Pour le ministre Raymond Bachand, la question n'est plus de savoir si l'on peut se permettre d'ignorer l'Inde, mais plutôt : "Est-ce qu'on peut survivre sans elle?"

Pour le ministre Raymond Bachand, la question n'est plus de savoir si l'on peut se permettre d'ignorer l'Inde, mais plutôt : "Est-ce qu'on peut survivre sans elle?"

C'est sur cette interrogation qui laisse deviner la réponse que le ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation a mis fin à son séjour en Inde, au début de la semaine.

"Le 100% made in Québec n'est pas concurrentiel. Si on ne recherche pas le partage des avantages avec d'autres économies, on meurt!" a-t-il martelé en entrevue dans sa chambre du Taj Palace, à Delhi, où il assistait au World Economical Forum India qui a pris fin mardi. M. Bachand avait auparavant piloté une mission économique québécoise dans le sous-continent, du 19 au 24 novembre.

Devant l'inquiétude grandissante des travailleurs québécois, qui craignent de voir leurs emplois s'envoler au profit des Indiens et des Chinois, le ministre du Développement économique a affirmé qu'un travail d'éducation doit être fait auprès pour faire valoir les intérêts du Québec dans l'intensification des relations économiques avec l'Inde. "Il faut se concentrer sur les secteurs où nous sommes compétitifs et profiter de ce que les autres ont à offrir pour survivre dans un marché global", a-t-il plaidé.

Après une semaine riche en rencontres, réparties entre Bombay, Bangalore et Delhi, avec les grands et moyens acteurs de l'économie indienne, Raymond Bachand s'est dit "très satisfait" de sa mission, au-delà même de ses attentes. "Mon but était que les membres de notre délégation soient contents et ils le sont amplement. L'idéal serait que dans trois ans, un ministre ne soit plus nécessaire pour faciliter les relations entre les deux communautés d'affaires."

L'objectif premier de Raymond Bachand et de la soixantaine de Québécois l'accompagnant n'était pas de signer des contrats, mais avant tout d'approfondir les liens établis en janvier lors de la mission dirigée par Jean Charest. On voulait aussi créer de nouveaux liens.

Le bref séjour aura tout de même vu quelques ententes se conclure. Notamment, Alchemic Dream et sa partenaire indienne Comat Technologies ont signé un accord pour la création d'une coentreprise de services en multimédia. L'Institut de neurologie de Montréal (Université McGill) et le National Brain Research Centre (NBRC) de Delhi ont également scellé un engagement pour le développement de programmes permettant l'avancement des neurosciences.

"Le potentiel d'échanges et de collaboration entre l'Inde et le Québec est immense. Nous sommes complémentaires et compatibles dans de nombreux secteurs", a fait valoir un ministre enthousiaste, citant en exemple l'industrie aéronautique indienne qui connaît plus de 15% de croissance annuelle.

"D'ici quelques années, l'Inde aura besoin de milliers de pilotes. Le Québec pourra non seulement lui offrir une formation professionnelle de pointe, mais elle sera aussi en mesure de lui fournir une technologie sophistiquée", a-t-il lancé en notant que la perspective a de quoi réjouir les quelque 250 PME québécoises du secteur.

Cependant, en dépit d'un marché potentiel d'un milliard d'habitants, d'une croissance annuelle de plus de 8% et du dynamisme des gens d'affaires indiens qu'il a trouvé " très plaisants et plein d'humour" Raymond Bachand est conscient des difficultés que représentent les affaires sur le sol indien. En plus d'une bureaucratie lourde de quatre millions d'employés et d'une corruption endémique, le ministre reconnaît qu'il y a de grosses lacunes au plan des infrastructures.

Il voit aussi des pièges à une mission comme celle qu'il a dirigée. Il cite le risque d'éparpillement, en soulignant l'importance d'un suivi serré. Il mentionne également la distance entre les deux pays, et le décalage horaire évidemment. "Pour parler à ma chef de cabinet cette semaine, j'avais une plage de deux heures le matin et une autre petite le soir!"

Et comment le ministre québécois compare-t-il l'Inde à la Chine?Diplomate, Raymond Bachand a préféré s'abstenir. Il a cependant glissé au cours de l'échange qu'en plus de maîtriser l'anglais, "les Indiens sont un peuple très éduqué ". Et qu'" à long terme, la démocratie paie".