Contrairement aux remous derrière leurs portes closes, les députés conservateurs étaient unis mardi à la Chambre des communes où les conséquences de « l’inflation libérale » sur l’épicerie de « madame Tremblay » ont occupé une place de choix sur leur menu lors de la période des questions.

À pas moins d’une dizaine de reprises, des députés des banquettes conservatrices se sont levés sur le sujet, reprochant notammentaux libéraux « d’appauvrir les Canadiens » alors que l’indice des prix à la consommation a atteint 4,8 % en décembre sur une base annualisée, l’inflation n’ayant pas été aussi forte au pays en 30 ans.

Vous ne faites que « dénigrer l’économie canadienne » avec de « faux récits », a répondu la ministre des Finances, Chrystia Freeland.

« Statistique Canada a publié aujourd’hui de nouvelles données qui montrent que notre PIB a augmenté de 0,6 % en novembre et cela signifie qu’avant l’arrivée d’Omicron notre économie était complètement remise de la récession de la COVID », a-t-elle noté.

Lors de cette séance où le chef conservateur Erin O’Toole brillait par son absence, son leader à la Chambre, Gérard Deltell, qui venait de lancer la charge, a alors invité la ministre Freeland à l’accompagner à l’épicerie pour expliquer aux consommateurs que : « Wow, le PIB vient d’augmenter ».

Le « potentiel économique » du Canada ne fait que croître, lui a rétorqué la ministre Freeland, ajoutant que « le FMI a récemment prévu que le Canada aura le deuxième taux de croissance le plus élevé des pays du G7 ».

Dans ce jeu de ping-pong, le député Deltell a renchéri qu’au « IGA à Gatineau », la ministre pourra expliquer : « Mme Tremblay, faites-vous-en pas, le FMI dit que ça va bien au Canada ». Parce que « toutes les Mmes Tremblay du Canada » paient plus cher leur épicerie.

Piquée au vif, la ministre a lancé que « ce n’est pas seulement Mme Tremblay qui fait l’épicerie, c’est aussi Mme Freeland qui la fait chaque fin de semaine pour ma famille ».

La ministre a insisté que « les faits et les données sont importants ». L’inflation au Canada est inférieure à la moyenne du G7, du G20 et celle de l’OCDE, a-t-elle soutenu.

La députée conservatrice de Calgary, Michelle Rempel Garner, est revenue à la charge quelques minutes plus tard et s’est insurgée qu’une ministre qui a « un salaire annuel de 270 000 $ » se compare avec une personne qui peine à payer l’épicerie.

Les libéraux sont « déconnectés du Canadien moyen », a-t-elle lancé lors d’échanges vigoureux.

Selon Statistique Canada, les données de l’inflation du mois de décembre ont été propulsées par les prix des produits d’épicerie, qui ont grimpé de 5,7 % d’une année à l’autre – leur plus forte hausse en une décennie – et ceux du logement, qui ont progressé de 9,3 % par rapport à décembre 2020.

Les prix de l’essence à la pompe ont diminué d’un mois à l’autre en raison du resserrement des restrictions de santé publique liées à la propagation du variant Omicron, mais ils montraient tout de même une croissance de 33,3 % par rapport à décembre 2020.

Tandis que les conservateurs redoublaient d’exemples très concrets mardi sur « l’explosion » du coût de la vie, dont le cas d’une mère de famille dont l’augmentation de la facture d’épicerie représente annuellement « une paie complète », la ministre Freeland répondait que les Canadiens comprennent que « l’inflation est un phénomène mondial ».

« Le dernier taux d’inflation au Canada était 4,8 %, aux États-Unis 7 %, en Allemagne 5,3 %, au Royaume-Uni 5,4 %, la moyenne de l’OCDE est 5,8 %, du G7 5,3 % et du G20 5,8 % », a par exemple énuméré la ministre.

« Qu’on se compare à n’importe quel pays au monde, ça ne donne pas une cenne de plus à cette mère de famille là qui a de la misère à nourrir ses enfants », a répondu le député Luc Berthold.

Il y a deux semaines, le directeur parlementaire du budget (DPB) suggérait dans un rapport de mettre fin aux mesures de stimulation économique projetées par Ottawa.

Les libéraux avaient promis jusqu’à 100 milliards de mesures de relance pandémique, sous réserve d’une série de « garde-fous budgétaires », mais ces indicateurs largement liés au marché de l’emploi ont été atteints, selon le DPB.

Les conservateurs ont tenté en vain mardi de savoir si le gouvernement mettra fin à ces mesures qui feraient « exactement la mauvaise chose » en augmentant l’inflation.