Le grand retour attendu pour septembre 2021 n’a pas eu lieu et la rentrée de cet automne est à géométrie variable, avec une forte popularité pour la formule des deux jours par semaine au bureau. Pour l’heure, même dans les plus beaux bureaux de Montréal, les employés ne se bousculent pas au portillon.

Selon les observations de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, le modèle hybride de deux jours au bureau est le plus populaire. « Deux jours passent mieux que trois, qui deviennent la majorité des cinq journées au bureau. C’est moins facile à faire accepter, explique en entrevue Manon Poirier, directrice générale de l’Ordre. Les employés qui ont deux jours se disent : bien, au moins, la majorité du temps, je suis à la maison. »

La meilleure approche recommandée aux employeurs ?

C’est d’être en mode projet pilote. On teste, on voit ce qui fonctionne, on s’ajuste, on implique les employés plutôt qu’on annonce voici comment ça va se passer.

Manon Poirier, directrice générale de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés

Comme la majorité des employés reviennent sans « enthousiasme délirant », les employeurs doivent user de différentes stratégies pour que les moments au bureau aient une valeur ajoutée. Car les employés en ont, des arguments pour rester dans le confort de leur foyer, relate Manon Poirier : déménagement en région éloignée, inflation, circulation, construction, perte de temps et d’argent en déplacements.

Venir au bureau pour s’asseoir chacun à son poste derrière un ordinateur comme à la maison est l’enjeu de l’heure. « Les modèles les plus intéressants sont ceux qui visent à réorganiser le travail, à profiter des journées en présentiel pour en faire des moments de collaboration et d’échanges », soulève-t-elle.

Le retour des 5 à 7

Chez Sharethrough, qui laisse le libre choix à ses employés de travailler où bon leur semble, les jeudis ont la cote. En fin de journée, l’employeur sert de la bière et du vin. « On est beaucoup dans les évènements qui vont créer des liens entre les employés par opposition aux journées où on doit obligatoirement aller travailler au bureau, soutient Stacy Parkinson, vice-présidente, People & Culture. Quand il y a des dîners planifiés avec les équipes, des 5 à 7 ou des évènements, les employés viennent d’eux-mêmes. »

Tendance semblable chez Ubisoft. « Quand on a une raison de venir, on vient, affirme Antoine Leduc-Labelle, chef des relations publiques. Quand on a un 5 à 7, un spectacle, on vient. À Montréal, avec le “mercredi bien-être", massage, coupe de cheveux, bar à jus, on observe une augmentation du nombre d’employés sur place. »

Qu’en est-il des entreprises qui ont les plus beaux bureaux de Montréal ? Voient-elles leurs employés accourir vers les espaces invitants, lumineux et design ?

100 % choix

GSoft, qui a investi massivement dans des bureaux de rêve juste avant la pandémie, est passée d’une entreprise où tous les employés adoraient se voir au bureau à 100 % choix. « L’entreprise a choisi d’être numérique par défaut pour être inclusive », explique Claire Gaillard, directrice, communications internes et expériences employés. « S’il y a une seule personne à la maison, on fait la réunion par ordinateur. On ne veut pas que les gens se sentent obligés de venir au bureau. »

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, ARCHIVES LA PRESSE

GSoft, qui a investi massivement dans des bureaux de rêve juste avant la pandémie, est passée d’une entreprise où tous les employés adoraient se voir au bureau à 100 % choix.

Sur les 375 employés, de 40 à 120 par jour fréquentent de leur plein gré l’environnement de travail de la rue Richardson. GSoft requiert la présence de tous les employés seulement trois fois par année lors de grands évènements.

« La raison principale pour revenir, c’est pour se voir en personne, observe Claire Gaillard. Nos bureaux aident, parce qu’ils ne ressemblent pas aux clichés du bureau. »

Ubisoft, qui a toujours eu des locaux attractifs, vient justement de rénover une partie de ses bureaux au tout dernier goût du jour. Un concept où le confort est mis de l’avant. « Être bien comme à la maison et même mieux qu’à la maison », relate en entrevue Antoine Leduc-Labelle, chef des relations publiques.

PHOTO FOURNIE PAR UBISOFT

Ubisoft, qui a toujours eu des locaux attractifs, vient justement de rénover une partie de ses bureaux au tout dernier goût du jour. Un concept où le confort est mis de l’avant.

Chez Ubisoft, ce sont les gestionnaires, les employés et les équipes qui déterminent le meilleur endroit, au bureau ou à la maison, pour réaliser les meilleurs jeux au monde, affirme Louis-François Poiré, directeur de la santé globale.

Dans ce contexte, 65 % des 4000 employés vont au bureau au moins une fois par mois. Dans les bureaux de Sherbrooke, les 25 employés sont tous présents le mercredi. À Saguenay, 80 % des 90 employés viennent au bureau au moins une fois par semaine.

« Je pense que personne ne vient juste parce que le bureau est beau, soutient Louis-François Poiré. Les gens viennent pour être avec leurs collègues, pour être efficients. Si les bureaux ne sont pas beaux, adaptés et fonctionnels, les gens ne viendront pas du tout. Ce qui ressort des conversations c’est : “Je ne perdrai pas une heure dans le trafic pour venir ne pas être performant au bureau.” »

Confiance et flexibilité

« On voit une tendance d’employeurs qui veulent forcer les employés à revenir au bureau deux ou trois jours par semaine et on remarque que des candidats viennent vers nous, parce qu’il n’y a aucune obligation », observe de son côté Stacy Parkinson chez Sharethrough.

Les magnifiques bureaux de l’entreprise incitent bien sûr les employés à venir, mais ce sont surtout les évènements et la possibilité de voir des collègues qui les motivent, dit-elle.

Selon un sondage interne, 30 % des 156 employés ont l’intention de ne jamais venir au bureau et 70 % comptent y venir de un à trois jours par semaine.

Actuellement, les employés gèrent le changement, rappelle Manon Poirier. « En retournant au bureau, ils vont renouer avec leurs collègues et se rappeler que l’aspect social du travail est important. Peut-être que le retour va donner envie aux gens de revenir plus souvent », conclut-elle.