se trouve dans le moral bas des employés chez BCE. Passeront-ils à la guillotine des compressions budgétaires ? «On espère que Bell aura plus de clients et de business, répond M. Lamoureux. C'est comme ça que les emplois sont créés.»

Une crise de confiance des troupes a quand même lieu. «L'état d'âme des employés, lance le patron de Teachers, c'est quelque chose que nous examinons toujours. À partir de là, un des objectifs est de s'assurer qu'ils se sentent bien chez Bell.»

Pas question de surenchère

Et si Telus [[|ticker sym='T.T'|]] fait une offre hostile pour acheter Bell, Teachers n'entend pas mettre plus d'argent sur la table. «Nous avons fait notre meilleure offre», lâche M. Lamoureux.

Le dirigeant sous-entend donc que la caisse de retraite se sauverait avec les quelques 800 M$ de frais de résiliation de son offre d'achat, une clause qui a déjà soulevé des questions.

«Ces frais ont leur place, justifie M. Lamoureux. Nous avons au-delà de 100 personnes qui travaillent sur une transaction comme celle-là. Je ne peux pas dire précisément combien ce travail coûte mais ceux qui veulent faire une transaction investissent énormément. Tu veux être compensé pour cela.»