Da Giovanni, restaurant bien connu de la rue Sainte-Catherine, doit rembourser depuis le mois dernier les frais de stationnement de ses clients pour les garder.

Da Giovanni, restaurant bien connu de la rue Sainte-Catherine, doit rembourser depuis le mois dernier les frais de stationnement de ses clients pour les garder.

«Il y avait beaucoup de plaintes de clients contre la forte hausse des tarifs des parcomètres» et ils venaient en moins grand nombre chez Da Giovanni, explique le directeur général, John Georgogapoulos.

Le restaurant italien «rembourse donc deux heures de stationnement aux clients, depuis un peu plus d'un mois maintenant» (depuis le début d'avril). John Georgogapoulos a conclu une entente avec le propriétaire d'un terrain, à l'arrière du restaurant, pour y réserver des places de stationnement.

D'autres détaillants se plaignent aussi de la nouvelle tarification des parcomètres, selon Paul Lewis, professeur d'urbanisme à l'Université de Montréal et directeur de l'Observatoire SITQ du développement urbain et immobilier.

C'est maintenant facile de trouver des places de stationnement sur le boulevard Saint-Laurent, parce que les gens vont en banlieue, estime Paul Lewis, qui n'a par contre pas de chiffres pour le prouver.

«C'est bon d'augmenter les tarifs, pour encourager les transports en commun», mais là, on chasse la clientèle en banlieue. Le professeur craint que Stationnement de Montréal ait franchi la frontière du raisonnable.

En outre, si stationner dans la rue coûte plus cher qu'ailleurs, c'est le prélude à une hausse des tarifs des parcs de stationnement intérieur, ajoute Paul Lewis, en particulier dans le quartier des spectacles.

La Ville a raison d'augmenter les tarifs, mais pas au point de créer plus d'inconvénients que d'avantages. «Le danger c'est de vider le centre-ville», dit-il.

Au même moment, les promoteurs du Quartier Dix30 reproduisent une rue commerciale à leur centre commercial style de vie (lifestyle center) de Brossard.

«Ce n'est pas encore la rue Saint-Denis, mais il n'y a pas d'entraves au stationnement et, bientôt, on y trouvera un hôtel, une patinoire (le centre d'entraînement du club Canadien) et des spectacles», souligne Paul Lewis.

«Paiera-t-on encore 10$ de stationnement pour aller se promener ou faire ses achats au centre-ville? D'ailleurs, les cinémas ont déjà disparu en grand nombre du centre-ville en raison notamment des difficultés d'accès. Il faut aller au Marché central de Montréal», selon le professeur.

«Pour un repas gastronomique au Toqué, ça va, mais pour une petite bouffe, les tarifs du stationnement pourraient poser problème. La nouvelle tarification, c'est formidable pour une course d'une demi-heure, car il y a de la place pour stationner, mais pour deux ou trois heures au magasin ou au spectacle, les coûts de stationnement grimpent», dit-il.

«La hausse d'un seul coup du tarif constitue un message plus fort et percutant» qui pourrait favoriser les transports en commun, mais il faut d'abord en étudier l'impact, explique Paul Lewis.

«Aux États-Unis, on se pose beaucoup de questions. Il faut viser un tarif qui permet de garder 85% des espaces de stationnement occupés. Si on atteint 100%, le stationnement ne coûte pas assez cher, mais si plus de 15% des espaces sont libres, c'est trop cher», explique Paul Lewis.

À Montréal jusqu'ici, se garer n'a jamais coûté très cher, dit-il. À Ottawa et dans de nombreuses autres villes nord-américaines, ça fait longtemps que c'est beaucoup plus cher.

C'est le cas «à Boston, New York, Washington et Baltimore, autant dans la rue qu'au stationnement intérieur. Là, Montréal est en train de les rattraper», déclare Paul Lewis.

«L'arrondissement de Ville-Marie a annoncé la baisse du nombre de stationnements hors rue, car il y en a trop», convient Paul Lewis, «mais il ne faut pas le faire de façon précipitée», conclut-il.