L’utilisation d’applications de l’intelligence artificielle (IA) dans les processus d’affaires des entreprises québécoises n’est intégrée que par 6 % d’entre elles. Malgré un écosystème foisonnant de solutions technologiques avancées, créées et développées chez nous, cette expertise sous-utilisée doit mieux se faire connaître afin de favoriser rapidement une meilleure pénétration de l’IA pour assurer une véritable optimisation de ses retombées sur l’ensemble de l’économie.

À elles seules, la réduction des écarts de productivité entre les entreprises québécoises et leurs semblables en Amérique du Nord ainsi que la persistante pénurie de main-d’œuvre qui freine l’activité économique au Québec devraient être deux puissants arguments de motivation pour accélérer l’implantation de l’IA dans les processus d’affaires de nos entreprises.

Au milieu des années 2010, les avancées des chercheurs québécois en intelligence artificielle et plus particulièrement en apprentissage profond ont amené les grands acteurs mondiaux du numérique à venir investir à Montréal dans la création de centres de recherche.

Tour à tour, Google, Microsoft, Facebook, Samsung, DeepMind et Thales ont notamment implanté une antenne à Montréal pour y profiter de la concentration de talents et contribuer à son attractivité et à la consolidation de l’effervescence ambiante.

Depuis deux ans toutefois, malgré l’inscription en Bourse de vedettes locales telles que Lightspeed, Dialogue ou Coveo, on a l’impression d’entendre moins parler des avancées de l’IA et encore moins de sa contribution à l’émancipation plus généralisée des entreprises québécoises.

C’est justement la raison pour laquelle le gouvernement québécois a décidé d’investir, en 2018, 100 millions pour mieux articuler la stratégie de l’écosystème de l’intelligence artificielle. C’est dans cette volonté d’ancrer plus solidement l’IA dans l’économie québécoise que l’organisme Forum IA a été créé.

« Notre mandat est de mieux coordonner les acteurs du secteur de l’IA pour permettre au plus grand nombre possible d’entrepreneurs et d’entreprises de s’y retrouver dans cet écosystème et d’en tirer les plus grands bénéfices pour leur organisation », m’explique Marie-Paule Jeansonne, PDG de l’OBNL Forum IA, mise sur pied en septembre 2020.

Qu’est-ce qu’il faut faire pour implanter des solutions d’intelligence artificielle dans ses procédés industriels, quelles sont les ressources disponibles, qui consulter pour avoir les bons diagnostics et les bons outils qui vont permettre d’augmenter la productivité de son organisation ? Voilà autant de questions auxquelles peut répondre Forum IA.

« On est dans une deuxième phase de déploiement de l’IA à Montréal et au Québec. La première a été la mise en place de la recherche opérationnelle, notamment en apprentissage profond, qui a permis d’attirer et de conserver les talents. Là, il faut bâtir là-dessus », souligne Mme Jeansonne.

Vitrine, études et émulation

Forum IA prévoit bientôt mettre à la disposition des entreprises de tous les secteurs d’activité une vitrine qui leur donnera accès aux principaux acteurs de l’IA au Québec.

« On parle de 600 entreprises et instituts de recherche, d’incubateurs ou de firmes de capital de risque qui sont actifs dans le secteur de l’intelligence artificielle et qui peuvent offrir leurs solutions, leurs produits ou leur expertise pour soutenir les projets d’implantation de l’IA dans les entreprises qui souhaitent augmenter leur productivité et mieux gérer leurs effectifs », indique Marie-Paule Jeansonne.

Il y a évidemment des secteurs porteurs comme le bioalimentaire, la santé, les finances, le manufacturier et les transports. Forum IA guidera par exemple les entreprises qui veulent raffermir leur chaîne d’approvisionnement vers son partenaire Scale AI qui soutient financièrement des projets innovants dans cette activité spécifique.

« On va rendre publique prochainement une étude sur la place qu’occupe l’écosystème québécois de l’IA par rapport au reste du monde et une autre sur les retombées économiques que génère ce même écosystème de l’intelligence artificielle au Québec », poursuit la PDG.

On sait déjà que depuis 2017, il s’est réalisé pour plus de 1,5 milliard de financements privés dans l’écosystème de l’IA, mais le Québec ne doit pas baisser la cadence s’il veut maintenir sa position concurrentielle.

« À eux seuls, le Mila (l’Institut québécois de l’intelligence artificielle), Ivado (l’Institut de valorisation des données) et Scale AI (la super grappe de l’intelligence artificielle du Canada) sont associés à des projets d’implantation de l’IA dans plus de 300 entreprises. Il faut poursuivre dans cette voie et sensibiliser le plus grand nombre de gestionnaires d’entreprises à utiliser l’IA dans leur processus industriel », insiste la PDG.

Le Forum IA est associé à tous les principaux centres universitaires du Québec de même qu’au réseau de plus de 50 institutions collégiales qui font partie des Centres collégiaux de transfert de technologie, partout sur le territoire du Québec.

Selon Statistique Canada, il y avait 238 000 postes de disponibles et non pourvus au 3e trimestre 2021 au Québec. Avec la fin annoncée des mesures sanitaires pour le 14 mars prochain, il est fort probable que ce nombre grandisse encore.

Une meilleure gestion appuyée par un peu d’intelligence artificielle permettrait d’atténuer cette carence, de réduire la pression des entreprises en mal de main-d’œuvre et d’optimiser la croissance économique québécoise dans son ensemble.