Je sais, la prévision est très audacieuse, voire trop. N’empêche, à scruter les chiffres, on constate que le nombre de cas de COVID-19 semble avoir atteint un sommet cette semaine. Et qu’on voit poindre des jours meilleurs à l’horizon.

Cette fois, le fléchissement de la courbe ne s’explique pas par le confinement généralisé, ni par le couvre-feu, ni par la saison estivale. Au contraire, la population circule plus qu’elle ne l’avait fait depuis 18 mois, et malgré tout, la COVID-19 ralentit sa progression.

D’où la question : arrivons-nous à un point où ceux qui devaient contracter le virus – surtout les non-vaccinés – l’ont contracté, essentiellement ? La vaccination est-elle en train d’étouffer la quatrième vague au Québec ?

Pour mieux en juger, jetons un œil aux deux dernières vagues, où les cas et les hospitalisations ont été adéquatement recensés, contrairement à la première vague.

Le 4 janvier, le Québec atteignait le sommet de la deuxième vague, avec 2589 cas par jour, en moyenne1. Le point culminant des hospitalisations suit toujours le sommet des cas observés de quelques jours, comme on peut s’y attendre. À la deuxième vague, c’est arrivé 9 jours plus tard, le 13 janvier, avec une moyenne de 1287 hospitalisations.

Ce scénario s’est répété lors de la troisième vague, avec un sommet de 1614 cas quotidiens le 10 avril et celui des hospitalisations, 10 jours plus tard, le 20 avril (538). Et bien que les cas étaient nettement sous-estimés lors de la première vague, l’écart entre le sommet des cas et celui des hospitalisations était encore une fois de 9 jours.

Or voilà, le sommet des cas de cette quatrième vague semble avoir été atteint le 12 septembre, avec 772, en moyenne sur 7 jours. Le recul, depuis, ne s’explique pas par une seule région, mais par trois, au moins, soit Laval, Lanaudière et l’Outaouais.

Et nous voilà deux semaines après ce sommet, ce qui voudrait dire que le nombre d’hospitalisations devrait maintenant commencer à reculer, progressivement, permettant aux infirmières de respirer.

Je sais, la prédiction est audacieuse. Elle suppose que nos deux doses de vaccin résisteront encore de nombreux mois et qu’un autre variant ne viendra pas déjouer les plans. Plus rien ne nous surprend avec cette foutue pandémie.

N’empêche, l’Ontario vit une tendance semblable. Et avec les trois quarts de la population vaccinée, une quatrième vague qui s’essouffle, des enfants bientôt admissibles à la vaccination et un passeport vaccinal qui limite la propagation, on peut espérer voir le bout du tunnel, enfin.

1. Il s’agit de la moyenne mobile sur 7 jours, qui capte mieux les tendances.

Les deux Canada économiques

En pleine pénurie de main-d’œuvre, vouloir créer 1 million d’emplois est déconnecté.

Comment, alors, deux chefs de parti ont-ils pu faire une telle promesse pendant la campagne électorale ? se sont interrogés bien des observateurs, dont l’Institut du Québec.

Pour ma part, je me suis demandé s’il n’y avait pas deux Canada pour le marché du travail ces dernières années. Si le Québec, avec sa croissance économique et sa rareté de main-d’œuvre, ne se distinguait pas du reste du Canada, ce qui expliquerait qu’Erin O’Toole et Jagmeet Singh, qui vivent hors Québec, aient pu faire de telles promesses, dont s’est moqué Yves-François Blanchet, du Bloc.

Deux statistiques économiques importantes publiées cette semaine ont semblé confirmer cette hypothèse, du moins à première vue.

Jeudi, l’Institut de la statistique du Québec nous apprenait que l’économie du Québec avait progressé de 3,4 % au deuxième trimestre de 2021 par rapport au trimestre précédent. Ce bond du produit intérieur brut (PIB) réel suivait une hausse de 7,7 % au premier trimestre. Wow !

Pendant ce temps, le reste du Canada subissait un recul de son PIB de 2,2 % au deuxième trimestre et avait une croissance bien inférieure au Québec au premier trimestre (5 % contre 7,7 %), m’indique le service économique de la Banque Nationale. Deux réalités économiques passablement différentes, bref.

L’avant-veille, le mardi 21 septembre, le Québec semblait encore faire bande à part dans les données de Statistique Canada sur les postes vacants du deuxième trimestre, qui est l’indicateur phare de la pénurie.

Le taux de postes vacants au Québec était de 5,3 %, contre 4,4 % dans le reste du Canada. Seule la Colombie-Britannique a un problème plus sévère, avec un taux de 5,4 %. L’Ontario est à 4,3 %, et l’Alberta, à 3,7 %.

C’est au deuxième trimestre de 2019 que le Québec a dépassé le reste du Canada pour le taux de postes vacants, et l’écart s’est accentué depuis. En nombre absolu, le Québec comptait 194 145 postes vacants le printemps dernier, ce qui constitue un sommet depuis que des données sont compilées, en 2015 (le chiffre du printemps 2015 était trois fois moindre, à 70 300 postes vacants).

Cela dit, les postes vacants sont tout de même en hausse partout dans les autres grandes provinces canadiennes par rapport à 2019. Depuis deux ans, le taux de postes vacants a bondi de 0,7 point en Alberta et de 1,0 point en Ontario, contre 1,5 point au Québec.

Étonnamment, malgré cet écart du Québec et la sévérité de la pénurie, le niveau des salaires ne semble pas grimper aussi rapidement qu’ailleurs au Canada.

Au Québec, les employeurs proposaient un salaire horaire moyen de 21,80 $ pour les postes vacants, contre 23,23 $ dans le reste du Canada, selon Statistique Canada. Le salaire horaire offert a bondi de 1,45 $ au Québec depuis trois ans, en comparaison de 2 $ dans le reste du Canada.

Pour être juste, il faudrait dire que cet écart entre les deux solitudes se maintient autour de 1,62 $ l’heure depuis trois ans, alors qu’il était de 0,51 $ au cours des trois années précédentes.

Nul doute qu’il sera intéressant de suivre la tendance.