(Ottawa) Le débat sur le projet de loi du député Alain Therrien sera lancé à la Chambre des communes ce mercredi pour que les Québécois fassent une seule déclaration de revenus. Il s’agit d’une nouvelle tentative pour le Bloc québécois, qui avait vu un projet de loi similaire être rejeté par les libéraux et les néo-démocrates avant les élections fédérales de 2021.

« Quand c’est rendu qu’on n’est pas capables de traiter les passeports, l’immigration, Revenu Canada qui a de la difficulté à offrir des services à la population pour l’assurance-emploi, je pense qu’il y a une pénurie dans la fonction publique évidente », affirme en entrevue le député de La Prairie.

La pénurie de main-d’œuvre change la donne et pourrait permettre au Bloc québécois, à son avis, de convaincre le Nouveau Parti démocratique (NPD) d’appuyer le projet de loi C-239. Les libéraux et les néo-démocrates s’inquiétaient à l’époque des pertes d’emplois que l’instauration d’une déclaration de revenus unique gérée par le Québec aurait pu créer.

D’un côté, tu as une pénurie de travailleurs et de l’autre, tu paies deux personnes pour faire la même job. C’est un peu ridicule.

Alain Therrien, député du Bloc québécois

Les employés de Revenu Canada qui ne traiteraient plus les déclarations de revenus des Québécois pourraient alors être affectés à d’autres tâches, soit au sein du même ministère ou au sein d’un autre ministère. Alain Therrien estime qu’environ 3000 travailleurs seraient ainsi libérés.

Le député a produit un rapport pour l’Institut de recherche sur l’autodétermination des peuples et les indépendances nationales (IRAI) en collaboration avec l’ex-ministre des Finances du Québec Nicolas Marceau, de même que l’ex-député fédéral et professeur de droit Daniel Turp.

L’élimination du chevauchement mènerait à une économie de 287 millions pour le gouvernement fédéral, selon leur estimation. Le rapport évalue également que les contribuables qui font faire leurs impôts pourraient épargner 39 millions. Cette économie s’élèverait à 99 millions pour les entreprises.

L’Assemblée nationale avait adopté à l’unanimité en 2018 une motion pour réclamer une seule déclaration de revenus au lieu des deux que les Québécois doivent faire chaque année. Le premier ministre François Legault l’avait par la suite demandé lors de son premier mandat.

Calqué sur la TPS et la TVQ

Le Québec perçoit déjà, depuis 1991, la taxe sur les produits et services (TPS) et la taxe de vente du Québec (TVQ) et remet ensuite les sommes qui lui reviennent au gouvernement fédéral. Un modèle qui pourrait être calqué pour la déclaration de revenus unique.

S’il était adopté, le projet de loi C-239 autoriserait la ministre des Finances, Chrystia Freeland, à conclure un accord avec le gouvernement du Québec, ou de toute autre province, pour qu’il puisse percevoir l’impôt fédéral sur le revenu au nom d’Ottawa.

Il y a plein de raisons pour lesquelles ça doit être le Québec absolument qui soit le percepteur.

Alain Therrien

Cela permettrait de contrer la tendance du gouvernement fédéral à harmoniser des politiques fiscales des provinces et d’éviter que le parti au pouvoir refuse de percevoir l’argent s’il est en désaccord avec une politique provinciale.

Le Bloc québécois avait réussi à faire adopter son projet de loi en deuxième lecture à la Chambre des communes en 2021, mais il avait ensuite été rejeté en troisième lecture. Les libéraux avaient notamment fait valoir que la déclaration de revenus unique gérée par le Québec pourrait remettre en question la capacité du Canada à respecter ses obligations en vertu d’une centaine d’accords fiscaux internationaux si les autres signataires refusaient de les modifier.