Les propriétaires de petites entreprises se sont réjouis d’une mesure du budget fédéral de mardi visant à réduire les frais de transaction des cartes de crédit, mais certains représentants de l’industrie affirment que cette décision ne permettra pas vraiment aux consommateurs d’économiser de l’argent.

Ottawa a indiqué avoir conclu des ententes avec Visa et Mastercard pour réduire ces frais d’un maximum de 27 % par rapport à leurs taux moyens actuels pour plus de 90 % des entreprises acceptant les cartes de crédit.

Le gouvernement calcule que cela permettra aux entreprises d’économiser 1 milliard sur cinq ans.

Le président de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), Dan Kelly, a estimé qu’il s’agissait de la « victoire la plus importante » du budget fédéral.

« L’utilisation des cartes de crédit vient de grimper en flèche ces dernières années et, par conséquent, les entreprises sont prises au piège pour une plus grande partie de leurs ventes », a souligné M. Kelly.

« Les marges étant limitées pour les petites entreprises, et les coûts augmentant à presque toutes les lignes de leur budget, un allégement à ce sujet serait extrêmement bénéfique. »

Rich Gowman est le propriétaire et exploitant d’Amplifiers Plus à Kitchener, en Ontario, une entreprise qui répare les amplificateurs de guitare et de basse. Il avait dû ajouter, depuis le début de l’année, un supplément pour les transactions réglées par carte de crédit, afin de couvrir les frais de transaction de son entreprise.

Son entreprise était pénalisée de trois à 5 % de plus lors des transactions réglées par carte de crédit, selon la carte utilisée, a-t-il expliqué

« Cela ne me faisait pas vraiment mal, mais c’était quand même des frais que je devais absorber et que je devais radier en tant que dépenses professionnelles », a-t-il affirmé.

« Si ces frais sont réduits, je pourrai réduire le supplément que je facture pour les cartes de crédit. »

Mais M. Kelly a souligné que certains détails étaient toujours manquants au sujet des petites entreprises qui seront admissibles à la baisse, et du moment à partir duquel elles pourront en profiter. Le montant que pourrait économiser chaque entreprise n’était pas clair non plus, a-t-il précisé.

« Nous croyons que ce sera une bonne affaire, mais il reste beaucoup de chemin à parcourir et nous espérons donc que nous aurons des annonces de suivi », a-t-il indiqué.

« Nous n’avons pas une vision complète de la nature exacte des réductions de taux. Les petites entreprises retiennent vraiment leur souffle, espérant voir des progrès […] bientôt afin de les aider à affronter la hausse de leurs coûts. »

Ottawa a indiqué que plus de détails, y compris les critères d’admissibilité pour les entreprises, seraient publiés dans les prochaines semaines. Le gouvernement a dit s’attendre à ce que la baisse des frais de transaction pour les petites entreprises ne se traduise pas par une hausse des frais pour d’autres entreprises.

Visa et Mastercard n’ont pas immédiatement répondu à une demande de commentaire sur l’accord.

Une occasion ratée, selon le CCCD

Pendant ce temps, le Conseil canadien du commerce de détail (CCCD) a minimisé l’importance de la décision, affirmant que les ménages paient en moyenne 600 $ par an en frais de transaction de carte de crédit et que l’annonce pourrait ne réduire ce montant que de 12 $ par an.

Il a estimé que cette décision réduirait les coûts des cartes de crédit pour les consommateurs d’un maximum de 2 %.

« Le gouvernement a raté une grande occasion de faire économiser de l’argent aux familles canadiennes en ces temps difficiles », a estimé la porte-parole, Michelle Wasylyshen, dans un communiqué de presse.

Elle a qualifié ces économies potentielles de « faibles à tous points de vue ».

« Les familles canadiennes auraient vraiment pu profiter d’une aide pour rendre leur vie plus abordable », a fait valoir Mme Wasylyshen.

Par ailleurs, l’annonce a été bien accueillie par l’industrie canadienne de la restauration.

Dans un communiqué, Restaurants Canada, une association représentant 30 000 membres, a souligné que l’accord était « une grande victoire pour notre secteur, car il laisse plus d’argent entre les mains des propriétaires d’entreprise » et ajouté qu’il attendait avec impatience que plus de détails soient partagés.

Le groupe a également salué la réduction, dans le budget, de la hausse prévue des droits d’accise fédéraux sur l’alcool. La taxe augmentera de 2,0 % le 1er avril, plutôt que de 6,3 %, comme prévu initialement.

L’Association des microbrasseries canadiennes pour sa part a estimé que la réduction arrivait « à un moment crucial ».

« Alors que le coût de tout ce qui entre dans la production de bière artisanale canadienne connaît des augmentations importantes, cela soulagera de nombreuses petites entreprises à travers le pays », a affirmé le président, Blair Berdusco.