La fin de l’année arrive bientôt et ce ne sont pas les quelques rares sursauts haussiers qu’enregistrent à l’occasion les principaux indices boursiers qui laissent présager un éventuel ralliement de dernière heure. En cette année de forte inflation, marquée par des interventions bien senties et répétées des autorités monétaires, les investisseurs ne se font plus d’illusions et évaluent plutôt froidement les pertes qu’ils devront escompter dans leur bilan de fin d’année.

Le comportement des marchés boursiers en 2022 est en voie de confirmer leur fonction d’indicateur avancé de l’activité économique, alors que de plus en plus d’économistes anticipent maintenant la très forte probabilité de l’avènement d’une récession pour le début de 2023.

Il ne reste plus qu’à déterminer le degré de virulence du prochain ralentissement économique et sa durée. Les prochains mois nous confirmeront le tout.

Les investisseurs canadiens peuvent toutefois trouver une certaine consolation dans le fait que le recul observé sur le marché des actions canadien depuis le printemps dernier a été moins prononcé que celui enregistré par la Bourse américaine et les autres grands marchés dans le reste du monde.

Jusqu’ici, l’indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto affiche une baisse de 11,1 % depuis le début de l’année, contre un recul de 23,9 % pour l’indice américain S&P 500 et de 14,9 % pour l’indice MSCI EAFE, qui calcule les rendements des Bourses d’Europe, d’Océanie et d’Extrême-Orient.

Si la Bourse canadienne a réussi jusqu’à maintenant à afficher un recul moins important que les autres grands indices, c’est principalement en raison de sa forte exposition aux titres du secteur des énergies fossiles.

Et c’est aussi la raison pour laquelle l’indice S&P/TSX présente en cette fin d’octobre 2022 un bilan plus favorable que celui généré jusqu’ici par les titres québécois tel qu’il est calculé par l’indice Morningstar Québec Banque Nationale (MQBN), qui affiche un bilan négatif de 12,9 % depuis le début de l’année.

Au cours des 10 dernières années, l’indice MQBN, qui est composé de 60 titres d’entreprises québécoises cotées en Bourse – sur un univers potentiel de 105 titres québécois –, est arrivé généralement, et non de façon absolue, à mieux performer que l’indice canadien du TSX en générant un rendement annualisé de 10,4 %, contre 7,9 % pour le S&P/TSX.

L’imprévisibilité des titres fossiles

Dans le passé, la performance comparative des titres québécois par rapport aux titres canadiens a souvent été favorisée par sa non-exposition au secteur de l’énergie fossile – pétrole et gaz naturel –, ce qui n’est pas le cas cette année.

Pierre Lussier, vice-président et gestionnaire principal de la division Actions québécoises chez Gestion de placement Eterna, a mis sur pied avec son collègue Philippe Côté le portefeuille Composé Québec-Eterna, qui regroupe 34 titres de sociétés québécoises.

« On a réussi à ce jour à générer un rendement comparable à celui du S&P/TSX en 2022 sans avoir dans notre portefeuille aucun titre fossile, alors qu’ils composent près de 20 % de l’indice de la Bourse de Toronto et qu’ils ont produit un rendement de 19,6 % cette année », expose le gestionnaire.

On n’investit jamais dans un titre sans avoir une prévisibilité des profits. Or, avec les titres fossiles, on n’a jamais d’idée précise des profits à venir, c’est de la pure spéculation.

Pierre Lussier, vice-président et gestionnaire principal de la division Actions québécoises chez Gestion de placement Eterna

Le comportement des titres québécois n’est pas linéaire pour autant, comme en témoignent les rendements générés par les 10 titres les plus importants de l’indice Morningstar Québec Banque Nationale.

Si l’action de Dollarama affichait au 30 septembre un rendement spectaculaire de 47 %, celle de Couche-Tard, de 12,84 %, et celle de Metro, de 16,12 %, les reculs ont été beaucoup plus nombreux : CGI à - 2,59 %, le CN à - 0,28 %, la Banque Nationale à -9,45 %, TFI International à - 5,8 %, et enfin Power Corporation à - 17,24 %.

Un marché baissier n’est jamais un moment agréable pour un investisseur. On ne sait pas à quel moment les reculs vont donner lieu à un renversement de tendance, mais on s’entend sur le fait qu’une embellie des conditions économiques est une condition nécessaire pour que les marchés reprennent une trajectoire ascendante de façon durable.

S’il y a matière à consolation, c’est lorsqu’on s’attarde sur les ratios cours-bénéfice des titres qui ont enregistré de forts reculs depuis le début de l’année.

Dans la liste des 10 plus importantes positions des titres qui composent l’indice MQBN, on observe que celui de la Banque Nationale s’échange à un ratio cours-bénéfice de 9,27, celui de Power Corporation, de 7,91, celui de TFI International, de 12,36. Les déceptions d’aujourd’hui pourraient devenir les occasions de demain, même si on ne sait pas exactement quand viendra ce demain.