(Montréal) Malgré les défis techniques liés à la commercialisation de la production de l’aluminium vert au Québec, le ministre de l’Économie et le syndicat Unifor ne semblent pas inquiets pour le développement de cette filière.

Le chef de la direction de la division Aluminium de Rio Tinto, Ivan Vella, avait déclaré que les fonderies du Québec étaient trop vieilles pour l’implantation d’une nouvelle technologie de production d’aluminium vert, selon des propos tenus en novembre, qui ont refait surface dans La Presse1.

Les déclarations de M. Vella n’ont pas découragé le ministre de l’Économie et de l’Innovation, Pierre Fitzgibbon, un grand partisan de la technologie. Il affirme avoir parlé au dirigeant après la publication de l’article et ne voit pas de raison de s’inquiéter.

« C’est une technologie qui va être très porteuse pour le Québec, répond-il en mêlée de presse. Il faut qu’ils regardent comment ils vont l’exécuter. Tout ce que j’ai dit dans le passé tient encore la route. »

Chez Unifor, qui représente des travailleurs de Rio Tinto, les déclarations ne semblent pas non plus inquiéter le syndicat. Le directeur québécois d’Unifor, Daniel Cloutier, raconte avoir rencontré la haute direction de l’entreprise en décembre, soit après les propos de M. Vella.

« Les discussions qu’on a eues, sans nous dire : “Ne craignez pas. L’investissement va se faire à Saguenay et tout le monde va être heureux”. Ils nous ont beaucoup parlé des avantages concurrentiels et comparatifs de la région et des usines. Ils nous ont parlé également de l’intérêt d’implanter la nouvelle technologie au Québec. »

Le chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon, estime que les contribuables sont en droit de s’attendre à ce que la technologie Elysis soit implantée au Québec en raison de l’important soutien financier de l’État et des tarifs d’électricité avantageux dont profite l’entreprise.

« J’attends du gouvernement et du ministre Fitzgibbon qu’ils soient fermes sur les attentes légitimes des citoyens, plaide le chef du PQ. Le nationalisme économique dont la CAQ se revendique ne peut pas tolérer qu’une multinationale agite, encore, des épouvantails de la sorte. »

Trop vieille ?

En novembre, M. Vella expliquait aux investisseurs les défis techniques que l’entreprise devra surmonter pour implanter la technologie Elysis au Québec.

Le centre de recherche et de développement industriel Elysis, une entreprise détenue conjointement par Alcoa et Rio Tinto, travaille au développement d’un aluminium sans carbone.

M. Vella a réitéré qu’il voit le développement de la nouvelle technologie comme une avenue de croissance. Trouver une fonderie pour la production commerciale ne serait toutefois pas une mince affaire, selon un enregistrement de l’évènement consulté par La Presse Canadienne. « Je pense que ça va être difficile, a-t-il dit. Il y a plusieurs enjeux. L’un des plus importants est que les fonderies prennent de l’âge. »

Il a souligné que l’usine d’Alma est « l’une des meilleures de nos installations », mais qu’elle a plus de 20 ans. « Faire un important investissement dans ces fonderies, en ce qui concerne la rénovation, amène certaines questions sur la rentabilité espérée. »

La main-d’œuvre représente aussi un enjeu. « L’autre défi est : “qu’est-ce que vous faites avec les employés pendant que vous fermez l’usine [pour la rénover] ?” C’est difficile à planifier. Nous ne sommes pas en train de dire que nous ne sommes pas capables de le faire. »

En réaction aux commentaires de son dirigeant, Rio Tinto a réitéré que l’entreprise est « profondément engagée » dans le développement d’Elysis. « Comme pour toute nouvelle technologie, nous gérons ce risque de près, en commençant par un déploiement à petite échelle, mais aussi en travaillant avec un sentiment d’urgence, car la demande de nos clients pour cet aluminium zéro carbone est très forte, commente l’entreprise dans une déclaration écrite. Nous ciblons notre premier déploiement dans nos opérations au Québec. »

1. (Re)lisez « Des installations trop vieilles pour la nouvelle technologie »