Guy Saint-Pierre, qui a été l’architecte de la fusion des sociétés d’ingénierie SNC et Lavalin, en 1991, est mort dimanche après-midi à sa résidence à Montréal, à l’âge de 87 ans, à la suite d’une longue maladie. Il était entouré de sa femme et de ses trois enfants.

M. Saint-Pierre a été ministre dans les gouvernements libéraux de Robert Bourassa de 1970 et de 1973. Il a aussi été activement impliqué dans la création de la Société de la Baie-James, avant de revenir à son métier d’ingénieur, où il a continué à travailler à bâtir le Québec moderne.

Natif de Windsor, en Estrie, diplômé en génie civil de l’Université Laval en 1957 et détenteur d’une maîtrise de l’Université de Londres obtenue en 1959, Guy Saint-Pierre a été responsable en 1967 de l’aménagement hydroélectrique des chutes Churchill, au Labrador.

En 1970, Guy Saint-Pierre devient député libéral de la circonscription de Verchères et ministre de l’Éducation du premier gouvernement de Robert Bourassa. En 1972, il est nommé ministre de l’Industrie et du Commerce, fonction qu’il occupera jusqu’à l’élection du Parti québécois, en novembre 1976.

« C’est Guy Saint-Pierre qui a été l’instigateur de la création de la Société de développement de la Baie-James, la société d’État qui a eu le mandat de chapeauter cet immense projet de développement hydroélectrique. Il a défendu ce projet au Conseil des ministres, il y tenait », a rappelé à La Presse dimanche soir Ronald Poupart, qui était directeur du Parti libéral du Québec à l’époque.

« Même ses adversaires politiques le respectaient, se souvient Philippe Angers, un ami de la famille qui a côtoyé M. Saint-Pierre dans sa vie politique. Ses compétiteurs en génie aussi. C’est un homme qui rentrait dans une salle et qui imposait le respect. »

De la politique à l’ingénierie

Après son passage en politique, l’ingénieur de formation se joint à la société John Labatt en 1977, et est nommé l’année suivante président et chef de l’exploitation de Minoteries Ogilvie, une division de Labatt.

En 1988, la société d’ingénierie SNC le recrute pour qu’il devienne son président et chef de l’exploitation. C’est lui qui orchestrera en 1991 l’acquisition et la fusion de la firme Lavalin, qui éprouvait alors de sérieuses difficultés financières. SNC-Lavalin devient l’une des cinq plus grandes sociétés de génie-conseil au monde.

« Je pense qu’il avait une vision pas mal plus large que celle du Québec, estime Philippe Angers. Il a aidé à partir le Québec, qui ne partait pas de grand-chose. »

M. Saint-Pierre est resté président et chef de la direction de la nouvelle SNC-Lavalin jusqu’en 1996, lorsqu’il en devenu président du conseil, fonction qu’il occupera jusqu’en 2002.

« C’était un bâtisseur de l’ombre. Ce n’est pas quelqu’un qui a cherché le spotlight dans sa vie. Peut-être qu’il n’était pas d’une génération à courir les caméras », a confié à La Presse un ami de la famille, qui a demandé à garder l’anonymat par respect pour ses proches.

Rayonnement pour le Québec

En 2001, Guy Saint-Pierre est le premier francophone nommé président du conseil de la Banque Royale ; il le sera jusqu’en 2004. Parallèlement, il devient un administrateur recherché et il siégera au conseil de nombreuses grandes entreprises comme BCE, Alcan, General Motors du Canada, Stelco et Suncor.

En 1994, Guy Saint-Pierre est nommé PDG de l’année au Canada et, en 1995, il est choisi pour devenir président du Conseil canadien des chefs d’entreprise. Au fil des ans, il accumule les doctorats honorifiques, sa carrière étant saluée par six institutions, dont l’Université Concordia, l’Université Laval et le Collège militaire royal de Saint-Jean. En 2009, il devient grand officier de l’Ordre national du Québec. Il est aussi compagnon de l’Ordre du Canada depuis 2002.

« De petit gars de Victoriaville [lieu de ses études secondaires], c’est vraiment fabuleux, ce qu’il a fait », témoigne Philippe Angers.