Les prix flottent à des sommets. Les prospecteurs forent comme jamais. Et qui aurait dit qu'on rêverait un jour de mines d'uranium et de diamants au Québec? Après des années creuses, l'industrie minière québécoise se remet en marche. Tellement qu'il manque de main-d'oeuvre pour la faire rouler.

Les prix flottent à des sommets. Les prospecteurs forent comme jamais. Et qui aurait dit qu'on rêverait un jour de mines d'uranium et de diamants au Québec? Après des années creuses, l'industrie minière québécoise se remet en marche. Tellement qu'il manque de main-d'oeuvre pour la faire rouler.

La concurrence chinoise fait pester bien des travailleurs québécois par les temps qui courent. Mais pas à Val-d'Or ou à Rouyn-Noranda. Il suffit de jeter un oeil aux courbes des prix des métaux pour comprendre pourquoi.

Propulsés par la croissance asiatique, les prix du zinc et du cuivre ont plus que triplé depuis l'été 2002. Celui de l'or a doublé pendant la même période, alors que la livre d'uranium passait de 10 $ US... à près de 100 $ US aujourd'hui.

«Habituellement, on voit un engouement pour un ou deux métaux. Mais cette fois, la vague est différente. Tous les métaux ont atteint des sommets», constate Serge Perreault, géologue résident pour le ministère des Ressources naturelles et de la Faune.

Cette conjoncture se reflète directement sur l'activité entourant le sous-sol québécois. Les prospecteurs ont littéralement pris le territoire d'assaut. Le 1er novembre dernier, plus de 175 000 titres miniers étaient actifs dans l'ensemble de la province, un record depuis 10 ans. Et l'argent suit : il s'est dépensé l'an dernier 260 millions en exploration au Québec, un sommet en 20 ans.

On explore d'abord autour d'anciens sites abandonnés parce qu'on y jugeait les concentrations de métaux insuffisantes. Avec les prix actuels, les seuils de rentabilité ont changé. Et l'intérêt renaît.

«On redécouvre de vieux camps miniers. Souvent, on étend les zones d'exploration autour des vieilles découvertes et on trouve de nouvelles choses», dit Serge Perreault.

Mais on va aussi forer de plus en plus loin. «Il y a une évolution, observe Jean-Pierre Thomassin, directeur général de l'Association de l'exploration minière du Québec. Si on regarde l'historique, ça a commencé avec les forges du Saint-Maurice et l'Estrie, ensuite la Côte-Nord et l'Abitibi. Là, on est rendu à la Baie-James et l'Ungava. Comme partout au monde, on voit un déplacement vers les régions plus difficiles d'accès.»

Un long processus

Le rêve de tous les explorateurs est de refaire le coup de Mines Virginia qui, en 2001, est tombée sur ce qui est aujourd'hui considéré comme la plus importante découverte minière des 20 dernières années au pays: le gisement d'or Éléonore, vendu depuis à la minière Goldcorp de Vancouver.

Sauf que depuis, il faut bien l'avouer : c'est plutôt tranquille. «C'est le seul petit bogue actuellement. Il n'y a pas de découvertes!», dit M. Thomassin.

Est-ce à dire qu'on a trouvé tout ce qui avait à être trouvé au Québec? La question fait bondir les spécialistes de l'industrie.

«Ce n'est pas parce qu'on met l'argent maintenant que les découvertes vont venir instantanément, rappelle Pierre Bertrand, directeur général de la Société québécoise d'exploration minière. Il n'y a pas de règle qui dit : vous mettez tant de millions, et vous découvrez tant de mines. C'est un travail de plusieurs années. Et il ne faut pas se le cacher, il y a aussi un élément de chance là-dedans.»

Il reste que les choses bougent aussi du côté de la production. En Abitibi-Témiscamingue, Mines Aurizon vient de commencer à exploiter sa mine Casa Berardi, d'où elle compte retirer 185 000 onces d'or cette année.

«Je vous dirais qu'il y aura probablement quatre nouvelles mines qui vont entrer en exploitation cette année, sans compter cinq autres projets qui en sont à des étapes très avancées», explique Serge Perreault.

L'or demeure la grande vedette du sous-sol québécois. Mais la flambée du prix de l'uranium, même s'il n'y a encore aucune mine en activité, a créé un engouement indéniable parmi ceux qui en cherchent, dans le coin de Mont-Laurier ou dans les monts Otish.

«Toutes les entreprises, aujourd'hui, ont un petit projet d'uranium pour faire monter le prix de l'action et aller chercher du financement», dit M. Thomassin, de l'Association de l'exploration minière. Même les diamants suscitent un engouement, quelque chose d'impensable, selon lui, il y a quelques années à peine.

Avec toute cette frénésie, on en vient à oublier les métaux de base comme le cuivre et le zinc. À un point tel que la SOQUEM, une société d'État qui s'allie à des partenaires privés pour des projets d'exploration, a décidé de s'en mêler.

«Il ne faut pas seulement se concentrer sur la saveur du mois, mais voir à plus long terme, rappelle son directeur général, Pierre Bertrand. Ces temps-ci, les entreprises junior ont beaucoup de facilité à trouver des fonds destinés aux projets aurifères. Étant une société d'État, on a un peu réorienté nos priorités vers des commodités moins faciles à financer - d'autant plus qu'on a une fonderie, la Horne, à Rouyn-Noranda, qui a besoin d'approvisionnement en cuivre.»

LES BRAS MANQUENT

50 000 travailleurs dans le secteur minier québécois

40 % d'entre eux prendront leur retraite entre 2010 et 2015

Au moins 20 000 travailleurs à recruter d'ici 10 ans

Source : ministère des Ressources naturelles et de la Faune.