Martine veut prendre un congé sabbatique de six mois d'ici quelques années.

Martine veut prendre un congé sabbatique de six mois d'ici quelques années.

«J'aimerais faire des voyages, explique la femme de 38 ans. C'est la carotte qui me motive.»

Mais il y a encore loin du souhait aux longs séjours à l'étranger. Son employeur n'offre pas la possibilité de prendre un congé à traitement différé. Elle songe à la possibilité de prendre plutôt un congé sans solde, qu'elle financerait à mêmes ses épargnes.

«J'aimerais connaître les conséquences fiscales potentielles d'un tel choix», ajoute-t-elle.

Martine gagne un salaire de 110 000$ par année. Elle possède une maison grevée de deux hypothèques soldes de 92 000$ et 28 000$ , après qu'elle aient rachetée la part de son ex-conjoint. Outre les mensualités normales, elle y affecte 650$ par mois en remboursement de capital accéléré.

Elle a également contractée une dette de 65 000$ auprès d'un membre de sa famille.

Bien sûr, elle souhaite que son projet n'entrave pas ses objectifs de retraite. Elle aimerait cesser de travailler à 60 ans en conservant son niveau de dépenses actuel de 40 000$ par année.

Martine peut-elle concilier tous ces projets et les mener à bon port?

Trois scénarios

Le planificateur financier Denis Bellemare, de Desjardins, assisté du fiscaliste Daniel Villeneuve, a parcouru les trois scénarios possibles.

Dans la situation idéale, l'employeur adhérerait au programme de congé à traitement différé, qui prévoit qu'une partie de la rémunération de l'employé sera retenue et reportée durant son congé.

Ces sommes sont conservées par l'employeur ou versées à un fiduciaire. Cette entente est souvent avantageuse sur le plan fiscal car elle «permet à l'employé de retarder l'imposition sur le salaire différé jusqu'à ce qu'il lui soit versé», indique M. Bellemare. La durée minimale du congé d'emploi est de six mois consécutifs.

Deuxième possibilité: l'employeur de Martine ne veut pas adhérer à ce programme mais accepte qu'elle prenne un congé sans solde de six mois, qu'elle financera à même ses épargnes.

Enfin, dans le pire des cas, l'employeur refuse jusqu'à l'idée d'un congé de six mois. Écarté d'office.

Martine souhaiterait prendre son congé dans deux ans, mais notre planificateur juge plus réaliste de le planifier dans cinq ans, au courant 2012. «J'ai un horizon flexible, je veux partir quand ce sera le moins pénalisant», indique Martine à ce propos.

Dans cette hypothèse, il lui faudra donc prévoir d'ici 2012 une réserve équivalant à six mois de revenus bruts, soit 55 000$ en dollars d'aujourd'hui. Réparti sur cinq ans, il s'agit d'un report ou d'une épargne de 11 000$ par année, indexés annuellement à raison de 2%.

Suspense! L'employeur acceptera-il d'adhérer au programme de congé différé?

Suspense dégonflé: le premier scénario ne procure sur le second qu'un avantage de 450$ en économie d'impôt.

Selon les calculs de Denis Bellemare et Daniel Villeneuve, dans un cas comme dans l'autre, Martine demeure dans la tranche d'imposition de 45,7%. «Au total, le taux moyen d'impôt est pratiquement le même», commente Denis Bellemare.

Dans ces conditions, aussi bien favoriser le second scénario, qui impose moins de démarches auprès de l'employeur.

Une autre question se pose alors: les remboursements accélérés que Martine effectue sur ses deux prêts hypothécaires contreviennent-ils à son projet de congé? Elle y consacre environ 650$ par mois. Les projections de nos spécialistes montrent qu'en maintenant ce rythme, elle n'accumulera pas suffisamment d'épargnes et soldera son congé sabbatique avec un déficit de 19 000$.

Réparti sur les cinq ans d'accumulation d'épargne, ce déficit correspond à un montant de 323$ par mois.

Elle pourrait réduire ses cotisations REER en conséquence, mais ce serait alors ses projets de retraite qu'elle mettrait en péril. Mieux vaut ralentir le remboursement accéléré de son hypothèque principale de 323$ par mois, qui serait alors acquittée en neuf ans plutôt qu'en six.

Reste encore la dette de 65 000$ contractée auprès de sa famille. Le créancier ne demande que le paiement des intérêts et n'impose aucun délai pour le remboursement du capital. Martine pourrait donc n'entreprendre ce remboursement qu'au retour de son congé sabbatique. À raison de 13 000$ par année, cette dette serait liquidée entre 2014 et 2018.

«Nos projections indiquent que Martine pourrait se le permettre financièrement», commente M. Bellemare, qui précise toutefois que tout repose sur la perpétuation de cette belle concorde familiale.

Et sa retraite

Reste l'écueil de sa retraite. Le régime de retraite de son employeur lui permettra de toucher dès 60 ans une rente sans pénalités.

Elle s'élèverait alors à 47 460$ en dollars actuels, plus une rente de raccordement de 8050$ qui cessera à 65 ans. Elle y ajouterait 566$ par mois en rente de la RRQ et 445$ par mois en prestations de Sécurité de la vieillesse quoique ces dernières seront vraisemblablement récupérées en bonne partie.

Enfin, Martine contribue assidument à son REER, ce qui ajoutera à ses revenus de retraite. «Elle a déjà accumulé 103 000$ en REER et maximise ses cotisations chaque année», observe M. Bellemare.

En supposant qu'elle meure à 90 ans, «notre analyse indique qu'elle pourrait réaliser un coût de vie à la retraite de près de 67 000$ nets au lieu de 40 000$ nets», conclut notre planificateur.

En somme, l'horizon est dégagé.

Cinq ans... Martine peut déjà songer à son itinéraire...

LE PROJET

Martine veut prendre un congé sabbatique de six mois, peutêtre dans deux ans. Mais son employeur n'accorde pas de congé avec traitement différé. Son projet est-il en péril ?

«Est-il réaliste de penser à prendre six mois en congé sabbatique sans mettre en péril mon train de vie actuel ainsi que ma retraite ?» Martine

LES FAITS

Âge : 38 ans

Revenu : 110 000 $

Placements non enregistrés : 7500 $

Placements enregistrés : 104 000 $

Régime de retraite : 99 000 $

Solde hypothécaire : 120 000 $, en deux prêts

Dette envers un membre de sa famille : 65 000 $

LE DIAGNOSTIC

En raison de ses revenus élevés, un congé à traitement différé ne procurerait à Martine que peu de bénéfices fiscaux. Elle pourrait tout aussi bien planifier dans cinq ans un simple congé sans solde avec ses épargnes. Et ce congé ne mettra pas en péril sa retraite, qui s'annonce plus confortable que prévu.