Si la température le permet, beaucoup de citadins vont vouloir profiter du week-end pour prendre le chemin de la campagne afin d’aller contempler la traditionnelle et toujours aussi fascinante mutation d’octobre lorsque nos forêts se drapent de rouge avant de se dévêtir complètement pour leur longue hibernation. Octobre est un mois envoûtant, mais il l’est nettement moins quand ce sont les cours boursiers qui passent du vert au rouge.

Si je me permets aujourd’hui de faire cette corrélation entre la beauté automnale de la nature en octobre et les risques d’une décoloration soudaine des marchés, c’est que le mois d’octobre est indissociablement lié aux mémorables krachs boursiers de 1929 et de 1987.

Rassurez-vous, ces deux évènements spectaculaires, qui ont marqué à tout jamais les esprits, ne sont pas sur le point de se reproduire, mais il n’en reste pas moins qu’on aborde toujours le mois d’octobre avec une certaine appréhension.

Pourtant, historiquement, le mois d’octobre n’est pas pire que les autres en matière de rendements produits, mais c’est un mois où l’on observe une plus grande volatilité des marchés.

Et c’est pourquoi il sera intéressant de voir comment ceux-ci vont se comporter, particulièrement les marchés nord-américains, au cours des prochains jours, puisque leurs indices viennent d’encaisser leur pire performance mensuelle de la dernière année.

En septembre, les indices Dow Jones, S&P 500 et NASDAQ ont respectivement reculé de 4,2 %, 4,7 % et 5,3 %. L’indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto a pour sa part subi une dévaluation mensuelle moindre de 2,9 %.

Malgré ces reculs, il faut rappeler que les quatre indices nord-américains affichaient toujours au 30 septembre des rendements supérieurs à 20 % au cours des 12 derniers mois, notamment de 29 % pour le NASDAQ et de 24,4 % pour le TSX.

Pour l’indice S&P 500, il s’agissait du premier mois de repli en sept mois, tandis que l’indice Dow Jones vient d’afficher un premier recul trimestriel depuis la forte chute boursière du premier trimestre de 2020, lorsque la pandémie a tout ravagé sur son passage.

Des indicateurs de surchauffe

Cette déconvenue boursière de septembre est en grande partie attribuable aux craintes d’une éventuelle flambée de l’inflation, aux possibles répercussions de la faillite du géant chinois Evergrande et au débat entourant le déplafonnement de la dette des États-Unis, nous rappelle la Banque Nationale dans sa dernière revue des marchés.

Tous ces éléments distillent de l’incertitude chez les investisseurs, on le comprend bien, mais il y a d’autres facteurs qui tendent à démontrer que la marmite commence à surchauffer.

Le prix du pétrole est à son niveau le plus élevé des cinq dernières années. À l’heure où l’on n’entend parler que de l’urgence de décarboner l’économie, le prix du pétrole américain se retrouve au-dessus des 75 $ US le baril, alors qu’il se situait à 41 $ US il y a un an, et à 33 $ US en avril 2020.

Les prix de l’aluminium et du nickel sont un autre bel exemple d’atteinte de point limite. Il y a deux semaines, la tonne de nickel a franchi la marque des 20 000 $ US, un sommet depuis 2014, alors que la tonne d’aluminium a passé la barre des 3000 $ US pour se replier légèrement depuis à 2850 $ US, ce qui reste des prix jamais vus depuis 2008, l’année-frontière de la grande récession mondiale de 2009.

Petit rappel historique. Durant l’effondrement boursier de 2008, qui s’est étalé sur quatre mois, de septembre à décembre, c’est en octobre que la Bourse américaine a enregistré sa plus forte chute avec une baisse de 14,5 % de l’indice S&P 500, qui a perdu 37 % de sa valeur au total.

Ce qui complique la situation actuelle et ne facilite pas la lecture de ce que nous réservent les prochains mois de reprise économique post-choc pandémique, c’est de savoir jusqu’où la portée de l’action des gouvernements peut aller.

On le voit aux États-Unis, le président Biden peine à faire accepter au sein de son propre parti son plan de relance socio-économique de plusieurs milliers de milliards de dollars.

C’est beaucoup d’argent et on sollicite la machine à imprimer des billets verts comme jamais on ne l’a fait auparavant. Cette injection massive de capitaux dans l’économie va invariablement générer de l’inflation et se répercuter sur le pouvoir d’achat des consommateurs américains, les moteurs de la croissance économique aux États-Unis.

Le gouvernement américain doit s’entendre d’ici au 18 octobre pour permettre le relèvement du plafond de la dette américaine. Entre-temps, il sera intéressant de suivre l’évolution des marchés et leur perception de ce que l’avenir nous réserve.