Avec la fin imminente de plusieurs programmes d’aide financière mis sur pied durant la pandémie, quelles sont les options des entrepreneurs face aux défis comme la hausse de l’inflation et des taux d’intérêt, ainsi que l’accentuation de la pénurie de main-d’œuvre ? Plusieurs experts ont été consultés sur le sujet dans le cadre d’un webinaire pour entrepreneurs organisé mercredi par la firme-conseil Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT), en collaboration avec la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI). Voici leurs constats.

Endettées et fragilisées

« Les programmes de subventions spéciales ont vraiment joué le rôle de parachutes et de bouées de sauvetage pour un grand nombre de PME, selon François Vincent, vice-président, Québec, à la FCEI. Mais alors que l’économie a rebondi à plein régime, il y a encore beaucoup de PME qui sont fragilisées par l’endettement qu’elles ont contracté pendant la pandémie, et dont les revenus demeurent inférieurs à leur niveau d’avant la pandémie. »

Remontée des cas d’insolvabilité

De l’avis de Guillaume Landry, associé du Groupe de redressement et d’insolvabilité à la firme-conseil RCGT, « le bouquet de mesures d’aide financière et fiscale qui a été mis en place par les gouvernements durant la pandémie a permis aux PME de mieux supporter les effets de cette crise ». D’ailleurs, « les dossiers d’insolvabilité ont baissé de 25 % en 2020, ce qui était du jamais-vu auparavant. Cette baisse s’est relativement stabilisée en 2021, mais on s’attend maintenant à ce qu’il y ait un retour des dossiers d’insolvabilité à des niveaux déjà connus avant la pandémie ».

Mise à jour du plan d’affaires…

Après la fin des programmes spéciaux d’aide financière en période de pandémie, et l’accentuation de facteurs économiques comme la pénurie de main-d’œuvre ainsi que la hausse de l’inflation et des taux d’intérêt, « c’est important pour les entrepreneurs de prendre une pause afin de réévaluer les vulnérabilités spécifiques de leur PME dans un tel contexte », a souligné Guillaume Landry, associé du Groupe de redressement et d’insolvabilité chez RCGT. « Quels sont les risques sur les revenus, sur la marge bénéficiaire, sur les conditions de marché dans le secteur d’activité, sur la fiabilité et les coûts des principales chaînes d’approvisionnement, etc. ? »

… et de la planification financière

« Dans un contexte économique qui se complique, l’un des outils de gestion les plus importants pour les entrepreneurs, c’est la mise à jour des prévisions financières de leur PME pour les deux à trois prochaines années », a indiqué Guillaume Landry, associé du Groupe de redressement et d’insolvabilité chez RCGT. Mais pour être vraiment efficace, un tel exercice de planification financière doit « éviter l’erreur de la complaisance ». « On ne fait pas cet exercice pour que ce soit cute, mais bien pour avoir des réponses à certaines questions parfois difficiles », selon M. Landry. Autre erreur à éviter en planification financière d’une PME : « trop focaliser sur la rentabilité plutôt que sur les liquidités disponibles », ajoute Guillaume Landry. « Habituellement, ce ne sont pas quelques pertes temporaires qui causent le plus de problèmes financiers pour une PME, mais c’est plutôt le manque de liquidités qui découle d’une planification financière inadéquate. »

Suivi des programmes d’aide

Malgré la fin des principaux programmes d’aide liés à la pandémie, quelques programmes demeurent accessibles aux PME, a rappelé Marianne Chouinard, chef d’équipe, Ressources aux entreprises, à la FCEI. « Au Québec, il y a encore, dans les secteurs d’activité très affectés par la pandémie comme le tourisme, un programme de prêts spéciaux d’aide à la reprise avec une portion non remboursable, a souligné Mme Chouinard. Au fédéral, les programmes de Subventions d’urgence du Canada (salariales et autre) sont terminés. Ils ont été remplacés par un programme temporaire d’aide à la relance pour les PME les plus durement touchées. Il fonctionne comme une ‟extension” des critères d’admissibilité de programmes qui existaient avant la pandémie. »

Continuité des crédits d’impôt

En complément à ces programmes d’aide financière, des crédits d’impôt d’usage spécifique demeurent dans la boîte à outils des PME de l’après-pandémie, a rappelé Marianne Chouinard. « Pour contrer l’impact de la pénurie de main-d’œuvre, notamment, les PME ont accès à des crédits d’impôt liés à l’embauche de certaines catégories de chercheurs d’emploi, comme les immigrants récents, les membres de minorités visibles ou de Premières Nations (autochtones), les personnes handicapées, a souligné Mme Chouinard. Il existe aussi des crédits d’impôt pour favoriser l’embauche et la rétention de travailleurs dits ‟d’expérience” de 60 ans et plus, ainsi que des crédits d’impôt à l’innovation pour l’achat d’équipements pouvant atténuer la réduction de capacité de production en raison d’un manque de main-d’œuvre. »