Le gouvernement fédéral, qui s’est engagé à suspendre la vente de voitures neuves à essence d’ici 2035, est sur la bonne voie, mais il reste encore du chemin à faire, selon les experts.

Les véhicules zéro émission (VZE) ont représenté 7,7 % des véhicules automobiles nouvellement immatriculés au premier trimestre de l’année, selon Statistique Canada. Les Canadiens se sont procuré plus de 26 000 VZE neufs lors des trois premiers mois de l’année, une augmentation de 50,5 % par rapport à la même période en 2021.

La proportion des VZE neufs sur la route a augmenté de 32 % entre le 1er trimestre 2020 et le 1er trimestre 2021. Elle a grimpé à 68 % entre le 1er trimestre 2021 et le 1er trimestre 2022, selon l’agence fédérale.

Si la tendance se maintient, la progression des ventes de VZE promet, affirme Daniel Breton, président et directeur général de Mobilité électrique Canada.

Rappelons que le gouvernement fédéral s’est fixé comme objectif que les ventes de VZE atteignent 20 % des ventes de véhicules neufs en 2026 et 60 % d’ici 2030. Ainsi, 100 % des ventes de véhicules légers seront à zéro émission d’ici 2035.

Ce n’est pas la demande qui manque : quelque 71 % des Canadiens considèrent la voiture électrique pour leur prochain achat, d’après un récent sondage mené pour KPMG. « Les Canadiens sont prêts à faire la transition », indique Andréanne Brazeau, analyste de mobilité chez Équiterre, qui estime que la hausse du prix de l’essence joue en faveur des voitures électriques.

De son côté, Robert Poëti, président et directeur général de la Corporation des concessionnaires d’automobiles du Québec (CCAQ), estime qu’il est encore tôt pour savoir si la cible gouvernementale sera atteinte en 2035. Une chose est certaine : les constructeurs automobiles sont incapables de fournir autant qu’ils le souhaiteraient, note-t-il.

Pression sur le marché

Transports Canada prévoit plus de 300 000 ventes de VZE en 2026, quelque 1 200 000 en 2030, et plus de 2 000 000 en 2035.

Des enjeux de production continuent d’occasionner une baisse de l’offre des VZE, affirme Robert Poëti. Une pénurie de main-d’œuvre et de pièces fragilise la chaîne d’approvisionnement et retarde les livraisons depuis la pandémie.

Les temps d’attente pour les modèles les plus prisés peuvent s’élever jusqu’à deux ans. Actuellement, ce n’est pas encourageant.

Robert Poëti, président et directeur général de la Corporation des concessionnaires d’automobiles du Québec

Outre la pénurie, l’offre de VZE est déséquilibrée au pays, affirme Daniel Breton. Les constructeurs automobiles privilégient les livraisons dans les régions où il y a une réglementation, afin d’éviter toute pénalité d’approvisionnement, explique-t-il.

À titre d’exemple, le Québec, qui réglemente le marché des véhicules à zéro émission, reçoit près de la moitié de tous les véhicules électriques vendus au Canada, indique Robert Poëti.

Selon Daniel Breton, une réglementation du marché automobile canadien sur les VZE obligerait les constructeurs à fournir aux territoires et aux provinces un minimum de voitures électriques à batterie ou hybrides rechargeables.

Au printemps dernier, Ottawa a d’ailleurs dévoilé son plan de réduction des émissions des gaz à effet de serre qui prévoit une norme « zéro émission » à l’échelle canadienne pour contraindre les constructeurs à bonifier leur offre de VZE. Cette norme doit être adoptée le plus rapidement possible pour assurer l’électrification des transports partout au pays, souligne Andréanne Brazeau. À l’heure actuelle, seulement le Québec et la Colombie-Britannique possèdent une réglementation sur l’offre des VZE.

Le Québec au premier rang

Les véhicules zéro émission représentaient 1 % des ventes du marché de l’automobile au Canada en 2017. Cette proportion a surpassé les 5 % l’an dernier, indique Statistique Canada.

Seulement au Québec, le nombre de VZE est passé de 6548 à 36 800, entre 2017 et 2021. Avec plus de 10 000 véhicules à zéro émission immatriculés entre janvier et mars 2022, la province se hisse au premier rang au pays.

Dans le cadre de son programme Roulez vert, les Québécois sont admissibles à un rabais de 7000 $ à l’achat d’une voiture électrique, auquel s’additionne une prime de 5000 $ du gouvernement fédéral.

Des obstacles liés aux infrastructures et à la technologie freinent des consommateurs qui souhaiteraient se lancer vers la voiture électrique. Le temps de recharge semble être le principal enjeu alors que plus de la moitié des Canadiens refusent d’attendre au-delà de 20 minutes pour recharger leur batterie. Quelque 79 % renoncent à faire la transition si l’automobile ne peut parcourir 400 kilomètres sans recharge, selon KPMG.

En savoir plus
  • 26 018
    Nombre de voitures à zéro émission immatriculées au cours du premier trimestre 2022
    Statistique Canada
    5,2 %
    proportion des voitures neuves à zéro émission sur la route en 2021
    Statistique Canada