La littératie financière, c’est un peu comme les céleris à côté du sac de chips au ketchup. On sait ce qui est bon pour nous, mais on le néglige quand même.

Ce n’est pas difficile de trouver des vidéos plus divertissantes que celles qui expliquent le fonctionnement du REEE ou des fonds négociés en Bourse. Mais au moment où 85 % des Québécois vivent de l’anxiété financière, selon un récent sondage Léger, prendre un peu de temps pour améliorer ses connaissances peut aider à retrouver le sommeil.

De fait, ceux dont l’angoisse financière est « sévère » ou « extrême » sont peu nombreux (moins de 25 %) à afficher un bon niveau de connaissance des concepts d’intérêt, d’inflation et de placement. Vous aurez compris que c’est l’inverse parmi ceux qui ne se stressent pas avec l’argent.

Bien sûr, d’autres facteurs contribuent aux inquiétudes liées à l’argent. Mais si on ne peut pas contrôler l’inflation, les taux d’intérêt, ses revenus et le rendement de ses placements, il en va autrement de son niveau de littératie financière.

« Quand on a plus de notions, forcément on a plus de pouvoir sur sa situation. On évite les erreurs coûteuses, on peut prendre de meilleures décisions qui nous feront gagner de l’argent ou économiser », fait valoir Youcef Ghellache, professeur de finance au collège Montmorency, fondateur du site Éducfinance et créateur du groupe Facebook L’argent ne dort jamais.

Mais comment s’y prendre, concrètement, pour apprendre sans trop souffrir ? En ce mois de la littératie financière, j’ai posé la question à quatre experts.

Youcef Ghellache aime recommander le livre La retraite à 40 ans, de Jean-Sébastien Pilotte, « même si le titre peut sembler farfelu ». C’est léger, le ton est humoristique, et les explications sont claires, justifie-t-il. Les livres de Pierre-Yves McSween (En as-tu vraiment besoin ?, Liberté 45 et La facture amoureuse) ainsi que Père riche, père pauvre, de Robert Kiyosaki, sont d’autres lectures agréables et accessibles.

Sur son site Éducfinance, le professeur et entrepreneur propose une boîte contenant sept outils pour mieux gérer son budget, ses dettes, ses placements, ses impôts et ses assurances, notamment.

Téléchargez les outils d’Éducfinance

Le site d’ÉducÉpargne (anciennement Question Retraite) regorge aussi d’une foule d’informations bien vulgarisées sur le RAP, la planification de la retraite et même les assurances pour animaux. Son guide 99 trucs pour économiser sans trop se priver a été mis à jour pour la dernière fois en 2019, mais ses conseils demeurent d’actualité.

Son directeur général, Louis-Alexandre Lacoste, convient qu’il y a « un minimum d’effort à faire » pour s’outiller et pour être en mesure de poser les bonnes questions, « sinon vous allez vous faire organiser et ce ne sera pas nécessairement dans votre intérêt ». Mais la bonne nouvelle, c’est que « l’information est là ». Tout est en ligne, facilement accessible. Il cite en exemple le site Hardbacon, celui de Retraite Québec, ceux des banques, de Desjardins, des fonds de travailleurs.

« Ce qu’on entend souvent, ce sont des gens qui arrivent à 60 ans et qui disent : “Comment ça qu’on ne m’a pas dit ça quand j’avais 30 ans ?” Ça n’a pas été dit ou les gens n’ont pas écouté ? », demande M. Lacoste.

Consultez le site d’ÉducÉpargne Consultez le site Hardbacon Consultez le site de l’AMF destiné au grand public (pour les assurances et les types d’investissements [cryptoactifs, fonds communs, obligations, RVER] surtout)

Améliorer ses connaissances peut embellir son présent, mais aussi ses perspectives de retraite. Ne serait-ce qu’en raison de « la magie des intérêts composés », dit Philippe d’Astous, directeur du Laboratoire en éducation financière HEC Montréal.

Commencer à épargner tôt dans la vie fait toute la différence. Mais pour cela, il faut « optimiser sa consommation » en étant à l’affût de tous les trucs qu’on peut trouver pour ne pas se faire avoir, suggère-t-il. Ensuite, on apprend à gérer ses surplus en les allouant « là où le taux est le plus élevé ». Ce qui suppose d’avoir des notions de base en matière de placements.

Certaines connaissances peuvent avoir un impact majeur sur nos choix de vie. Certains employés écartent la possibilité d’acheter des actions au rabais de leur employeur, car ils ne comprennent pas comment ça fonctionne, déplore Philippe d’Astous. « Il n’y a pas 25 % des gens qui savent qu’on peut travailler tout en recevant le RRQ. Pour ramener les aînés au travail, ce n’est pas idéal », donne-t-il aussi en exemple.

En matière de retraite, la littératie fait toute la différence.

En sachant à un jeune âge que l’épargne personnelle ne peut suffire à se constituer une retraite viable (à moins de gagner un salaire très élevé), on fera peut-être des choix de vie différents, croit le sociologue et coordonnateur de l’Observatoire de la retraite François L’Italien. Que ce soit en matière d’employeur ou de type de profession. « Il faut savoir que pour la vaste majorité du monde, le REER est un petit complément et non un pilier pour la retraite. » S’y connaître permettra aussi de prendre une meilleure décision quand son syndicat, par exemple, donne le choix entre un meilleur régime de retraite ou un gros salaire.

Qui a dit qu’il fallait attendre le 1er janvier pour prendre de bonnes résolutions ?