Michel et Chantale ont quatre enfants, âgés de 12 à 21 ans, tous à la maison. Une belle famille: «C'est tout à fait parfait!», assure Chantale.

Michel et Chantale ont quatre enfants, âgés de 12 à 21 ans, tous à la maison. Une belle famille: «C'est tout à fait parfait!», assure Chantale.

Chantale reste à la maison avec les enfants et fait du bénévolat. Michel touche pour sa part un salaire de 92 000 $ par année.

«Nous vivons correctement avec ce que nous avons, signale Chantale. Nous avons une hypothèque et une voiture louée. Pour le reste, tout est beau, aucune dette.»

Mais les années ont tout de même filé. Parvenu dans la cinquantaine, le couple voit la retraite se profiler. «Nous commençons à y penser mais nous ne savons comment nous y arriverons, puisque nous aurons des enfants pour encore un certain temps», poursuit-elle.

Ils n'ont aucun remord ni regret. Priorité aux enfants. Ce qui n'empêche pas de voir venir. «On se demande ce qu'on pourrait faire maintenant pour nous aider plus tard en tenant compte que nous avons nos quatre enfants.»

Tout en se débattant avec la planification d'une retraite à 65 ans, le couple nourrit un rêve intermédiaire: «acheter un terrain quelque part, décrit Chantale, pas trop loin pour profiter de la visite des enfants et petits-enfants, où Michel pourrait construire de ses mains notre future maison verte.»

Un effort à faire

Le planificateur financier Bernard Beauchemin, de la Banque Laurentienne, s'est penché sur la situation financière du couple.

Notre spécialiste constate d'abord que les retenues à la source sur le salaire de Michel sont trop élevées. «Vous devriez compléter le formulaire informant votre employeur des exemptions auxquels vous avez droit — personnes à charge, contributions au REER collectif», avise-t-il.

On peut penser qu'un remboursement d'impôt plus généreux ajoute aux plaisirs printaniers, et qu'il s'agit là d'une manière de faire des épargnes forcées.

«L'épargne par l'intermédiaire d'un retour d'impôt, que le gouvernement nous retourne lorsqu'on lui produit une déclaration de revenus, n'est pas à conseiller, observe toutefois M. Beauchemin. Si les retenues sont bien faites, votre salaire net augmente (...) c'est vous qui bénéficierez d'un revenu d'intérêt sur ce montant.»

La retenue à la source de la cotisation REER est alors la formule la plus rentable. Michel pourrait demander à son employeur d'augmenter sa contribution personnelle de 25 $, 50 $ ou même 100 $ par période de deux semaines, suggère encore notre expert.

Michel et son employeur contribuent au REER collectif de l'entreprise à hauteur de 5600 $ par année. Son compte totalise 113 000 $. Michel a en outre constitué un REER personnel de 89 000 $.

C'est fort bien, mais malheureusement, Chantale, qui est à la maison depuis une vingtaine d'années, n'a de son côté aucune épargne REER.

Mieux vaudrait que l'un et l'autre atteignent la retraite avec des épargnes et des revenus de même ampleur. Le fisc s'en trouverait moins gourmand.

M. Beauchemin donne l'exemple suivant. Si Michel et Chantale gagnent chacun 25 000 $ par année à la retraite, ils paieront environ 4140 $ d'impôt chacun, pour un total de 8280 $. Si Michel gagne ce même revenu de 50 000 $ à lui seul, la ponction fiscale s'élèvera à près de 10 400 $. La différence effleure 2000 $ par année.

Selon notre expert, Michel pourrait demander à son employeur de verser les futures cotisations du REER collectif dans un nouveau régime dont Chantale serait la rentière.

Même programme pour le REER individuel de Michel: tant que les épargnes des deux conjoints ne seront pas sensiblement égales, il devrait accorder la priorité au REER de Chantale.

Il est vrai que le fédéral a annoncé le 31 octobre 2006 la possibilité de fractionner entre les conjoints les revenus de retraite admissibles, à compter de 2007. Le gouvernement du Québec adoptera aussi une formule semblable. «La stratégie de contribuer au REER du conjoint demeurera, règle générale, encore une voie à encourager», énonce cependant notre spécialiste.

Bref, dans le doute, mieux vaut ne pas s'abstenir.

Au rythme actuel de cotisation aux REER, les épargnes du ménage et les diverses rentes gouvernementales procureront au couple un revenu de retraite d'environ 37 000 $ après impôt, jusqu'à l'âge de 90 ans. Dans ce calcul, M. Beauchemin utilise les prémisses d'un rendement de 6 % et d'une inflation de 3 %.

Compte tenu du coût de vie actuel du couple — environ 60 000 $ —, ce revenu sera vraisemblablement insuffisant.

«Il y a un autre effort à faire, sans quoi ce sera très difficile, parvenu à 65 ans, insiste le conseiller. Ils pourraient même devoir quitter leur propriété actuelle s'ils ne font pas d'efforts supplémentaires.»

Or, le salaire de Michel — 92 000 $ avant impôt — couvre tout juste le budget du ménage.

«Ce sera très serré pendant encore six à huit ans, jusqu'à ce que les enfants commencent à quitter la maison», observe notre spécialiste. Les liquidités supplémentaires pourront alors être consacrées en priorité au REER. D'ici là, il sera difficile de lancer le projet de maison verte.

Bernard Beauchemin suggère au couple de considérer la transformation de leur hypothèque en marge hypothécaire, afin de profiter de la plus-value réalisée sur la propriété. Leur maison, sur laquelle court pour encore 15 ans une hypothèque de 75 000 $, vaut maintenant près de 300 000 $.

Cette marge de crédit pourrait être utilisée pour contracter des emprunts REER. «Ils économisent 45 % d'impôt quand ils investissent en REER», fait-il valoir.

Les remboursements d'impôts seraient appliqués au projet de la maison verte. Le profit réalisé lors de la vente de la résidence principale servira à payer tout solde de la marge de crédit hypothécaire. La maison verte deviendrait alors la nouvelle résidence principale.

Toutes ces mesures permettraient d'ajouter de 15 000 $ à 20 000 $ par année aux cotisations REER du couple, entre 2011 et 2019. Les deux conjoints pourraient ainsi porter leurs revenus de retraite à environ 40 000 $ par année, après impôt.

Et les études des enfants, dans ce portrait? Elles seront assumées par les grands-parents... Une belle famille.