Marc-Noël Ouellette doit remplacer la transmission de sa Volvo S60 2001. Il devra payer de sa poche, même s'il avait acheté une garantie prolongée.

Marc-Noël Ouellette doit remplacer la transmission de sa Volvo S60 2001. Il devra payer de sa poche, même s'il avait acheté une garantie prolongée.

Volvo lui a fait réaliser, trop tard, que son programme de protection accrue de 60 mois avait commencé à s'écouler avant qu'il achète le véhicule. En quelque sorte, on lui a vendu une garantie «rétroactive»...

Le 23 juillet 2002, M. Ouellette a acheté la voiture d'occasion chez Volvo de Laval. L'odomètre indiquait 37 500 kilomètres. M. Ouellette a cru bon de payer 1 954$ pour une protection accrue Volvo de cinq ans ou 160 000 kilomètres.

Dans la demande de contrat signée par M. Ouellette le jour de l'achat, il est écrit noir sur blanc que la garantie est de 60 mois. Mais dans le contrat final, posté quelques semaines plus tard, on précise que la garantie entre en vigueur à la date de mise en service du véhicule, le 1er avril 2001.

Bref, la garantie ne le couvre pas pour 60 mois, mais plutôt pour 44 mois! La date d'expiration tombe le 1er avril 2006, et non le 23 juillet 2007 comme le pense M. Ouellette.

Le 30 mars 2006, M. Ouellette se présente chez le concessionnaire pour une inspection de routine. Il précise au mécanicien que la transmission glisse parfois entre la troisième et la deuxième vitesse. D'ailleurs, l'ordinateur de bord indique un message à l'effet qu'il faut vérifier la transmission.

Mais le problème est intermittent, si bien que le mécanicien n'observe rien d'anormal. Il se contente d'effacer le message de l'ordinateur. M. Ouellette reprend le volant. Sa garantie vient à échéance dans deux jours. Mais il n'en sait rien. Et personne au garage n'a pris la peine de l'avertir.

En octobre, M. Ouellette retourne chez le concessionnaire car le problème perdure. On lui apprend alors que la transmission est à changer et que sa garantie est échue!

Correspondance pénible

M. Ouellette estime que Volvo a été malhonnête de le laisser repartir, sans investiguer davantage un problème majeur de transmission, sachant que sa garantie était sur le point expirer.

Dans une mise en demeure, M. Ouellette somme Volvo Canada et Volvo Laval de remplacer sa transmission, à leurs frais. C'est Automotive Protection Corporation (APCO), l'entreprise qui offre le programme de garantie, qui lui répond dans un français incompréhensible.

APCO refuse toujours de dédommager M. Ouellette, malgré les deux autres lettres, en anglais, qu'il a réécrites pour faire valoir ses droits.

«Je ne comprends pas pourquoi j'ai acheté chez Volvo Laval et je suis obligé de faire affaires avec une compagnie en Georgie», s'offusque M. Ouellette qui n'a jamais eu de réponse, ni de son concessionnaire, ni de Volvo Canada. «Ils s'en lavent les mains», dit-il.

D'ailleurs, Volvo a refusé de répondre aux questions de La Presse Affaires. «La Compagnie des Automobiles Volvo du Canada n'est pas en position de fournir des commentaires sur cette question avant qu'elle ait été résolue dans l'arène juridique», nous a fait savoir le relationniste Chad Heard.

La garantie rétroactive: est-ce normal?

Pour APCO, l'application «rétroactive» de la garantie n'a rien d'anormal. APCO explique que la période d'application du contrat était bien détaillée.

Pourtant, cette clause n'apparait nulle part sur le document signé par M. Ouellette.

Et le représentant du concessionnaire ne lui a jamais expliqué que le contrat s'appliquait à partir du moment de la mise en service du véhicule.

«On m'a fait croire que j'achetais une garantie de 60 mois, ce qui correspondait d'ailleurs avec la durée de mon financement», raconte M. Ouellette.

Or, on ne peut passer sous silence un fait aussi important, estime Jacques Castonguay, avocat spécialisé dans le domaine automobile. Mais comme Volvo et APCO ne veulent rien entendre, M. Ouellette devra prouver à un juge qu'on lui a vendu une garantie de 60 mois... et non de 44 mois.

Selon l'Association pour la protection des automobilistes (APA), M. Ouellette n'est pas le seul acheteur à avoir acheté une garantie «rétroactive» sans le savoir. Il arrive même que des concessionnaires vendent des voitures neuves, avec une garantie qui est partiellement écoulée, sans le dire.

Il faut savoir que les concessionnaires ont des objectifs de vente mensuels à atteindre. Lorsqu'il leur manque quelques véhicules pour y arriver, ils enregistrent la mise en service d'autos qui n'ont pas encore été vendues. Pour le manufacturier, la garantie commence ce jour-là.

Mais les consommateurs se font attraper dans le détour. Quand le client achète le véhicule, une partie de la garantie est déjà écoulée.

«J'ai déjà vu sept mois de garantie écoulée sur un véhicule neuf. Les concessionnaires passent très vite là-dessus», affirme Eddy Gallagher, conseiller à l'APA.

Au delà de la période de la garantie

Mais oublions cette question de garantie «rétroactive». Comme M. Ouellette a mentionné au mécanicien le problème de transmission deux jours AVANT l'échéance de la garantie, il considère que la garantie devrait s'appliquer.

Mais APCO réplique que la transmission fonctionnait parfaitement le 30 mars, selon le rapport du mécanicien. «La protection accrue ne promettait pas de soigner les symptômes, ni de garder le véhicule en bonne condition», explique APCO, en prenant soin d'ajouter qu'elle a déjà remboursé à M. Ouellette trois autres demandes de réparations totalisant 4 900$.

Mais la question n'est pas de savoir si le mécanicien a constaté ou non le problème. La garantie doit s'appliquer à partir du moment où la défectuosité a été dénoncée par le client avant l'échéance de la garantie.

Mais encore là, M. Ouellette devra aller devant le tribunal pour faire valoir ses droits. Auparavant, il devra faire réparer sa voiture, qui fonctionne encore malgré le problème.

Le mécanicien devra venir expliquer au juge que le problème nécessitant le remplacement de la transmission était exactement le même que celui signalé au concessionnaire le 30 mars 2006, alors que le véhicule était sous garantie.

«Encore une fois, ce sera une question de crédibilité», dit Me Castonguay.