Les économistes des principales institutions financières au pays ont été pris par surprise par la hausse d’un plein point de pourcentage du taux de directeur de la Banque du Canada. Résumé de leurs analyses.

Randall Bartlett, directeur principal d’analyse de l’économie canadienne, Mouvement Desjardins

« Malgré les signes d’un ralentissement de l’économie, la Banque du Canada indique très clairement son intention de continuer à relever les taux d’intérêt. Cela entraînera une baisse de l’activité économique encore plus rapide que prévu jusqu’à récemment, ce qui augmentera les risques d’une récession en 2023. Parce que des facteurs mondiaux comme la guerre en Ukraine et les perturbations des chaînes d’approvisionnement maintiennent les prix élevés, c’est sur l’économie nationale au Canada que pèse le fardeau d’une réduction de l’inflation par un refroidissement de la demande. Les secteurs sensibles aux taux d’intérêt, comme le logement, sont les premiers à souffrir de l’ajustement, et la consommation pourrait bientôt suivre. »

Josh Nye, économiste principal, Banque Royale (RBC)

« À 2,50 %, le taux directeur de la Banque du Canada se situe maintenant au milieu de la fourchette neutre de 2 % à 3 % qui est censée ne pas stimuler ni ralentir significativement l’économie. Néanmoins, je crois qu’une médecine plus sévère sera nécessaire pour maîtriser l’inflation. Le taux directeur pourrait augmenter à un niveau restrictif de 3,25 % d’ici octobre. Pendant ce temps, bien que la Banque du Canada ait révisé ses prévisions de croissance du PIB à la baisse, je pense qu’elles demeurent optimistes. Un atterrissage en douceur de l’économie sera difficile à réaliser. Je table désormais sur une légère récession l’année prochaine au Canada. »

Sasan Fouladirad, économiste au Conference Board du Canada

« Si la Banque du Canada ne rehausse pas son taux d’inflation cible à court terme, elle risque de surélever les taux d’intérêt et de faire basculer l’économie canadienne dans une récession. Mais en augmentant son taux d’inflation cible, du moins à court terme, cela permettrait à la Banque du Canada d’adopter une position moins agressive et de réévaluer l’impact des hausses de taux sur l’économie. Entre-temps, la hausse des taux d’intérêt devrait être considérée comme un coût supplémentaire pour les Canadiens, en particulier ceux qui sont très endettés. »

Benjamin Reitzes, directeur d’analyse et stratégiste, économie canadienne et taux d’intérêt, Banque de Montréal (BMO)

« La flambée de l’inflation et la hausse des attentes inflationnistes ont provoqué la hausse surprise de taux de 100 points de base (1 %) de la Banque du Canada mercredi. Néanmoins, je continue de prévoir que la banque centrale augmentera les taux de 50 points de base supplémentaires (0,5 %) en septembre, et qu’une autre augmentation plus importante pourrait suivre. Avec les plus récents commentaires de la Banque du Canada, je m’attends à ce que le taux directeur culmine à 3,5 % d’ici la fin de l’année. Nous verrons alors si cela suffit pour calmer notablement l’inflation même si, entre-temps, le contexte économique devient un peu plus difficile. »

Karyne Charbonneau, économiste, Banque CIBC

« Après avoir été dépassée par la Fed [Réserve fédérale américaine] en juin, la Banque du Canada se démarque avec la plus forte augmentation de taux d’intérêt (1 %) parmi les pays du G-7 afin de calmer les pressions inflationnistes. Les marchés financiers anticipent que le taux directeur au Canada devra aller bien au-dessus de la fourchette dite « neutre » de 2 % à 3 % pour calmer l’inflation sans trop nuire à l’économie. Pour ma part, je pense que le taux directeur sera rendu à 3,25 % en fin d’année, ce qui pourrait ouvrir la porte à un léger repli des taux l’an prochain si, comme je m’y attends, les pressions inflationnistes se dissipent un peu plus rapidement que ce que prévoit la Banque du Canada. »

Philippe Simard, directeur hypothécaire au Québec à ratehub.ca

« Cette hausse de taux surdimensionnée exercera une pression à la baisse supplémentaire sur des marchés immobiliers déjà refroidis dans tout le pays. Dans plusieurs régions, les marchés encore à l’équilibre vont évoluer vers des marchés en faveur des acheteurs. Entre-temps, cette hausse de taux signifie que les emprunteurs hypothécaires, qu’il soit à taux variable ou fixe, seront soumis à un test de résistance financière à un taux d’intérêt supérieur de 2 points de pourcentage à leur taux contractuel. Pour les emprunteurs à taux fixe, ce test de résistance sera à un taux d’environ 7 %. Pour les emprunteurs à taux variable, il sera aux environs de 6 %. »