Un an après sa fondation, l’École des dirigeants des Premières Nations, associée à HEC Montréal, est en train d’atteindre son rythme de croisière et surtout de remplir son objectif de donner des outils de gestion additionnels aux leaders des communautés autochtones. Quatre cohortes regroupant plus de 80 dirigeants des Premières Nations viennent ou sont en voie d’entreprendre une nouvelle session qui s’échelonnera jusqu’au mois de mai.

Il y a tout juste un an, l’École des dirigeants des Premières Nations (EDPN) prenait officiellement forme alors qu’une première cohorte de 17 chefs ou grands chefs, de conseillers-chefs et de présidents de conseil d’administration entreprenaient une formation pour perfectionner leurs compétences et leurs habilités de leaders et de gestionnaires.

Un an plus tard, Manon Jeannotte, la directrice et co-initiatrice de l’EDPN, est à même d’apprécier le chemin parcouru par la jeune institution et surtout de mesurer les avancées du programme de formation qui a été développé et mis sur pied en collaboration avec HEC Montréal.

Manon Jeannotte a été longtemps conseillère puis cheffe de la Nation Micmac de Gespeg (Gaspé). Titulaire d’une maîtrise pour cadre de HEC-McGill, Mme Jeannotte s’est associée en 2020 pour créer l’EDPN à Ken Rock, le directeur général de la Société de développement économique de Uashat Mak Mani-utenam, près de Sept-Îles, lui aussi titulaire d’un EMBA de HEC-McGill.

On a décidé de créer ce programme pour outiller les leaders des Premières Nations afin qu’ils puissent mieux remplir leur rôle. Ken et moi, on connaît la réalité des Premières Nations et on voyait bien qu’il y avait des besoins. On veut développer leurs habiletés pour optimiser leur leadership, pas leur donner un enseignement théorique.

Manon Jeannotte, directrice et co-initiatrice de l’EDPN

« Les Premières Nations ont longtemps refusé le développement économique parce que c’était lié à l’extraction minière, à la détérioration de leur territoire. Aujourd’hui, on comprend mieux qu’il est possible de faire du développement autrement, en pratiquant notamment l’économie circulaire et en collaborant entre nous comme on le faisait avant la colonisation », m’explique la directrice de l’EDPN.

Manon Jeannotte et Ken Rock ont présenté leur projet d’une école de formation pour les dirigeants autochtones à Serge Lafrance, le directeur de l’École des dirigeants de HEC, qui a accepté d’emblée de participer à la mise en place de ce nouvel espace collaboratif d’apprentissage.

Une formation sur mesure

Plus d’une trentaine de professeurs de HEC et de l’Université de Montréal participent aux différents ateliers des quatre modules d’enseignement qui ont été mis sur pied : le leadership (on gère comme on est), la gestion collaborative, l’innovation et le changement, et enfin la gouvernance et l’éthique.

Pour chaque module, il y a aussi un accompagnateur des Premières Nations qui collabore à la formation. Ken Rock, le co-initiateur de l’EDPN, participe ainsi à la formation sur la négociation, et Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL), est aussi un collaborateur de l’École.

Il y a 43 communautés des Premières Nations sur le territoire du Québec et du Labrador qui sont issues des 10 nations qui composent l’APNQL.

Notre objectif est de donner des outils additionnels pour les élus et administrateurs autochtones, les entrepreneurs, les gestionnaires de programmes ainsi que pour les femmes qui veulent développer leurs compétences en matière de leadership pour participer par exemple à un conseil d’administration.

Manon Jeannotte, directrice et co-initiatrice de l’EDPN

Manon Jeannotte cite l’exemple des 250 millions de redevances que la communauté micmaque de Gaspé va recevoir sur 20 ans pour sa participation au projet de parc éolien Mesgi’g Ugju’s’n érigé par Innergex sur le territoire de la communauté.

« Cet argent va aller dans une fiducie et va notamment servir à mettre sur pied des fonds de développement économique et pour l’éducation. L’EDPN va permettre de développer de meilleures compétences pour la supervision de ces projets », souligne Mme Jeannotte.

Nadia Robertson, de la communauté micmaque de Gespeg, a fait partie de la première cohorte issue de l’École des dirigeants des Premières Nations. Gestionnaire du développement des affaires pour l’Autorité financière des Premières Nations, Mme Robertson a longtemps œuvré dans le monde bancaire où elle a notamment créé les cercles autochtones à la Banque TD.

« Je suis dans le développement économique et l’EDPN a mis sur pied un programme pour développer nos habiletés et parfaire nos perceptions de façon pratique, que ce soit sur la gestion de soi, l’intelligence émotionnelle, comment créer des alliances ou s’adresser à un auditoire. C’est beaucoup plus empirique que didactique », observe la gestionnaire.

Les programmes de l’EDPN s’échelonnent sur plusieurs mois et impliquent quatre stages de trois jours durant les week-ends, dont deux dans les locaux de HEC Montréal et deux autres dans les différentes communautés des Premières Nations, en plus de nombreux ateliers en virtuel.

« On tient à ce que les dirigeants des Premières Nations vivent l’expérience HEC. Durant leur séjour, on les invite dans de nombreuses activités, dont des déjeuners à la Chambre de commerce de Montréal. On veut qu’ils et elles profitent de leur passage pour faire du réseautage », souligne Manon Jeannotte.

L’EDPN est financée en partie par le gouvernement du Québec et des contributions d’Hydro-Québec, de la BDC et de la Banque TD, mais est gracieusement hébergée par HEC Montréal qui lui donne accès à ses immeubles et ses salles de classe

« Ken et moi, on s’est inspirés de notre expérience au EMBA HEC-McGill et l’École des dirigeants des Premières Nations a été créée par et pour les Premières Nations, mais elle est propulsée par HEC », insiste Manon Jeannotte.