Le leadership est un domaine vaste comportant de multiples défis et l’un d’eux est certainement de s’entendre sur la définition même du leadership.

Il est généralement admis qu’il faut adapter ses comportements à chaque situation et que le comportement approprié à une situation peut être exactement le contraire de celui requis en d’autres temps.

Un bel exemple concerne ce qui est généralement attendu d’un leader, soit de savoir s’imposer alors qu’il est parfois préférable de simplement savoir s’effacer.

PHOTO MATHIEU BÉLANGER, ARCHIVES LA PRESSE

Yvon Charest, ex-PDG d'Industrielle Alliance

Chercher le bon équilibre dans ses comportements requiert une bonne dose de réflexion et de jugement. On s’attend naturellement d’un dirigeant qu’il soit proactif, qu’il communique et vende ses idées et qu’il soulève ce qui est, selon lui, un problème dans son organisation. Mon propos aujourd’hui est de faire réfléchir les dirigeants aux circonstances où se taire est plus utile et efficace. C’est un drôle de paradoxe où votre silence vous rend, aux yeux d’autrui, un meilleur dirigeant.

Je vais donc donner des exemples où votre réputation de bâtir un esprit d’équipe par des échanges véritables tout en étant reconnu comme humble, respectueux et intègre pique du nez parce que vous venez d’ouvrir la bouche. À tort ou à raison, vos propos font que votre entourage vous trouve un tantinet arrogant et vantard, croit que vous avez un réflexe de manipuler autrui ou de créer des conflits et que possiblement vous auriez tendance à mépriser les gens.

Des exemples ? Parler sur le coup de la frustration, jeter le blâme sur autrui, vous vanter constamment, vous accorder le mérite qui ne vous revient pas, ajouter constamment votre grain de sel, passer des jugements ou des remarques désobligeantes, expliquer pourquoi ça ne fonctionnera pas.

Il y a pire encore et c’est de punir le messager qui entre dans votre bureau avec une mauvaise nouvelle. Il y a aussi le piège de justifier tous vos propos sous le couvert d’une belle authenticité, comportement porté aux nues par les experts, sans se questionner de son utilité. Tous ces comportements ont un point en commun : vous venez de parler !

Cessez de prendre le mérite qui ne vous revient pas et vous aurez plus de chances de conserver votre réputation de dirigeant intègre. Cessez de vous vanter ou d’expliquer pourquoi les idées d’autrui sont mauvaises et vous garderez intacte votre image d’une personne humble. Cessez de punir le messager ou de parler sur le coup de la frustration et vous augmenterez vos chances d’être perçu comme un bâtisseur d’équipe. Cessez d’ajouter constamment votre grain de sel ou d’avoir un besoin excessif d’authenticité et l’on dira que vous réalisez des échanges véritables.

À mes yeux, la valeur la plus importante d’un dirigeant accompli est de faire preuve de respect, soit de démontrer par ses gestes que tout être humain a la même valeur. Les gens obéissent au pouvoir et à l’intimidation, mais le manque de sensibilité prive les dirigeants du soutien de leurs troupes dans les moments critiques. À cet égard, punir le messager ou passer des remarques désobligeantes dénote un manque évident de respect. L’humilité, la véracité, le respect et l’intégrité permettent de développer des relations riches avec autrui, et il serait malheureux que la qualité de vos relations se détériore par une parole de trop. En prime, toutes ces occasions de fermer sa bouche et d’ouvrir grand ses oreilles sont tellement bénéfiques pour développer son sens de l’écoute. Je n’invite personne à manquer de courage ou à ne pas être transparent. Je vous invite simplement à réfléchir plus souvent à l’utilité de vos paroles… avant l’arrivée de la tentation.