Pour « donner le ton par le sommet » lorsqu’il est question de harcèlement en milieu de travail, les administrateurs doivent être mieux outillés, estime l’Ordre des administrateurs agréés du Québec, qui lance une formation destinée spécialement aux gestionnaires qui siègent à un conseil d’administration.

L’initiative qui sera annoncée ce lundi émane notamment de la crise très médiatisée dans laquelle le Musée des beaux-arts de Montréal avait été plongé en 2020 après le congédiement de Nathalie Bondil, qui était directrice générale et conservatrice en chef, dans la foulée d’allégations concernant la dégradation du climat de travail.

« Cela a fait réfléchir et a fait en sorte de montrer la pertinence de cette formation », explique le président de l’Ordre, Alexandre Bellemare. « C’est l’évènement qui vient en premier. »

Mme Bondil avait répliqué par le truchement de poursuites à l’endroit des membres du conseil d’administration du Musée en réclamant des dommages moraux et punitifs. Une entente à l’amiable est intervenue entre les deux parties plus tôt ce mois-ci.

Lisez l’article « Entente entre le MBAM et Nathalie Bondil »

En matière de harcèlement en milieu de travail, l’Ordre proposait une formation spécialement destinée aux cadres depuis 2016, mais il a senti le besoin d’aller plus loin.

« Les membres d’un conseil, bien qu’ils ne soient pas responsables de l’élaboration de la politique de harcèlement, doivent être au courant qu’elle existe, dit M. Bellemare. Il est important que le C.A. donne l’exemple. Cela envoie un message à la direction et aux employés. »

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Alexandre Bellemare, président de l’Ordre des administrateurs agréés du Québec

Depuis deux ans, la Loi sur les normes du travail oblige les employeurs à adopter et à rendre accessible à leur personnel une politique de prévention du harcèlement psychologique ou sexuel au travail et de traitement des plaintes.

La formation de l’Ordre vise ainsi à outiller les administrateurs pour « prévenir, reconnaître et intervenir » plutôt que s’en remettre uniquement aux gestionnaires de l’organisation.

« Il doit y avoir un œil sur la culture qui règne au sein de l’organisation, illustre M. Bellemare. Beaucoup de personnes veulent siéger à un conseil d’administration, mais énormément de responsabilités viennent avec cela. Les administrateurs doivent être conscients de la portée de leur rôle. »

Selon des statistiques de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), le nombre de dossiers ouverts à la suite d’allégations de harcèlement concernant des travailleurs non syndiqués a bondi de près de 11 % entre 2014 et 2020, pour s’établir à environ 3500. Plus de 4400 plaintes ont même été enregistrées en 2019. L’organisme estime que jusqu’à 16 % des plaintes pourraient être traitées à l’intérieur d’une organisation si des mécanismes de médiation étaient mis en place.

Financée grâce à une subvention de 70 000 $ attribuée par la CNESST, la formation a été préparée par l’experte en gouvernance et administratrice Louise Champoux-Paillé ainsi que par le sociologue et professeur titulaire à l’Université du Québec à Montréal Angelo Soares.

Selon M. Bellemare, il s’agit d’une des premières formations de prévention du harcèlement qui s’adresse expressément aux administrateurs.

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    L’équipe de l’Ordre des administrateurs agréés du Québec a travaillé pendant six mois sur la préparation de la formation, qui est offerte gratuitement.
    Ordre des administrateurs agréés du Québec