À défaut de tests PCR et de tests rapides, employeurs et travailleurs devront réussir le test de compréhension des consignes temporaires, qui s’entremêlent aux normes du travail habituelles. Voici quelques éléments pour s’y retrouver.

La Santé publique du Québec a rabaissé de 10 à 5 jours la durée de l’isolement des personnes adéquatement vaccinées qui présentent des symptômes de la COVID-19. Par ailleurs, les tests PCR réalisés en clinique de dépistage sont désormais réservés aux clientèles prioritaires. Les personnes non priorisées qui n’ont pas accès aux rares tests rapides seront considérées comme atteintes de la COVID-19 et devront suivre les consignes d’isolement.

Dès lors, est-ce que l’employeur peut exiger de son employé un test PCR au privé pour justifier son absence en raison de la COVID-19 ?

« Dans la mesure où les critères établis sont respectés par la Santé publique, il va devenir difficile, pour un employeur dont l’employé ne cadre pas dans l’une ou l’autre des catégories priorisées, d’exiger un test mené par la Santé publique », répond Éric Lallier, avocat spécialisé en droit du travail chez Norton Rose Fulbright. « Il restera une option : les cliniques privées. Est-ce qu’un employeur pourrait exiger la preuve d’un test PCR effectué par une clinique privée ? Je pense que oui. »

Qui paie alors le test : l’employé ou l’employeur ?

« À cette question, la réponse est beaucoup moins claire, commente Me Lallier. Mais il est certain que des employeurs vont décider de débourser pour que les tests soient menés au privé, parce qu’ils sont bien conscients de leur principale obligation : assurer la santé et la sécurité des lieux du travail. Ils ne voudront pas courir de risque. Cette pratique devrait être plus répandue dans les prochaines semaines. »

Un test rapide pourrait-il être suffisant ?

« Oui, un employeur pourrait demander la preuve d’un test rapide, surtout s’ils sont disponibles comme on l’anticipe, énonce l’avocat. Un employé pourrait avoir à se procurer ce test rapide et à faire la preuve qu’il a obtenu un résultat positif. »

Comment l’employé peut-il apporter la preuve d’un résultat positif à un test rapide ?

« Les organisations sont créatives. On peut penser, par exemple, de demander à l’employé de confirmer par courriel à quel moment il a subi le test, avec la photo qui en démontre les résultats », décrit Éric Lallier. Cet échange devra toutefois s’inscrire dans « la relation de confiance qui doit unir l’employeur et son employé, parce qu’il n’y a pas une autorité qui pourra venir confirmer quoi que ce soit ». Tout abus par l’employé pourrait faire l’objet de sanctions.

Selon la Loi sur la santé et la sécurité du travail, « un travailleur a le droit de refuser d’exécuter un travail s’il a des motifs raisonnables de croire que l’exécution de ce travail l’expose à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ». Un employé pourrait-il invoquer ce droit par crainte de contracter la COVID-19 auprès d’un collègue de retour après cinq jours d’isolement ?

« Sauf s’il y a de la négligence, par exemple en laissant de nombreuses personnes avec des symptômes présents sur les lieux du travail, le droit de refus ne pourrait pas, à mon sens, être invoqué sur la simple base d’une crainte d’être potentiellement contaminé par la COVID-19, exprime Éric Lallier. Par contre, avec les mesures qui s’assouplissent, beaucoup d’employés vont manifester des craintes et des préoccupations. Un employeur diligent va devoir s’assurer de rappeler les mesures en place, de faire de façon proactive des rappels des mesures de sécurité et de l’importance de s’y conformer. »

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Éric Lallier, avocat spécialisé en droit du travail chez Norton Rose Fulbright

Quelles preuves demandent les assureurs pour une réclamation d’assurance salaire (invalidité de courte durée) en raison de la COVID-19 ?

« Le formulaire standardisé développé par l’industrie dans le contexte de la COVID-19 n’exige pas de billet ou de diagnostic de la part d’un médecin. Un résultat de test positif est suffisant », a répondu par courriel Jérémy Drivet, porte-parole de l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes. « Puisque le test PCR est désormais moins accessible pour la population générale, les assureurs de personnes acceptent maintenant les résultats des tests rapides. »

Dans l’impossibilité d’avoir accès aux tests PCR ou rapides, comment les assureurs accueilleront-ils les demandes d’indemnisation des travailleurs qui seront considérés comme atteints de la COVID-19 ?

« En général, si une personne est tenue de s’isoler sans avoir obtenu un résultat de test positif – par exemple, en raison d’une exposition possible au virus –, elle peut être admissible à un congé payé de l’employeur, mais ne sera pas admissible à l’invalidité de courte durée. »

En d’autres mots : pas d’indemnisation. Mais il faut voir au cas par cas. Chez Beneva, par exemple, on nous a dirigé vers les informations données sur les sites de ses filiales SSQ et La Capitale.

Dans le cas d’une assurance collective avec protection d’assurance salaire, le site de la SSQ précise que « si vous avez des symptômes, mais que vous n’avez pas été testé pour la COVID-19, et que vous êtes invalide (incapable de remplir les principales fonctions de votre emploi, et ce, même en télétravail), vous êtes admissible aux prestations de courte durée ». Cependant, le délai de carence prévu au contrat s’applique.

La COVID-19 est-elle une maladie professionnelle indemnisée par la CNESST ?

Selon le site de la CNESST, « les travailleurs atteints de la COVID-19 qui auraient été infectés par le fait ou à l’occasion de leur travail pourraient avoir droit aux prestations et services habituels offerts par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles ».

Le travailleur doit transmettre le formulaire Réclamation du travailleur « accompagné du résultat positif de son test de COVID-19 ».

La CNESST n’a cependant pu préciser si les tests rapides seraient acceptés, ni comment elle accueillerait les demandes de réclamations des travailleurs qui, sans accès aux insaisissables tests rapides, sont considérés comme atteints de la COVID-19. « La CNESST analyse présentement avec ses différents partenaires les meilleures solutions à mettre en place dans le contexte actuel en tenant compte des contextes légal et sociosanitaire », a-t-on répondu.