Les premières réactions à l’entente entourant l’achat de Freedom Mobile par Québecor sont favorables au conglomérat québécois de télécommunications. La Financière Banque Nationale est à ce point enthousiaste qu’elle change sa recommandation et suggère dorénavant l’achat de l’action du propriétaire de Vidéotron.

Québecor, Rogers et Shaw ont annoncé vendredi soir une entente selon laquelle Québecor convient de débourser 2,85 milliards pour Freedom Mobile, une entreprise de services sans fil active en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique. L’entente ajouterait environ 1,7 million d’abonnés à la clientèle de Québecor.

Non seulement la transaction est annoncée à un prix raisonnable, soutient l’analyste Adam Shine, de la Financière Banque Nationale, mais en plus elle ne nécessite ni émission d’actions ni partenaire financier pour se concrétiser.

Cet expert souligne, dans une note rédigée dimanche, s’attendre à ce que Freedom adopte le nom de Fizz, le fournisseur de téléphonie cellulaire et internet à bas prix de Vidéotron, et que Québecor propose des services sans fil et une offre groupée (internet et sans-fil) en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique grâce à un accord pour revendre les services internet de Rogers achetés en gros par l’entremise d’un accord.

Rogers et Shaw ont consenti ce printemps à vendre Freedom Mobile pour convaincre les autorités réglementaires d’approuver l’acquisition de Shaw par Rogers, une transaction évaluée à 26 milliards de dollars (incluant la dette).

Adam Shine dit être en désaccord avec le Bureau de la concurrence qui a réitéré, la semaine dernière, son opposition au mariage de Shaw avec Rogers en affirmant que la vente de Freedom Mobile ne serait pas une solution efficace et que ça affaiblirait Freedom en tant que concurrent.

Son collègue Jérôme Dubreuil, chez Valeurs mobilières Desjardins, ajoute de son côté que l’accord entourant Freedom permet à Québecor de « récolter un fruit mûr » et d’élargir ses horizons à un prix « raisonnable » tout en augmentant les probabilités de réalisation de la fusion de Rogers avec Shaw.

La feuille de route, le bilan, l’expertise et les actifs de Québecor sont tous des éléments qui rendent de plus en plus difficile pour le régulateur d’affirmer que l’environnement concurrentiel sera substantiellement affecté par une fusion de Rogers avec Shaw.

Jérôme Dubreuil

« Il est difficile de prédire le prochain geste posé par le Bureau de la concurrence, mais le régulateur est incité à régler le dossier rapidement afin que Québecor puisse concurrencer de façon efficace aussitôt que possible », ajoute-t-il.

Réaction positive

Cet analyste s’attend lui aussi à une réaction positive des investisseurs lundi. « Bien que le marché avait jusqu’ici semblé de façon générale être défavorable à une acquisition de Freedom par Québecor, la transaction avait du sens à un certain prix. » Et à 2,85 milliards, Québecor réalise une transaction à un prix attrayant, selon lui. Il avait précédemment évalué les actifs de Shaw dans le sans-fil à plus de 4 milliards.

Jérôme Dubreuil précise cependant que les dirigeants de Québecor devront fournir davantage de précisions entourant la stratégie et les attentes financières pour bien rassurer les investisseurs et permettre à l’action de Québecor de réellement diminuer l’escompte d’évaluation actuellement observé sur le titre.

Le démarrage des activités sans fil à l’extérieur du Québec comporte, entre autres, des risques financiers.

Jérôme Dubreuil croit notamment que Québecor pourrait ralentir le rythme de ses rachats d’actions et de la croissance de son dividende.

« Shaw a ralenti significativement ses dépenses en capital depuis l’annonce de sa fusion avec Rogers, et Québecor aura du rattrapage à faire au niveau des investissements en sans-fil. » Il estime que Québecor devra investir 200 millions simplement en dépenses de rattrapage au cours des trois premières années suivant la transaction.

Jérôme Dubreuil s’attend par ailleurs à ce que l’intensité concurrentielle augmente — autrement dit, à une pression sur les prix – dans le marché du sans-fil, une fois que la fusion sera complétée.

Un règlement de la poursuite de 850 millions intentée l’automne dernier par Québecor contre Rogers ne fait par ailleurs pas partie de l’entente pour Freedom Mobile. Adam Shine souligne par contre que les négociations amicales menant à un accord pour Freedom pourraient ouvrir la voie à un abandon par Québecor de cette démarche judiciaire que l’entreprise avait lancée en affirmant que Rogers avait « provoqué artificiellement une impasse » dans une entente conclue pour créer un réseau sans fil 4G LTE commun au Québec et dans la région d’Ottawa.

Ils sont maintenant 10 analystes sur 12 à recommander l’achat de l’action de Québecor.