Dollarama pourrait être un meilleur employeur, selon le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI). Après avoir fait l’objet de plusieurs constats d’infraction remis par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), l’enseigne spécialisée dans les articles vendus 1 $ ou plus est critiquée par l’organisme en raison de son recours aux agences de placement pour l’embauche d’employés à son centre de distribution.

« Il est absolument certain que Dollarama pourrait être un meilleur employeur, soutient Jessie Lauren Stein, organisatrice communautaire pour le CTI. Il y a encore beaucoup de progrès à faire. »

Depuis le début de la pandémie, l’organisme a fait plusieurs interventions pour demander que les travailleurs soient mieux protégés contre la propagation de la COVID-19. Voilà pourquoi, un an après le début de la crise — qui a aussi été le moment où Dollarama a été qualifiée de service essentiel —, le CTI a tenu à organiser une action au cours de laquelle masques, jus et dépliants d’information ont été remis aux employés qui sortaient de la station de métro De la Savane, à Mont-Royal, pour se rendre au centre de distribution de l’entreprise, situé non loin. Plus d’une centaine de personnes marchaient sur le trottoir pour se rendre au travail.

Nous demandons que Dollarama prenne ses responsabilités envers ses employés en les embauchant directement, en gardant la prime de risque [liée à la COVID-19] et en continuant d’améliorer les mesures de santé et sécurité.

Jessie Lauren Stein, organisatrice communautaire pour le CTI

Le CTI reproche en effet à l’entreprise d’embaucher ses employés en passant par des agences de placement qui se font compétition entre elles. Et lorsqu’un travailleur veut porter plainte en ce qui a trait à ses conditions de travail, Dollarama et l’agence se déresponsabilisent et se renvoient la balle, estime Mme Lauren Stein. Sans pouvoir donner de chiffres, elle rappelle que plusieurs de ces travailleurs sont des immigrés au statut précaire, ce qui, selon l’organisatrice, rend le processus de plainte encore plus fastidieux.

Dollarama ne compte qu’un seul centre de distribution. Situé à Mont-Royal, il dessert les 1333 magasins de l’entreprise partout au Canada. De 1150 à 1450 personnes travaillent au centre de distribution et dans les six entrepôts.

Les travailleurs interpellés par La Presse mardi alors qu’ils acceptaient en passant les dépliants qu’on leur remettait n’étaient pas à l’aise de parler aux médias. Certains ont lancé rapidement que tout allait bien. L’un d’eux a clairement indiqué qu’il craignait de « perdre sa place » s’il parlait sur le trottoir, près de son lieu de travail.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants a remis mardi des dépliants aux employés de Dollarama, à leur sortie du métro à la station De la Savane.

Rappelons que des manifestations ont eu lieu l’été dernier pour réclamer de meilleures conditions de travail. En août, notamment, des travailleurs avaient reproché au géant montréalais du commerce au détail d’avoir supprimé les primes de risque de 10 % liées à la crise sanitaire versées depuis mars 2020 à ceux qui travaillent dans les magasins, de même que la hausse de 3 $ du salaire horaire des travailleurs en entrepôt. À cela, Dollarama a rétorqué qu’après les grands changements survenus en début de crise, la situation dans les magasins et au centre de distribution s’était « normalisée ». Plus récemment, La Presse a rapporté que Dollarama avait reçu 21 % des constats d’infraction remis par la CNESST entre mars et décembre 2020 pour non-respect des règles sanitaires.

Dollarama se défend

De son côté, Dollarama persiste et signe : l’entreprise a l’intention de continuer à faire appel à des agences pour recruter des employés. « L’utilisation des agences de placement fait partie intégrante de notre modèle d’affaires pour la gestion des effectifs à notre centre de distribution et dans nos entrepôts, a expliqué par courriel Lyla Radmanovich, porte-parole de l’entreprise. Dollarama travaille avec un nombre restreint d’agences de placement bien établies et entretient d’excellentes relations avec elles et avec les travailleurs sur place. Nos normes et nos pratiques, notamment en ce qui a trait à la santé et à la sécurité, s’appliquent à tous les travailleurs dans nos établissements, qu’ils relèvent de Dollarama ou d’une agence. Les agences ont d’ailleurs des représentants sur place pour encadrer leurs employés. Dollarama n’a aucune intention de changer son modèle d’affaires à cet égard. »

L’entreprise dévoilera le 31 mars les résultats financiers de son quatrième trimestre et de l’exercice clos le 31 janvier 2021.