Le premier ministre britannique Tony Blair avait promis en 1997 de reconstruire le NHS, "la plus belle invention" du Parti travailliste à ses yeux, alors en déshérence, mais la privatisation du système de santé public semble désormais à l'agenda du gouvernement britannique.

Le premier ministre britannique Tony Blair avait promis en 1997 de reconstruire le NHS, "la plus belle invention" du Parti travailliste à ses yeux, alors en déshérence, mais la privatisation du système de santé public semble désormais à l'agenda du gouvernement britannique.

Après l'annonce, il y a deux mois, du doublement du déficit du National Health Service (NHS), et de nouvelles suppressions d'emplois en plus des 6.000 déjà annoncées, deux affaires récentes ont trahi les projets de Downing Street.

Fin juin, le ministère de la Santé faisait une gaffe en passant, plus tôt que prévu, une annonce au Journal officiel de l'Union européenne, invitant des entreprises à engager le dialogue avec Londres en vue de leur sous-traiter l'administration du NHS.

Le premier syndicat du secteur, Unison, dénonçait aussitôt "une rupture fondamentale du contrat de confiance" du gouvernement, tandis que l'ancien ministre travailliste de la Santé, Frank Dobson, condamnait un projet revenant "à mettre des multinationales aux commandes".

La polémique a enflé la semaine dernière alors que le Premier ministre prônait une "révolution" de la santé, où les citoyens se prendraient plus en charge, dans un discours dénonçant en règle l'Etat-Providence.

"Nous devons faire tomber les barrières entre public et privé et faire appel à l'expertise de ceux qui travaillent dans les pharmacies indépendantes", a déclaré Tony Blair à Nottingham (centre), saluant une initiative de la chaîne d'officines Boots, l'un des emblèmes des rues commerçantes britanniques.

Boots, qui a fusionné lundi avec Alliance Unichem pour créer Alliance Boots, le premier réseau de pharmacies en Europe, va accueillir dans celle de Poole (sud) des médecins et infirmiers du NHS, qui pourront effectuer des actes de physiothérapie, d'orthopédie et de pédiatrie, des examens cardiaques ou des analyses de sang.

La chaîne de supermarchés Sainsbury, qui comme d'autres fait une concurrence croissante aux pharmacies pour la vente de médicaments, veut également louer des locaux à des praticiens du NHS.

Richard Baker, directeur général d'Alliance Boots, a indiqué à l'AFP qu'il ne voyait là qu'une source de revenus supplémentaires et un nouveau flux de clientèle, en excluant tout contrôle sur l'activité du personnel médical.

Mais l'Association des médecins britanniques redoute qu'à terme des groupes privés n'en viennent à employer directement des docteurs et à gérer des cabinets pour le compte du NHS.

"Nous sommes inquiets face à la tendance symptomatique du gouvernement à renforcer toujours plus la présence du privé", affirme Hamish Meldrum, président du comité des médecins-traitants de l'Association.

Dès 1997, le Labour avait eu recours aux partenariats public-privé pour rénover les hôpitaux, souvent vétustes. Il a multiplié depuis l'emploi de consultants privés pour assister les Primary Care Trusts, qui gèrent le NHS au niveau local.

L'hôpital Whipps Cross, dans l'est de Londres, a recruté en juin un consultant, payé 220.000 euros pour un contrat de six mois, afin qu'il l'aide à réduire son déficit, le jour même où il annonçait la suppression de 400 emplois et de 22 lits.

La ministre de la Santé Patricia Hewitt est une ardente critique de la gestion du NHS et encourage beaucoup le recours au privé. La réforme qu'elle a présentée en janvier au Parlement vise notamment à ce que certains services comme les soins infirmiers ne soient plus assurés par les Primary Care Trusts d'ici 2008, mais par des "prestataires alternatifs", ce qui lui vaut bien des critiques au sein de l'administration.

"Si des organismes privés peuvent aider le NHS à mieux s'occuper des patients, à un coût moindre pour le contribuable, nous ferons appel à eux", a-t-elle répondu cette semaine dans le Guardian.

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