La réputation embarrassante qui colle aux vendeurs d’autos est tenace. Et ce ne sont pas les pratiques de l’entreprise HGrégoire, révélées par des enquêtes de l’Autorité des marchés financiers (AMF), qui vont redorer l’image de cette industrie.

« HGrégoire, c’est la liberté de choisir en toute confiance », promet le site web du géant québécois de la voiture d’occasion.

Ce n’est pas exactement ce que l’AMF a découvert en recueillant les témoignages de clients.

Elle accuse plutôt HGrégoire de « pression indue » et de « manœuvres dolosives » pour inciter des consommateurs à se procurer une assurance. Dans certains cas, des garanties auraient été vendues sans aucune explication sur leur nature. Et même à l’insu des clients. C’est tellement effronté !

C’est ainsi qu’au beau milieu de juillet, 31 constats d’infraction ont été transmis à HGrégoire et à des employés pour une série de comportements qui contreviennent à la Loi sur la distribution de produits et services financiers. Les documents sont maintenant publics. Chacun se rapporte à l’expérience vécue par un client.

En tout, l’entreprise de Saint-Eustache a reçu des amendes totalisant 314 850 $ en incluant les frais et les contributions d’usage. Il s’agit du montant le plus élevé jamais imposé par l’AMF à un concessionnaire automobile.

HGrégoire a plaidé non coupable. Un juge de la Cour du Québec devra donc trancher.

L’AMF réclame — dans 29 cas sur 31 – des peines largement supérieures au montant minimal prévu dans la loi. Ses justificatifs : « nombre de victimes », « abus de confiance et manipulation », « appât du gain (motivation) », « caractère intentionnel de l’infraction », « préjudice causé au marché », « nombre de protections d’assurance vendues à une même personne ».

Les mots frappent fort.

Aucun dirigeant de HGrégoire n’a voulu m’accorder d’entrevue. Dans une déclaration écrite, le détaillant assure qu’il prend « toutes allégations de cette nature très au sérieux ». Il ajoute : « les pratiques mentionnées dans les constats d’infraction vont à l’encontre de la philosophie de l’entreprise ».

Pour Martine Quirion, il ne fait aucun doute que HGrégoire doit payer le constat d’infraction de 17 520 $ découlant de son témoignage.

« Quand l’AMF m’a téléphoné et que j’ai épluché mon contrat, c’est là que j’ai réalisé que je payais pour une assurance vie depuis deux ans ! », m’a-t-elle raconté. Cette facture de 2600 $, cachée dans ses paiements, « c’est la goutte qui a fait déborder le vase ». Car en plus, son Sante Fe 2013 est « un citron » qui s’est retrouvé au garage un mois après l’achat et maintes fois depuis. Heureusement, en appelant l’Industrielle Alliance, elle a pu mettre fin à la police.

HGrégoire a aussi vendu des assurances vie et invalidité à Francesca par un soir de janvier, sans la prévenir. « J’étais fatiguée. J’ai fait confiance en me disant que c’était HGrégoire. J’ai été nounoune. J’ai signé sans trop regarder. J’ai honte. » Prix : 1880 $, pour une Kia Rio de 7800 $.

Dès le lendemain matin, à 9 h, la dame est retournée voir l’équipe de vente. On lui a expliqué que les assurances étaient obligatoires, sinon le crédit ne passait pas. Elle ne l’a pas cru, vu sa situation financière. Et de toute manière, elle possédait déjà ce type d’assurance au boulot. C’est finalement un employé qui est venu à sa rescousse en cachette. Il lui a suggéré d’appeler l’assureur en Alberta pour tout annuler. Le chèque qu’elle a reçu ne lui a pas fait oublier sa mauvaise expérience.

Francesca avait raison, l’assurance vie, santé et perte d’emploi n’est pas souvent demandée par les prêteurs. Et quand c’est le cas, on peut magasiner en contactant un courtier. Cela permet d’obtenir de bien meilleurs tarifs, comme l’a démontré une étude de l’AMF, puisque les employés des concessionnaires empochent de juteuses commissions.

C’est simple : les concessionnaires ne peuvent pas forcer un client à contracter les assurances qu’ils proposent.

Consultez les conseils de l’AMF avant d’acheter une voiture

L’AMF assure qu’elle met tout en œuvre depuis 2009 pour assainir l’industrie automobile en multipliant les avis et règlements. « Si on peut sanctionner des pratiques pour les faire cesser, on le fait », jure Jean-François Fortin, directeur général du contrôle des marchés. Évidemment, on ne peut pas mettre toutes les entreprises dans le même bateau, insistons là-dessus. Mais il reste du chemin à faire.

D’ailleurs, l’AMF recommande aux consommateurs de toujours être « vigilants » et de « poser des questions ». Le problème, c’est que les assurances et les garanties prolongées sont des produits complexes qui en intimident plus d’un. Aussi faut-il savoir de quoi se méfier, même lors de l’achat d’une voiture neuve.

Prenez cette cliente de Volkswagen dont je vous ai parlé en juillet. Après avoir roulé quelques kilomètres avec sa nouvelle voiture, elle a découvert que celle-ci n’était pas munie de toutes les options prévues au contrat. Pas d'« assistance au freinage d’urgence » ni de « détection des angles morts avec avertissement de circulation ». Comment aurait-elle pu savoir qu’elle devait demander au vendeur si son nouveau Taos aurait tous ses morceaux ?

Certes, il importe d’être un consommateur averti. Mais quel fardeau d’être toujours sur ses gardes…

Ici comme ailleurs dans le monde, on fait des blagues sur les vendeurs de voitures et on les caricature. Mais force est de constater qu’eux aussi rient parfois des consommateurs.

(Re) lisez le texte « Gare aux voitures neuves… amputées »