Soutenu par Québec à hauteur d’environ 75 millions, le projet de dirigeables-cargos piloté par Flying Whales, jugé irréaliste par certains, fait peu d’indifférents. Le scepticisme commencera bientôt à se dissiper, selon le directeur général de la filiale québécoise de l’entreprise, qui avance que les contribuables n’auront plus à délier les cordons de la bourse.

Installé au Québec depuis mai dernier, Arnaud Thioulouse anticipe un automne occupé. En plus d’« appuyer sur l’accélérateur » pour déterminer l’endroit qui accueillera l’usine d’assemblage en territoire québécois, il espère officialiser des partenariats qui confirmeront la raison d’être du projet.

Un avant-goût a été offert, mardi, à l’occasion du Forum innovation aérospatiale international d’Aéro Montréal. C’est Pratt & Whitney qui sera responsable de la conception, de la fabrication et de l’entretien de turbines pour le système de propulsion électrique du dirigeable LCA60T.

« Absolument, répond M. Thioulouse lorsqu’on lui demande s’il s’agit du genre d’entente qui rehausse la crédibilité des dirigeables-cargos. On veut finaliser nos contrats avec d’autres partenaires sur les systèmes majeurs nécessaires au développement. »

Ces partenaires sont Thales Canada (systèmes de commande de vol) et Delastek (cabine de pilotage), deux acteurs d’envergure de la grappe aérospatiale québécoise. Signe que les ententes devraient être finalisées prochainement, ces deux entreprises partageaient la même tribune que M. Thioulouse, mardi.

Pour aller loin

Établie en France, Flying Whales ambitionne de créer des dirigeables-cargos pour le transport de charges surdimensionnées – pales d’éoliennes, turbines hydrauliques, équipement minier, etc. –, jusqu’à 60 tonnes dans des endroits peu accessibles comme le Grand Nord québécois. L’aéronef sera d’abord doté d’une propulsion hybride, puis entièrement électrique.

Les premiers vols commerciaux sont prévus en 2025-2026, après la construction d’un site de production au Québec. Il s’agirait de la deuxième usine du genre pour Flying Whales, qui en exploite une en France.

« Aujourd’hui, nous avons une bonne trentaine de lettres d’intention signées avec des clients potentiels, affirme le directeur général de Flying Whales Québec. Nous pourrons les convertir en contrats dès que la fenêtre de planification des activités sera précisée. »

PHOTO FOURNIE PAR FLYING WHALES

Arnaud Thioulouse, directeur général de Flying Whales Québec

Les clients ne deviennent pas propriétaires du dirigeable. Ils payent pour le service de transport. Flying Whales exploitera également ce volet.

Après son investissement initial survenu en 2019, le gouvernement Legault avait réinjecté 55 millions, le 30 juin dernier, dans le capital-actions de la société française et celui de sa filiale québécoise. Ce troisième tour de financement était chiffré à 122 millions d’euros. L’État français, la Principauté de Monaco, ALIAD (le fonds d’Air Liquide) et le Groupe ADP sont aussi actionnaires.

Cette collecte de fonds nous permettra de mener à bien le développement jusqu’au premier vol. Au premier vol, on prévoit un appel public à l’épargne qui permettra de financer le développement des activités.

Arnaud Thioulouse, directeur général de Flying Whales Québec

C’est donc par l’entremise de la Bourse, plutôt qu’auprès de ses actionnaires actuels, que Flying Whales se financera pour la suite des choses, d’après le patron de sa filiale québécoise.

Encore beaucoup d’étapes

Une centaine d’emplois devraient être créés au Québec d’ici trois ans. L’équipe de Flying Whales Québec devrait tripler de taille au cours de la prochaine année pour atteindre une trentaine de personnes.

Ce n’est pas la première fois que le concept d’un dirigeable-cargo est mis de l’avant pour acheminer des marchandises vers des régions éloignées, rappelle Richard Aboulafia, directeur général d’AeroDynamic Advisory. Le créneau du cargo a la cote depuis le début de la pandémie et les prix du carburant sont élevés, ajoute l’analyste.

S’il estime que le jeu en vaut la chandelle, il apporte cependant un bémol.

« Le problème, c’est que l’on parle souvent d’un aller simple pour un voyage de transport, ce qui complique l’équation du côté de la rentabilité », dit M. Aboulafia.

La présence de Chinois dans le capital-actions de Flying Whales a eu pour effet de retarder le projet d’implantation de cette filiale au pays, à la suite d’une décision d’Investissement Canada.

Une version antérieure de ce texte soulignait que 85 millions de fonds publics avaient été injectés dans Flying Whales. La somme est plus d’environ 75 millions.

En savoir plus
  • 2012
    Année de fondation de Flying Whales
    source : flying whales