(Halifax) Au cours de ses dernières années d’école secondaire, les enseignants ont averti Ainsley Wallace et ses camarades de classe qu’aller à l’université ne leur garantirait pas un emploi de rêve.

« Ils nous ont un peu effrayés et nous ont dit qu’obtenir un diplôme ne signifiait pas automatiquement obtenir un bon emploi », se souvient Mme Wallace, originaire d’Ottawa et maintenant étudiante à l’Université Dalhousie, à Halifax.

« J’ai décidé de postuler pour un programme coopératif afin de pouvoir obtenir mon diplôme avec une certaine expérience de travail et être en mesure de concourir pour de meilleurs emplois. »

Le Canada est un chef de file de l’enseignement coopératif, un modèle d’apprentissage qui alterne entre des cours universitaires et des stages rémunérés.

Il s’agit d’une forme d’enseignement dit intégré au travail, un terme générique qui comprend également d’autres approches d’enseignement expérientiel comme les apprentissages, les stages et les stages cliniques.

Les programmes d’enseignement coopératifs peuvent varier d’un bout à l’autre du pays, mais tous impliquent un travail lié au domaine d’études de l’étudiant.

Les employeurs ont ainsi accès à de jeunes talents abordables et énergiques, tandis que les étudiants acquièrent une expérience pratique et gagnent de l’argent.

« C’est gagner en apprenant », explique Robert Wooden, directeur des services de carrière en gestion à l’Université Dalhousie. « On apprend en classe, mais on gagne également un revenu pendant les stages. »

Plus attrayant avec la hausse des coûts

La hausse du coût de la vie et celle des droits de scolarité ont rendu les programmes coopératifs de plus en plus attrayants pour les étudiants.

Les droits de scolarité ont presque doublé au cours des 20 dernières années, selon Statistique Canada, tandis que les coûts du logement et de la nourriture et d’autres dépenses de base ont également augmenté de façon draconienne.

Mme Wallace, qui travaille actuellement pour l’organisation de mentorat EnPoint, à Halifax, en tant que stagiaire en marketing et en croissance des affaires, affirme que pouvoir gagner de l’argent tout en fréquentant l’université était un attrait majeur.

« Je suis entièrement sur les prêts étudiants, souligne-t-elle. Cela a vraiment été très utile de pouvoir gagner un revenu pendant quatre mois d’affilée pendant ces stages. »

S’assurer que les étudiants sont payés est l’une des exigences de l’agrément coopératif, précise M. Wooden, qui préside également Enseignement coopératif et apprentissage intégré au travail (ECAIT Canada).

« Les étudiants coopératifs ne travaillent pas gratuitement, assure-t-il. De nos jours, l’université coûte trop cher. Les organisations qui cherchent à profiter du travail étudiant non rémunéré – les programmes coopératifs ne sont pas intéressés par cela. »

Bien qu’ils permettent aux étudiants de gagner de l’argent, les programmes coopératifs prennent souvent plus de temps à terminer.

« En règle générale, les programmes coopératifs prennent plus de temps, mais on obtient son diplôme avec une année d’expérience de travail pertinente, souligne M. Wooden. C’est beaucoup plus puissant sur un CV qu’un diplôme et une expérience de tonte de pelouses pendant trois étés. »

Les entreprises embauchent des étudiants coopératifs afin d’amener de nouvelles idées et de jeunes travailleurs sur les lieux de travail.

« Les employeurs aiment le modèle coopératif parce qu’ils le voient comme un vivier de talents », explique Alice Hsiung, gestionnaire des projets et des activités de développement de carrière au Centennial College de Toronto, qui offre des programmes coopératifs aux étudiants dans différentes disciplines, y compris les affaires, la technologie de l’ingénierie, les sciences appliquées et le transport.

« Certains offrent même aux étudiants des emplois à temps partiel lorsqu’ils retournent aux études à la fin d’un trimestre, et des postes à temps plein une fois qu’ils ont obtenu leur diplôme. »

Bien que les programmes d’enseignement coopératifs soient à l’avant-plan dans le contexte de la hausse du coût de la vie, ils ont une longue histoire au Canada.

L’Université de Waterloo offre des programmes coopératifs depuis sa fondation, il y a 65 ans.

Son programme coopératif a attiré l’attention du monde entier lors de l’essor de BlackBerry, anciennement connue sous le nom de Research In Motion, qui s’est largement appuyée sur les talents en ingénierie et en informatique de l’école.

Mais les programmes coopératifs ne sont pas réservés aux ingénieurs et aux étudiants en informatique, assure Norah McRae, vice-rectrice de l’enseignement coopératif et expérientiel à l’Université de Waterloo.

Chaque programme académique des six facultés de l’école propose un programme coopératif — facultatif dans certains cas, obligatoire dans d’autres — avec environ 25 000 stages de travail l’année dernière seulement, note Mme McRae.

« C’est une occasion pour les étudiants de s’impliquer dans les lieux de travail et de prendre ce qu’ils apprennent en classe et de l’appliquer dans différents contextes, raconte-t-elle. Cela approfondit l’apprentissage par l’application. »

« Parfois, les meilleurs stages sont ceux où un étudiant dit : « Je déteste ça », car il vaut mieux comprendre cela après un stage de quatre mois que d’obtenir son diplôme, poursuivre une carrière dans ce domaine et réaliser, quelques années plus tard, que ce n’est pas pour soi », ajoute-t-elle.

Certains inconvénients

Pourtant, malgré les avantages des programmes coopératifs, ils comportent certains inconvénients.

Parfois, les offres d’emploi sont à des endroits éloignés de l’établissement d’enseignement.

« Si on est un étudiant en finance et qu’on souhaite travailler sur les marchés financiers, le seul endroit où on peut vraiment se lancer dans la vente et les négociations est le centre-ville de Toronto », observe M. Wooden.

« Si on est un étudiant en génie industriel, on ne va pas sortir de son appartement et se rendre au travail à pied. Il n’y a pas d’usine de fabrication au centre-ville d’Halifax. »

Alors que certains employeurs ont commencé à offrir des conditions de travail hybrides ou à distance – et que d’autres offrent des avantages de déménagement – les étudiants des programmes coopératifs devront peut-être se déplacer pour acquérir de l’expérience, affirme-t-il.

En outre, les programmes coopératifs ne sont pas faciles.

Alors que les universités trouvent des employeurs qui cherchent à embaucher, partagent des offres d’emploi et offrent des outils pour aider les étudiants à rédiger leur CV et à se préparer aux entrevues, l’étudiant est responsable de s’engager dans un processus concurrentiel et de trouver un stage, explique Mme McRae.

« C’est un travail difficile, rappelle-t-elle. Personne, dans aucun programme coopératif au Canada, ne donnera un emploi (à ses étudiants). »