Selon Bloomberg, la Californie pourrait manquer de tomates pour la transformation en raison d’une pénurie d’eau dans sa région. Un rapport prétend que, dans les prochains mois, on assistera à une rareté de sauce à spaghetti et de salsa. Cela reste à voir, mais notre lien avec nos importations agroalimentaires change assurément.

La saison des tomates bat son plein, et les Canadiens adorent déguster leurs tomates de multiples façons. Ce légume-fruit remporte la palme de la popularité à l’épicerie. En moyenne, une personne au Canada consomme de 6 à 7 kg de tomates par année, selon Agriculture et Agroalimentaire Canada. L’équivalent d’un peu plus de 12 kg de tomates fraîches et transformées par habitant se retrouve à la disposition des Canadiens annuellement.

Les tomates représentent la cinquième culture maraîchère en importance au Canada, après le maïs, les haricots, les pois et les carottes. Cependant, pour les légumes cultivés en serre, les tomates occupent la première place au pays. Après les poivrons, ce sont les tomates que nos propres producteurs d’ici exportent le plus. Mais nous importons aussi beaucoup de tomates, principalement du Mexique et des États-Unis. Étonnamment, les taux d’importation et d’exportation se ressemblent beaucoup au Canada. De nombreuses provinces ont fourni des efforts pour augmenter le nombre de projets d’agriculture à environnement contrôlé, afin de produire davantage de denrées alimentaires au pays.

La Californie fournit beaucoup de tomates transformées au Canada, car c’est le plus grand producteur au monde. Sauces, salsa, soupes, etc. – de nombreux produits à base de tomates se retrouvent sur les tablettes de nos épiceries canadiennes. Mais tout le monde sait maintenant que la Californie connaît des difficultés avec son approvisionnement en eau. L’eau devient cruellement rare là-bas.

Des rapports récents suggèrent que la Californie connaît la pire sécheresse depuis 1200 ans, affectant de nombreuses cultures, y compris les tomates. Certains spéculent même que nous pourrions manquer de sauce à spaghetti. Les prix peuvent augmenter, en effet, mais il s’avère très peu probable que le Canada manque de sauce à spaghetti. D’une part, nous avons d’excellents produits locaux en grand nombre, souvent négligés par les consommateurs qui ne recherchent que certaines marques. D’autre part, nous produisons beaucoup de tomates ici au Canada, et les sauces restent très faciles à préparer. Nous devrions nous préoccuper de beaucoup de choses, mais pas de manquer de sauce à spaghetti.

Cela dit, les difficultés que connaît la Californie entraîneront des changements massifs dans la façon dont nous cultivons, importons et exportons des produits de base – la façon de consommer se modifie chaque jour, et ce changement s’opère très rapidement.

En raison d’un marché carbonique qui se monnaye de plus en plus, dépenser de l’énergie pour produire, transformer et transporter des aliments deviendra plus coûteux. Mettre un prix sur le carbone incitera les entreprises à élaborer une stratégie différente. Les producteurs et les transformateurs se voient maintenant obligés de penser différemment à la façon dont ils desservent les marchés, y compris le Canada. En d’autres termes, notre monde agroalimentaire rétrécit et s’amenuise.

Voici un exemple concret : cet été, nous avons appris que le géant californien Driscoll’s avait signé un partenariat avec des producteurs pour cultiver des baies ici même au Canada. Driscoll’s, l’un des plus grands producteurs de fruits au monde, a dû faire face à des problèmes de pénurie d’eau en Californie ces dernières années. Les bases d’une entreprise changent pour des compagnies comme Driscoll’s. Non seulement elle doit se rapprocher de ses marchés, mais en plus, elle a besoin de ressources précieuses qui autrefois abondaient en Californie. Les changements climatiques modifient sans aucun doute l’économie de la culture de la tomate. On assiste à un parfait exemple d’activité de délocalisation. Nous entendrons parler à coup sûr d’autres mouvements de ce type dans les années à venir.

Alors que les agriculteurs canadiens de la Colombie-Britannique et du Québec s’occupent de cultiver pour Driscoll’s, ils ont également reçu le savoir-faire de Driscoll’s, y compris la génétique et l’expertise croissante. Cela vaut beaucoup d’argent et de temps.

La décision rusée de Driscoll’s permettra en fait aux producteurs et aux consommateurs canadiens d’y gagner. À l’avenir, le commerce agricole mondial ne se limitera pas nécessairement au commerce des bananes, du bœuf, du blé et des pommes. Il s’agira de propriété intellectuelle, de génétique et d’image de marque, du tangible au moins tangible.

C’est le seul type de mondialisation que nous continuerons de voir dans les années à venir.