(Montréal) Saputo a quadruplé son bénéfice net au cours de l’hiver, mais les consommateurs démontrent moins d’appétit pour les produits laitiers depuis « cinq à six semaines », prévient le patron de l’entreprise montréalaise. L’action perd 11 %.

L’entreprise montréalaise a dévoilé des résultats supérieurs aux attentes des analystes au quatrième trimestre de son exercice 2023, clos le 31 mars, mais les conditions se sont détériorées depuis.

« Je soulignerais deux risques : le premier est la demande qui est plus faible qu’anticipé, et je dirais que c’est la même chose pour les prix aux États-Unis et à l’international », commente le président et chef de la direction, Lino A. Saputo, vendredi, lors d’une téléconférence avec les analystes financiers.

Aux États-Unis, le prix moyen du bloc a connu une baisse « importante », explique M. Saputo. « C’était près de 1,85 $ US quand on a commencé le trimestre (avril) et c’est maintenant à 1,43 $ US. »

La situation s’améliore toutefois par rapport aux difficultés de recrutement, selon le chef de l’exploitation pour l’Amérique du Nord, Carl Colizza. En février 2022, l’entreprise rapportait que 10 % de ses postes n’étaient pas pourvus aux États-Unis. « Nous avons amélioré le recrutement et la rétention. […] Nous profitons de cette stabilité que nous constatons dans nos opérations. »

L’envers de la médaille est que les concurrents de Saputo ont fait de même. « Nos concurrents ont, eux aussi, investi dans leurs activités, constate M. Colizza. On se trouve dans un environnement où ils performent mieux qu’avant à un moment où la demande s’affaiblit. »

Prévisions maintenues

Malgré les vents défavorables, la direction maintient ses prévisions financières, mais ajuste sa stratégie pour y parvenir d’ici la fin de son exercice 2025 (clos le 31 mars 2025). Elle estime désormais qu’une plus grande part de sa croissance sera attribuable à l’optimisation de son réseau.

L’optimisation permet de produire plus de produits dans moins d’usines, explique M. Saputo. Cette augmentation des volumes amène un « défi » au moment où la demande s’affaiblit, mais le dirigeant croit que cette tendance est temporaire. « La demande va revenir et, quand elle reviendra, nous aurons les infrastructures pour générer la valeur que nous avions anticipée. »

Il précise que l’entreprise devrait récolter les fruits de certains investissements. Ces gains d’efficacité permettent d’envisager une croissance « modeste » de la rentabilité au premier trimestre (clos le 30 juin), malgré une diminution de la demande, selon lui.

Le plus grand accent mis sur l’optimisation des activités laisse croire à l’analyste Irene Nattel, de RBC Marchés des capitaux, que les objectifs du plan stratégique 2025 sont atteignables. « La détérioration du marché des produits laitiers nous rend prudente, mais la décision d’ajuster les principaux éléments du plan vers ce qui est contrôlable est opportune et astucieuse. »

M. Saputo a aussi mentionné que l’heure n’était pas aux acquisitions au moment où l’entreprise se concentre sur l’exécution de son plan stratégique 2025 dans un contexte d’affaires difficile. « Notre assiette est pleine », a-t-il répondu.

Résultats supérieurs aux attentes

Les commentaires de la direction viennent éclipser des résultats supérieurs aux attentes des analystes au quatrième clos le 31 mars.

La société montréalaise a quadruplé son bénéfice net dans les trois derniers mois de son exercice 2023 à 159 millions. Les revenus, pour leur part, progressent de 12,9 %, à 4,47 milliards.

Les analystes s’attendaient en moyenne à un bénéfice ajusté par action de 42 cents, ainsi qu’à des revenus de 4,40 milliards, selon les prévisions recueillies par la firme de données financières Refinitiv.

M. Saputo souligne que le prix des marchandises et la demande des marchés internationaux ont été favorables. Des améliorations de la chaîne d’approvisionnement ont aussi permis d’accroître la production, « ce qui nous a permis d’améliorer encore notre capacité d’approvisionner nos clients, en particulier aux États-Unis ».

L’action de Saputo a terminé la séance en baisse de 3,89 $, ou 11,2 %, à 30,93 $ vendredi à la Bourse de Toronto.