(Buenos Aires) Un impôt « solidaire et extraordinaire » sur la fortune est entré en vigueur vendredi en Argentine afin de financer la lutte contre les effets de la COVID-19 avec la mise en œuvre de programmes d’aide sociale d’urgence.

La loi, adoptée par le Sénat le 4 décembre (par 42 voix contre 26) après la validation par la Chambre des députés, établit un impôt unique et progressif qui sera prélevé sur les foyers dont la richesse dépasse 200 millions de pesos (2,9 millions de dollars canadiens).

Les autorités fiscales vont entamer la procédure d’identification des contribuables entrant dans cette assiette, environ 12 000 dans ce pays de 44 millions d’habitants, dont 40,9 % vivent en dessous du seuil de pauvreté.

Cette « contribution solidaire et extraordinaire pour atténuer les effets de la pandémie », défendue par la majorité soutenant le président de centre gauche Alberto Fernandez est censée rapporter près de 4 milliards de dollars canadiens.

Selon la loi, un taux progressif sera appliqué allant jusqu’à 3,5 % sur les biens déclarés en Argentine et jusqu’à 5,25 % sur les avoirs à l’étranger.

Quelque 20 % du produit de cet impôt alimentera le système de santé, 20 % ira à l’aide aux petites et moyennes entreprises, 15 % à des aides sociales, 20 % à des bourses pour les étudiants, et 25 % à des aides indirectes aux foyers qui ne sont pas connectés au réseau de gaz naturel.

Vivement critiqué par l’opposition

Ce nouvel impôt a été vivement critiqué par l’opposition libérale de l’ancien président Mauricio Macri (2015-2019), qui le considère comme « confiscatoire ».

La puissante Société rurale argentine, qui représente les producteurs agricoles dans un pays où la richesse est avant tout celle des grands céréaliers et éleveurs bovins, a dit redouter que cette taxe « extraordinaire » ne devienne permanente.

L’économie argentine est en récession depuis 2018 et affiche un taux de chômage de 11,7 %. Entre janvier et novembre 2020, le PIB a chuté de 10,6 %, selon les données officielles.

L’ONG Oxfam a estimé lundi, dans son rapport annuel sur les inégalités, que les grandes fortunes mondiales étaient jusqu’ici sorties indemnes, voire renforcées de la pandémie, renouvelant son appel à taxer la richesse afin de combattre « le virus des inégalités ».

« Les 1000 personnes les plus riches du monde ont retrouvé leur niveau de richesse d’avant la pandémie en seulement neuf mois alors qu’il pourrait falloir plus de dix ans aux personnes les plus pauvres pour se relever des impacts économiques », fait valoir l’ONG dans ce rapport publié le jour de l’ouverture du Forum économique mondial qui se tient en ligne jusqu’à vendredi.

À l’échelle mondiale, les milliardaires ont même vu leur fortune augmenter de 3900 milliards de dollars entre le 18 mars et le 31 décembre 2020, selon l’ONG qui s’appuie en particulier sur les données de Forbes et de Crédit Suisse.